Attendu que M. Claude X... a assigné sa soeur, Mme Nadine Y..., pour la voir déclarer coupable du recel de différents effets de la succession de leur mère, Denise X..., décédée le 24 janvier 1986 ; qu'après son décès, le 27 avril 1992, sa veuve, Mme X..., avec qui il était marié sous le régime de la communauté universelle avec clause d'attribution au survivant des époux, a repris l'instance ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la cour d'appel a relevé exactement que les droits que Claude X... tenait de sa qualité d'héritier de sa mère prédécédée étaient entrés dans la communauté universelle et avaient donc été recueillis par sa veuve, bénéficiaire de la clause d'attribution ; qu'ainsi, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que Mme X... pouvait se prévaloir de l'article 792 du Code civil à l'encontre du cohéritier de son mari qui aurait diverti ou recelé des effets de la succession de Denise X... ; que le moyen n'est donc pas fondé ;
Et sur le troisième moyen, pris en ses deux branches : (sans intérêt) ;
Mais sur le deuxième moyen :
Vu l'article 792 du Code civil ;
Attendu que, pour déclarer que Mme Y... avait recelé des bons du Trésor d'une valeur de 2 363 385,90 francs, la cour d'appel a relevé qu'elle les avait dissimulés et que, seule titulaire d'une procuration auprès de la banque, elle n'avait fait apparaître ces bons anonymes, qui se trouvaient déposés au Crédit du Nord, qu'après le dépôt, le 7 mars 1986, d'une plainte pénale par son frère, et que, seule susceptible d'avoir accès à ces bons en bénéficiant de la protection de l'anonymat, elle n'avait été empêchée de s'en emparer à l'insu de son frère que grâce à la vigilance de ce dernier ;
Attendu cependant que la cour d'appel avait aussi constaté que, sur sommation interpellative du 25 février 1986, Mme Y... avait déclaré qu'il existait des valeurs mobilières déposées au Crédit du Nord au nom de la défunte mais qu'elle en ignorait le nombre et la qualité, que, le 6 mars, son notaire avait informé son confrère chargé du règlement de la succession de ce que sa cliente n'était pas, à cette date, à même de lui donner d'indications précises sur l'actif mobilier, et que, le 26 mars 1986, elle avait remis les bons de caisse dépendant de la succession à son notaire, lequel en avait avisé celui de M. X... le surlendemain ; que, dès lors, en statuant comme elle a fait, sans expliquer en quoi consistaient les manoeuvres frauduleuses de Mme Y..., qu'elle tenait pour établies, et alors d'ailleurs qu'il résulte des écritures de Mme X... que les bons rapportés à la succession ne seraient pas ceux déposés au Crédit du Nord, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et, enfin, sur le quatrième moyen :
Vu l'article 792 du Code civil ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que la simulation n'emporte pas présomption de recel à l'égard du successible gratifié par une libéralité déguisée, lequel ne peut être frappé des peines du recel que lorsque est apportée la preuve de son intention frauduleuse, élément constitutif de ce délit civil ;
Attendu que, pour déclarer Mme Y... coupable de recel sur les donations déguisées lui ayant permis l'acquisition de la nue-propriété de divers immeubles, ainsi que de " la période de Noël au Club-hôtel de Serre-Chevallier ", l'arrêt se borne à énoncer que l'intéressée a dissimulé frauduleusement les donations reçues de sa mère, laquelle, en achetant l'usufruit de ces biens, avait réglé, en sus, la partie du prix afférente à la nue-propriété, ou fourni à sa fille les fonds pour s'en acquitter ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans autrement caractériser l'intention frauduleuse de Mme Y..., la cour d'appel a encore violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a décidé que Mme Y... avait recelé les bons de caisse et les donations déguisées ayant permis l'acquisition de la nue-propriété de divers biens, l'arrêt rendu le 19 novembre 1993, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.