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30/11/1995 | FRANCE | N°95-84807

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 30 novembre 1995, 95-84807


CASSATION sur les pourvois formés par :
- X... Franck,
- Y... Philippe,
- Z... Christophe,
- A... Pascal,
- B... Emmanuel,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Nancy, en date du 6 juillet 1995, qui, dans l'information suivie, notamment, contre eux pour faux et usage de faux, provocation à la haine ou à la violence à raison de l'origine, de l'ethnie, de l'appartenance à une nation, une race ou une religion, d'apologie de crimes contre l'humanité ou de crimes et délits de collaboration avec l'ennemi, complicité de ces délits et recel de

vol, les a déclarés irrecevables à invoquer des nullités de procédure, apr...

CASSATION sur les pourvois formés par :
- X... Franck,
- Y... Philippe,
- Z... Christophe,
- A... Pascal,
- B... Emmanuel,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Nancy, en date du 6 juillet 1995, qui, dans l'information suivie, notamment, contre eux pour faux et usage de faux, provocation à la haine ou à la violence à raison de l'origine, de l'ethnie, de l'appartenance à une nation, une race ou une religion, d'apologie de crimes contre l'humanité ou de crimes et délits de collaboration avec l'ennemi, complicité de ces délits et recel de vol, les a déclarés irrecevables à invoquer des nullités de procédure, après avoir dit recevable en la forme mais mal fondée, la requête aux mêmes fins présentée par le juge d'instruction.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle de la Cour de Cassation, joignant les pourvois en raison de la connexité, et en prescrivant l'examen immédiat ;
Vu les observations et le mémoire produits ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour Franck X..., Philippe Y..., Christophe Z... et Pascal A... : (sans intérêt) ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour Franck X..., Philippe Y..., Christophe Z... et Pascal A... pris de la violation de l'article 173 du Code de procédure pénale, des articles 591 et 593 du même Code, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, dénaturation des actes de la procédure :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la saisine de la chambre d'accusation par le magistrat instructeur recevable en la forme mais mal fondée au fond ;
" aux motifs que la saisine du juge d'instruction prévue à l'article 173, alinéa 1 du Code de procédure pénale ne peut concerner que des nullités résultant d'une méconnaissance d'une disposition de procédure pénale dans un acte accompli par le juge lui-même ou par un officier de police judiciaire agissant sur commission rogatoire, ou encore par un praticien chargé d'une mission d'expertise ; que le magistrat instructeur, en saisissant la chambre d'accusation, n'a fait que transmettre à celle-ci les observations que lui a faites la défense quant à la régularité de la procédure suivie devant la chambre d'accusation dans le cadre de la procédure suivie à la requête en nullité présentée par C... ; que l'article 173, alinéa 1 du Code de procédure pénale, n'autorise pas le juge d'instruction à saisir la chambre d'accusation d'une cause d'annulation entachant les actes accomplis par une autre juridiction et que la procédure prévue à l'article 173 et suivants du Code de procédure pénale n'autorise pas la chambre d'accusation à constater les nullités qui affecteraient ses propres actes ; que la chambre d'accusation, irrégulièrement saisie, ne saurait valablement statuer d'office en application de l'article 206 du Code de procédure pénale ;
" 1o) alors que la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer que l'ordonnance du magistrat instructeur aux fins de saisine de la chambre d'accusation avait pour seul objet, dans ses motifs comme dans son dispositif, de voir statuer sur la validité des pièces cotées D 204, D 205, D 225, D 244, D 245, D 268, D 337, D 350, D 601 et D 602, c'est-à-dire sur l'éventuelle nullité des actes accomplis par le juge d'instruction lui-même ou par un officier de police judiciaire agissant sur commission rogatoire et que dès lors, la saisine de la chambre d'accusation par le magistrat instructeur entrait dans le cadre exact de l'article 173 alinéa 1 du Code de procédure pénale ;
" 2o) alors qu'il ne résulte aucunement des énonciations de ladite ordonnance que celle-ci ait eu pour objet de saisir la chambre d'accusation de nullités affectant les actes de cette juridiction quand bien même le magistrat instructeur a liminairement fait mention de ce que Pascal A..., Christophe Z... et Philippe Y... n'avaient pas été informés de l'existence de la procédure de demande d'annulation par M. C... ayant donné lieu à l'arrêt de la chambre d'accusation en date du 17 janvier 1995 et par conséquent de la méconnaissance indiscutable par cette juridiction des règles impératives de l'article 197 du Code de procédure pénale ;
" 3o) alors que l'arrêt attaqué ne pouvait sans se contredire constater que la saisine de la chambre d'accusation par le magistrat instructeur était recevable en la forme ce qui impliquait nécessairement que le magistrat en cause ait saisi par ordonnance la chambre d'accusation aux fins d'annulation de pièces et déclarer sa saisine mal fondée en se référant à la circonstance inexacte qu'il se soit borné à transmettre les demandes irrecevables comme présentées hors délai des mis en examen ;
" 4o) alors que si l'article 173 alinéa 1 du Code de procédure pénale dans sa rédaction issue de la loi du 4 janvier 1993 confère au juge d'instruction un pouvoir autonome de saisine de la chambre d'accusation aux fins d'annulation de pièces de la procédure, il ne lui interdit aucunement de prendre en considération dans le cadre de sa demande des suggestions des parties comme il le faisait régulièrement sous l'empire de l'ancien article 171 du Code de procédure pénale ;
" 5o) alors que la chambre d'accusation ne pouvait sans se contredire constater que la saisine par le magistrat instructeur était recevable en la forme et énoncer par ailleurs qu'irrégulièrement saisie, elle ne saurait valablement statuer d'office en application de l'article 206 du Code de procédure pénale " ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé pour Franck X..., Philippe Y..., Christophe Z... et Pascal A... pris de la violation des articles 173, alinéa 1, 206, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que la chambre d'accusation a refusé de statuer d'office en application de l'article 206 du Code de procédure pénale ;
" aux motifs qu'il convient de déclarer la saisine de la chambre d'accusation par le magistrat instructeur recevable en la forme, mais mal fondée au fond ; qu'il en résulte que la chambre d'accusation, irrégulièrement saisie, ne saurait valablement statuer d'office en application de l'article 206 du Code de procédure pénale ;
" alors que la chambre d'accusation ayant constaté la régularité de sa saisine aux fins d'annulation par le magistrat instructeur en application de l'article 173, alinéa 1 du Code de procédure pénale, tandis qu'il résultait en outre des énonciations de l'ordonnance de ce magistrat que sa demande tendait à voir statuer sur la régularité d'actes de l'information, la chambre d'accusation avait l'obligation de statuer non seulement sur les nullités visées dans cette ordonnance mais de relever d'office toutes les nullités de procédure et de rechercher les actes susceptibles d'être annulés comme dérivant de ceux entachés de nullité et qu'en refusant de procéder à un examen complet de la procédure, elle a méconnu ce principe en sorte que la cassation est encourue " ;
Et sur les mêmes moyens, relevés d'office, en ce qui concerne Emmanuel B... :
Les moyens étant réunis ;
Vu lesdits articles, ensemble l'article 174 du Code de procédure pénale ;
Attendu que la chambre d'accusation, saisie par le juge d'instruction dans les conditions de l'article 173 du Code de procédure pénale, doit statuer sur la régularité des actes de la procédure qui lui sont soumis ; que les parties qui n'ont pas été avisées de la date de l'audience de la chambre d'accusation où est examinée la régularité d'une procédure d'information, restent recevables par la suite à soulever d'éventuelles nullités ;
Attendu qu'il résulte des pièces de la procédure que, dans le délai prévu par l'article 175 du Code précité, une requête en annulation d'actes de la procédure a été présentée par Renaud C..., personne mise en examen ; que la chambre d'accusation a prononcé la nullité d'actes d'information le concernant, par arrêt du 17 janvier 1995 ;
Attendu que, les avocats des autres personnes poursuivies ayant exposé qu'ils n'avaient pas été avisés de l'audience où la régularité de l'information avait été débattue, le juge d'instruction a saisi la chambre d'accusation de la validité de plusieurs actes de la procédure ; que les demandeurs ont également sollicité son annulation ;
Attendu que l'arrêt attaqué, pour déclarer irrecevables les nullités soulevées par les personnes mises en examen, leur oppose le délai de forclusion prévu par l'article 175 du Code susvisé ;
Que, par ailleurs, la chambre d'accusation, après avoir relevé que le juge d'instruction se serait limité à transmettre les observations de la défense sur la régularité de l'examen d'une précédente requête en annulation, et après avoir estimé qu'elle ne peut être saisie d'irrégularités affectant des actes qu'elle a accomplis, ni statuer d'office en application de l'article 206 de ce Code, déclare n'y avoir lieu à statuer sur la validité des actes déférés devant elle par le magistrat instructeur ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors, d'une part, que les autres personnes poursuivies n'avaient pas été avisées de l'audience où avait été examinée la requête en annulation présentée par Renaud C..., et alors, d'autre part, que le juge d'instruction avait transmis à la chambre d'accusation des actes d'information dont il lui incombait d'apprécier la régularité, l'arrêt attaqué a méconnu les textes et principes rappelés ci-dessus ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Nancy, en date du 6 juillet 1995, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Dijon.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 95-84807
Date de la décision : 30/11/1995
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° INSTRUCTION - Nullités - Chambre d'accusation - Saisine - Saisine par le juge d'instruction - Obligation pour la chambre d'accusation d'examiner la régularité de la procédure.

1° CHAMBRE D'ACCUSATION - Nullités de l'instruction - Requête du juge d'instruction aux fins d'annulation d'un acte de la procédure - Obligation pour la chambre d'accusation d'examiner la régularité de la procédure.

1° La chambre d'accusation, saisie par le juge d'instruction, dans les conditions de l'article 173 du Code de procédure pénale, doit statuer sur la régularité des actes de la procédure qui lui sont soumis.

2° INSTRUCTION - Nullités - Chambre d'accusation - Saisine - Saisine par le juge d'instruction - le procureur de la République ou l'une des parties - Requête de l'une des parties - Recevabilité - Requête d'une partie non avisée de la date de l'audience de la chambre d'accusation où est examinée la régularité d'une procédure - Requête déposée après le délai de forclusion prévu par l'article 175 du Code de procédure pénale.

2° CHAMBRE D'ACCUSATION - Nullités de l'instruction - Requête du juge d'instruction - du procureur de la République ou l'une des parties - Requête de l'une des parties - Recevabilité - Requête d'une partie non avisée de la date de l'audience de la chambre d'accusation où est examinée la régularité d'une procédure - Requête déposée après le délai de forclusion prévu par l'article 175 du Code de procédure pénale 2° CHAMBRE D'ACCUSATION - Procédure - Audience - Date - Notification - Examen d'une requête en annulation présentée par une partie - Notification aux autres parties - Nécessité.

2° Les parties qui n'ont pas été avisées de la date de l'audience de la chambre d'accusation où est examinée la régularité d'une procédure d'information, restent recevables par la suite à soulever d'éventuelles nullités. Le délai de forclusion prévu par l'article 175 du Code de procédure pénale ne peut, en ce cas, leur être opposé(1).


Références :

1° :
2° :
Code de procédure pénale 173
Code de procédure pénale 175

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy (chambre d'accusation), 06 juillet 1995

CONFER : (2°). (1) Cf. criminel 1982-10-19, Bulletin criminel 1982, n° 224, p. 611 (cassation), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1994-07-19, Bulletin criminel 1994, n° 282, p. 696 (rejet) ;

criminel 1995-01-09, Bulletin criminel 1995, n° 6 (1), p. 15 (cassation) ;

Chambre criminelle, 1995-02-22, Bulletin criminel 1995, n° 79, p. 189 (rejet)

arrêt cité ;

Chambre criminelle, 1995-06-19, Bulletin criminel 1995, n° 223 (2), p. 612 (cassation), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1995-07-11, Bulletin criminel 1995, n° 255, p. 713 (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 30 nov. 1995, pourvoi n°95-84807, Bull. crim. criminel 1995 N° 365 p. 1070
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1995 N° 365 p. 1070

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Culié, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Le Foyer de Costil.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. de Larosière de Champfeu.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Piwnica et Molinié.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:95.84807
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