CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Gustavo,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Fort-de-France, chambre détachée à Cayenne, en date du 6 décembre 1993, qui a déclaré irrecevable sa demande de dispense d'exécution de la contrainte par corps.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 388 du Code des douanes, des articles 710, 711, 749, 752, 754, 756, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable la requête en mainlevée de la contrainte par corps déposée par le demandeur ;
" aux motifs que les articles 754 et 756 du Code de procédure pénale qui régissent les contraintes par corps de droit commun sont inapplicables lorsque le maintien en détention a été ordonné par une juridiction sur le fondement de larticle 388 du Code des douanes ; en outre, les juges qui ont ainsi décidé de l'exercice anticipé de la contrainte par corps ont nécessairement examiné le problème de la solvabilité du débiteur avant d'ordonner son maintien en détention ;
" alors que, d'une part, en affirmant que le droit commun de la mainlevée du contrôle judiciaire n'était pas applicable lorsque le maintien en détention avait été ordonné sur le fondement de l'article 388 du Code des douanes, la cour d'appel a violé les articles susvisés ;
" alors que, d'autre part, la contrainte par corps ne peut être exécutée contre les condamnés qui justifient de leur insolvabilité en produisant soit un certificat de non-imposition, soit un certificat du maire ou du commissaire de police de leur commune ; qu'en l'espèce, en se bornant à constater, par des motifs hypothétiques, qu'en décidant de l'exercice anticipé de cette mesure, les juges qui l'avaient ordonnée avaient nécessairement examiné le problème de la solvabilité du demandeur, sans s'expliquer sur le point de savoir si les pièces légalement requises avaient été déjà produites et examinées par eux, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des textes visés au moyen " ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation du principe de l'autorité de la chose jugée, des articles 6, 710, 711, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable la requête déposée par le condamné tendant à la mainlevée de la contrainte par corps ;
" aux motifs que la décision qui a fait application de l'article 388 du Code des douanes a acquis l'autorité de la chose jugée ;
" alors que l'autorité de la chose jugée n'intéressant par définition que les dispositions juridictionnelles d'une décision, ne sont pas irrévocables les décisions définitives qui touchent à l'exécution d'une peine ;
" qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé le principe de l'autorité de la chose jugée et les articles susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que l'article 388 du Code des douanes, qui institue une modalité particulière d'exercice de la contrainte par corps, n'exclut pas l'application des articles 710, 752 et 756 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, par arrêt définitif du 5 octobre 1992, la cour d'appel a condamné Gustavo X... à 7 années d'emprisonnement pour trafic de stupéfiants et, statuant du chef de contrebande sur l'action douanière, a prononcé la contrainte par corps et ordonné son exercice anticipé par application de l'article 388 du Code des douanes ; que le 6 septembre 1993, X..., arguant de son insolvabilité, a saisi la cour d'appel sur le fondement de l'article 710 du Code de procédure pénale d'une requête en dispense d'exécution de la contrainte par corps ;
Attendu que, pour déclarer la requête irrecevable, la Cour d'appel énonce que les articles 754 et 756 du Code de procédure pénale, qui régissent les contraintes par corps de droit commun, sont inapplicables lorsque le maintien en détention a été ordonné par une juridiction sur le fondement de l'article 388 du Code des douanes ; qu'elle ajoute que la décision qui a fait application de cet article a acquis l'autorité de la chose jugée, les juges qui ont décidé de l'exercice anticipé de la contrainte par corps ayant nécessairement examiné le problème de la solvabilité du débiteur avant d'ordonner son maintien en détention ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'il lui appartenait de vérifier si le demandeur ne faisait pas état d'un élément, non soumis à la juridiction de jugement, de nature à faire obstacle à l'exécution de la contrainte, la cour d'appel a méconnu les textes et principes susvisés ;
Que la cassation est dès lors encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Fort-de-France, en date du 6 décembre 1993 et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Basse-Terre.