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02/07/1996 | FRANCE | N°94-17530

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 02 juillet 1996, 94-17530


Attendu que, ayant délivré des commandements de payer demeurés infructueux, la société de Construction et d'aménagement pour la région parisienne et la province (CARPI) a sollicité le bénéfice des effets de la clause résolutoire contenue dans la vente à terme d'une maison d'habitation qu'elle avait conclue le 26 juillet 1984 avec les époux X... ; qu'elle a aussi demandé, outre l'expulsion des occupants, le paiement par eux des arriérés et d'une indemnité d'occupation ; que l'arrêt attaqué l'a déboutée de toutes ses demandes ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux b

ranches :

Attendu qu'il est fait grief à la cour d'appel d'avoir ainsi st...

Attendu que, ayant délivré des commandements de payer demeurés infructueux, la société de Construction et d'aménagement pour la région parisienne et la province (CARPI) a sollicité le bénéfice des effets de la clause résolutoire contenue dans la vente à terme d'une maison d'habitation qu'elle avait conclue le 26 juillet 1984 avec les époux X... ; qu'elle a aussi demandé, outre l'expulsion des occupants, le paiement par eux des arriérés et d'une indemnité d'occupation ; que l'arrêt attaqué l'a déboutée de toutes ses demandes ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu qu'il est fait grief à la cour d'appel d'avoir ainsi statué alors que, d'une part, en décidant qu'un tableau d'amortissement, établi pour un prêt de 10 000 francs et distinguant le montant de l'annuité correspondant à l'amortissement du capital, celle correspondant aux intérêts et le capital restant dû, ne satisfaisait pas aux prescriptions légales uniquement parce qu'il était établi sur la base du prêt de 10 000 francs, la cour d'appel n'aurait pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 312-8.2° du Code de la consommation ; et que, d'autre part, en prononçant la déchéance totale du droit aux intérêts contractuels au seul motif que la société CARPI avait méconnu l'article L. 312-8.2° du Code de la consommation et sans s'expliquer sur l'opportunité de cette sanction, la cour d'appel aurait violé les articles L. 312-33, alinéa 4, du Code de la consommation, 455 et 458 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a exactement énoncé que la loi visait à garantir à l'emprunteur une information précise lui permettant, d'un seul coup d'oeil, de juger l'effort financier à consentir et de prendre connaissance de l'évolution, dans le temps, de sa dette en capital, de sorte qu'en imposant à l'emprunteur un calcul pour mesurer l'étendue et les modalités de son engagement éventuel la société CARPI a méconnu les exigences légales ; qu'ensuite la faculté ouverte par l'article L. 312-33, alinéa 4, du Code de la consommation de prononcer la déchéance totale ou partielle des intérêts relève du pouvoir discrétionnaire du juge ; que le moyen, qui n'est pas fondé en sa première branche, est inopérant en sa seconde ;

Sur le troisième moyen pris en ses quatre branches :

Attendu qu'il est encore reproché à la cour d'appel d'avoir écarté la prescription de la demande de déchéance du droit aux intérêts alors que, d'une part, en décidant que l'article 1304 du Code civil ne s'appliquait pas lorsque était sollicitée la déchéance des intérêts contractuels, la cour d'appel aurait violé ce texte par refus d'application ; que, de deuxième part, en décidant que la prescription ne saurait courir à compter de la date de signature du prêt, la cour d'appel aurait violé le même texte ainsi que les articles L. 312-8.2o et L. 312-33, alinéa 4, du Code de la consommation ; alors que, de troisième part, en retenant qu'aucune précision n'était apportée sur la date à laquelle l'irrégularité a été découverte, la cour d'appel n'aurait pas donné de base légale à sa décision au regard tant de l'article 1304 du Code civil qu'à l'égard de l'article 2257 du même Code et de la maxime contra non valentem agere non currit praescriptio ; qu'enfin, en refusant d'appliquer l'article 1304 du Code civil alors que la déchéance prévue par les articles L. 312-8.2o et L. 312-33, alinéa 4, du Code de la consommation, qui a pour objet de protéger les emprunteurs, est une nullité relative, la cour d'appel aurait encore violé ce texte ;

Mais attendu que la déchéance de l'article L. 312-33, alinéa 4, qui ne sanctionne pas une condition de formation du contrat, n'est pas une nullité ; que c'est donc à bon droit que la cour d'appel a énoncé que la simple déchéance du droit aux intérêts ne relève pas de l'article 1304 du Code civil ; que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches ;

Mais, sur le deuxième moyen :

Vu les articles 1134 et 1183 du Code civil ;

Attendu que, pour déclarer que le commandement de payer délivré par la société CARPI n'était pas valable et pour écarter le jeu de la clause résolutoire, l'arrêt attaqué énonce que la créance de la société CARPI qui ressort du tableau d'amortissement annexé, non conforme aux prescriptions de l'article L. 312-8.2o du Code de la consommation, est insuffisamment certaine en son montant et exigible pour permettre la délivrance d'un commandement de payer valable et valide ;

Attendu qu'en statuant ainsi alors que le commandement visant la clause résolutoire, fait pour une somme supérieure au montant réel de la créance, n'en est pas moins valable pour la partie non contestable de la dette, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré non valable le commandement de payer délivré par la société CARPI, l'arrêt rendu le 2 mai 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges autrement composée.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 94-17530
Date de la décision : 02/07/1996
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Crédit immobilier - Offre de prêt - Mentions obligatoires - Présentation d'un tableau d'amortissement établi sur la base du prêt consenti - Nécessité.

1° PRET - Prêt d'argent - Crédit soumis aux dispositions de la loi du 13 juillet 1979 - Offre de prêt - Mentions obligatoires - Présentation d'un tableau d'amortissement établi sur la base du prêt consenti - Nécessité.

1° Le tableau d'amortissement d'un prêt, établi sur la base d'un prêt de 10 000 francs, bien que le montant du prêt consenti fût supérieur, ne satisfait pas aux exigences de l'article L. 312-8.2° du Code de la consommation.

2° PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Crédit immobilier - Offre de prêt - Mentions obligatoires - Défaut - Sanctions - Déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts - Pouvoir discrétionnaire.

2° POUVOIRS DES JUGES - Pouvoir discrétionnaire - Crédit immobilier - Offre de prêt - Mentions obligatoires - Défaut - Sanctions - Déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts.

2° Le prononcé d'une déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts, prévue par l'article L. 312-33, alinéa 4, du Code de la consommation, relève du pouvoir discrétionnaire des juges du fond.

3° COMMANDEMENT - Plus petitio - Nullité (non).

3° CONTRATS ET OBLIGATIONS - Résolution et résiliation - Résiliation - Clause résolutoire - Commandement de payer visant la clause résolutoire - Validité - Condition.

3° Un commandement de payer visant la clause résolutoire du contrat, fait pour une somme supérieure au montant réel de la créance, n'en est pas moins valable pour la partie non contestable de la créance.


Références :

1° :
1° :
2° :
Code de la consommation L312-33 al. 4
Code de la consommation L312-8.2
Loi 79-596 du 13 juillet 1979

Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges, 02 mai 1994

A RAPPROCHER : (1°). Chambre civile 1, 1994-07-20, Bulletin 1994, I, n° 262, p. 191 (cassation partielle)

arrêt cité. A RAPPROCHER : (3°). Chambre civile 3, 1992-02-05, Bulletin 1992, III, n° 38 (2), p. 24 (cassation partielle)

arrêt cité ; Chambre civile 3, 1993-10-27, Bulletin 1993, III, n° 131 (1), p. 85 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 02 jui. 1996, pourvoi n°94-17530, Bull. civ. 1996 I N° 283 p. 198
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1996 I N° 283 p. 198

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Lemontey .
Avocat général : Avocat général : Mme Le Foyer de Costil.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Aubert.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:94.17530
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