Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Vu l'article 66 du décret n° 72-670 du 13 juillet 1972 relatif à l'usage du titre de conseil juridique ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que l'interdiction s'imposant au conseil juridique de faire obstacle à l'établissement de son collaborateur salarié lors de la cessation de la collaboration en application du principe général de la liberté d'entreprendre n'est pas incompatible avec des mesures qui, tendant seulement à la protection d'un droit légitime, ne sont illimitées ni dans le temps ni dans l'espace et laissent au collaborateur une possibilité de travail dans sa propre spécialité ;
Attendu que la société Fiduciaire du Nord, aux droits de laquelle se trouve la société Homes Stratégie Droit Ernst et Young, a conclu, le 1er novembre 1987, avec M. X..., un contrat de collaborateur salarié ; que celui-ci a donné sa démission le 14 octobre 1991 ; que, reprochant à son ancien collaborateur une violation de la clause dite de " respect de la clientèle " contenue tant dans le contrat de travail que dans la convention collective nationale des conseils juridiques, la société Fiduciaire du Nord lui a réclamé réparation de son préjudice ;
Attendu que, pour rejeter cette action, la cour d'appel a retenu que l'article A-1-31 de la convention collective qui interdit au collaborateur salarié d'intervenir directement ou indirectement pendant 3 ans pour un client de son ancien employeur sans l'accord préalable et écrit de celui-ci limite nécessairement sa liberté d'établissement à l'expiration du contrat en lui rendant difficile une installation dans le même secteur géographique et porte atteinte au principe du libre choix du conseil par le client ;
Attendu qu'en se prononçant ainsi, alors que la clause précitée n'interdit pas le rétablissement des collaborateurs démissionnaires, mais tend seulement à éviter qu'il puisse se réaliser par captation de la clientèle de l'ancien employeur, sans porter atteinte à la liberté de choix du client, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 juillet 1993, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.