REJET et CASSATION PARTIELLE par voie de retranchement sans renvoi sur les pourvois formés par :
- X... Maurice,
- la commune de Plan de Cuques, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 5e chambre, en date du 16 mars 1995, qui, dans la procédure suivie contre le premier du chef d'ingérence, a condamné le prévenu à 1 an d'emprisonnement avec sursis, 50 000 francs d'amende ainsi qu'à l'interdiction définitive d'exercer toute fonction publique et a déclaré irrecevable la constitution de partie civile.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I. Sur le pourvoi de la partie civile :
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 122-20 du Code des communes, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement du tribunal correctionnel d'Aix-en-Provence du 23 mars 1993 déclarant irrecevable la constitution de partie civile de la commune de Plan de Cuques ;
" aux motifs que, si le maire se prévaut, pour justifier de la recevabilité de son action, de la délibération du 24 mai 1989 par laquelle le conseil municipal lui a accordé les délégations prévues à l'article L. 122-20 du Code des communes, aux alinéas 3, 5, 6, 8, 10, 11 et 16, force est de constater que le Conseil municipal n'a pas défini les actions en justice pour lesquelles il a donné délégation, et qu'en conséquence le maire n'a pas reçu délégation pour se constituer partie civile ou pour intenter des actions relatives à des faits d'ingérence ; qu'en l'absence de délibération particulière, faute de définition des actions en justice pour lesquelles il a été donné au maire délégation, la lettre du 1er décembre 1992 donnant mandat à l'avocat, et dont la communication à tous les conseillers municipaux ne saurait être assimilée à l'exécution des obligations légales et réglementaires résultant des textes, ne suffit pas pour faire déclarer la constitution de partie civile recevable ; que, par délibération du 31 mars 1993, le conseil municipal a donné mandat au maire de faire appel, ce qui permet de dire que l'appel interjeté par ce dernier le 1er avril 1993 est recevable, mais aussi de constater que cette délibération particulière constitue une reconnaissance implicite de ce qu'une délibération spéciale était nécessaire pour que le maire puisse se constituer partie civile " ;
" alors que le conseil municipal peut, par application des dispositions de l'article L. 122-20. 16° du Code des communes, légalement donner au maire une délégation générale pour ester en justice au nom de la commune pendant la durée de son mandat ; qu'en refusant tout effet, à raison de sa généralité, à la délibération du 24 mai 1989, la cour d'appel a violé le texte susvisé " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Maurice X... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour avoir, alors qu'il était maire de la commune de Plan de Cuques, commis le délit d'ingérence ; qu'à l'audience le maire en exercice, déclarant agir au nom de la commune, s'est constitué partie civile ; que le prévenu a alors contesté la recevabilité de cette constitution, pour défaut de qualité de son auteur ; que le tribunal a fait droit à l'exception et a statué sur l'action publique ;
Attendu qu'au soutien de son appel la partie civile a versé aux débats une délibération du conseil municipal, en date du 24 mai 1989, donnant, au maire en exercice et pour la durée de son mandat, " les délégations énumérées à l'article L. 122-20 du Code des communes, aux alinéas 3, 5, 6, 8, 9, 10, 11, 16 " ;
Attendu que, pour confirmer le jugement sur l'irrecevabilité de la constitution de partie civile, la cour d'appel énonce que, si l'article L. 122-20. 16° du Code des communes permet au maire, par délégation du conseil municipal, d'intenter, au nom de la commune, les actions en justice, ce n'est que " dans les cas définis par le conseil municipal " ; qu'elle observe qu'en l'espèce " le conseil municipal n'a pas défini les actions en justice pour lesquelles il a donné délégation " et en déduit que " le maire n'a pas reçu délégation pour se constituer partie civile relativement à des faits d'ingérence " ;
Attendu qu'en prononçant ainsi les juges ont justifié leur décision dès lors que la délibération invoquée par la partie civile se bornait à se référer aux dispositions de l'article L. 122-20 du Code des communes, reprises par l'article L. 2122-22 du Code général des collectivités territoriales ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
II. Sur le pourvoi du prévenu :
Attendu qu'aucun moyen n'est produit par le demandeur ;
Mais sur le moyen relevé d'office et pris de la violation de l'article 175 ancien du Code pénal, applicable en l'espèce :
Vu ledit article ;
Attendu qu'aux termes de l'article 175 ancien du Code pénal l'amende ne peut dépasser le 1 / 4 des restitutions et des indemnités ni être au-dessous du 1 / 12 ; qu'il en résulte qu'aucune amende ne peut être prononcée sans que des restitutions aient été ordonnées ou des indemnités allouées ;
Qu'il s'ensuit qu'en l'absence, dans l'arrêt attaqué, de toute disposition ayant statué sur des restitutions ou des dommages-intérêts, l'amende de 50 000 francs à laquelle le prévenu a été condamné manque de base légale ;
Qu'ainsi la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
I. Sur le pourvoi de la commune de Plan de Cuques :
Le REJETTE ;
II. Sur le pourvoi de Maurice X... :
CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement et sans renvoi, l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 16 mars 1995, en ce qu'il a prononcé contre Maurice X... une amende de 50 000 francs, toutes autres dispositions de l'arrêt étant expressément maintenues.