REJET des pourvois formés par :
- X... Didier,
- Y... Alain,
- Z... Gilles,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Caen, chambre correctionnelle, du 31 mars 1995, qui a condamné Didier X... et Gilles Z... à 10 000 francs d'amende pour exercice illégal de la pharmacie, Alain Y... à 15 000 francs d'amende pour complicité de ce délit, et a prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Sur les pourvois de Didier X... et d'Alain Y... :
Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;
Sur le pourvoi de Gilles Z... :
Vu les mémoires produits, en demande, en défense et en réplique :
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 30, 36 et 177 du Traité de Rome, des articles L. 511 et L. 512 du Code de la santé publique, de la directive du Conseil des Communautés européennes n° 65 / 65 du 28 janvier 1965, du règlement n° 2309 / 93 du Conseil du 22 juillet 1993, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que, l'arrêt attaqué a déclaré Gilles Z... coupable du délit d'exercice illégal de la pharmacie ;
" aux motifs que " les produits incriminés répondant à la définition du médicament doivent être soumis au monopole des pharmaciens, peu important le degré de dangerosité de leur emploi " ;
" alors que la Cour de justice des Communautés européennes considère qu'un produit, même s'il est qualifié de médicament, ne relève pas du monopole des pharmaciens si la preuve a été rapportée que son utilisation ne ferait pas courir de danger sérieux à la santé publique ; que la cour d'appel, pour admettre que les restrictions résultant du monopole de la vente des médicaments étaient justifiées par des raisons de santé publique relevant de l'exception prévue par l'article 36 du Traité, ne pouvait se dispenser de s'interroger sur le degré de dangerosité de l'emploi du produit Hansaplast ; qu'en refusant de procéder à ce contrôle de proportionnalité, elle a violé les textes visés au moyen ;
" et alors que, subsidiairement, la cour d'appel, pour décider qu'il n'y avait pas de contradiction entre la soumission du produit au monopole des pharmaciens et les règles de la libre circulation découlant du Traité de Rome, ne pouvait se borner à se référer à la directive n° 65 / 65 du 28 janvier 1965 ; que la réglementation des médicaments dans l'Union européenne ayant été modifiée, notamment par le règlement n° 2309 / 93 du Conseil du 22 juillet 1993, il appartenait à la cour d'appel et il appartient à la Cour de Cassation de saisir la Cour de justice des Communautés européennes d'une question préjudicielle portant sur le point de savoir si, en l'état du droit communautaire, la soumission d'un produit telle que la solution antiseptique Hansaplast au monopole des pharmaciens, ne doit pas être considérée, compte tenu de son absence totale de dangerosité et du fait qu'il ne relève pas d'un monopole de commercialisation dans d'autres Etats membres de l'Union européenne, comme une mesure d'effet équivalant à une restriction quantitative " ;
Attendu que la juridiction du second degré retient, par des motifs qui ne sont pas critiqués par le demandeur, que la solution antiseptique qu'il a mise en vente dans le magasin qu'il dirige, sans avoir la qualité de pharmacien, est un médicament au sens de l'article L. 511 du Code de la santé publique ;
Attendu que, pour écarter le moyen de défense présenté, soutenant qu'en raison de son absence de dangerosité ce produit ne peut être soumis au monopole de la vente en France des médicaments, les juges relèvent que la réglementation de ce monopole n'est contraire à aucune disposition du Traité CEE, dès lors que les restrictions qui peuvent en résulter sont justifiées par des raisons de protection de la santé publique et des consommateurs et qu'en outre, cette réglementation s'applique sans distinction tant aux produits nationaux qu'à ceux importés des autres Etats membres, peu important le degré de dangerosité du produit ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, et dès lors que Gilles Z... n'a pas offert, devant les juges du fond, de rapporter la preuve, dont il avait la charge, du caractère disproportionné de la soumission de ce produit au monopole de la vente des médicaments, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
Qu'en effet le règlement n° 2309 / 93 CEE du 22 juillet 1993 a seulement pour objet d'établir des procédures communautaires pour l'autorisation et la surveillance des médicaments et d'instituer une agence européenne pour leur évaluation mais n'apporte aucune modification à la directive n° 65 / 65 du 26 janvier 1965 portant définition du médicament ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.