Attendu, selon les énonciations du jugement attaqué (Limoges, 22 octobre 1993), qu'en juillet 1992 MM. Axel et Marc X... ont présenté au juge des tutelles une requête tendant au placement de leur père, M. Marc Louis X..., sous le régime de la curatelle, pour prodigalité ; que, déclarant se saisir d'office, le juge des tutelles a désigné un médecin spécialiste chargé d'examiner M. Marc Louis X... ; que, statuant au vu du rapport de ce praticien, il a, par jugement du 20 avril 1993, décidé qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner une mesure de protection, pour quelque cause que ce soit ; que, le 8 juin suivant, MM. Axel et Marc X... ont formé un recours devant le tribunal de grande instance, qui a infirmé cette décision et placé M. X... sous le régime de la curatelle, en application des articles 488, alinéa 3, et 508-1 du Code civil ;
Sur les deux premiers moyens réunis :
Attendu que M. Marc Louis X... reproche au jugement attaqué d'avoir déclaré recevable le recours formé par ses fils, alors, selon le premier moyen, qu'il résulte de l'article 1257 du nouveau Code de procédure civile que, pour les personnes auxquelles le jugement qui refuse d'ouvrir la tutelle ou la curatelle n'est pas notifié, le recours prévu à l'article 1255 du nouveau Code de procédure civile doit être exercé dans les 15 jours du jugement ; qu'ainsi le tribunal de grande instance, qui a constaté que les consorts X... n'avaient formé leur recours que plus de 15 jours après la décision refusant d'ouvrir la curatelle, a, en déclarant ce recours recevable, violé l'article 1257 du nouveau Code de procédure civile ; alors, selon le deuxième moyen, d'une part, qu'ayant constaté que le juge des tutelles s'était saisi d'office ce dont il résultait que les consorts X... ne pouvaient être considérés comme des " requérants " au sens de la loi et, comme tels, habilités à exercer un recours contre la décision refusant d'ordonner la mise en curatelle sollicitée le Tribunal a, en accueillant néanmoins leur recours, violé les articles 1244, alinéa 2, et 1255 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, d'autre part, que doit être joint à toute " requête aux fins d'ouverture de la tutelle " ou de la curatelle " un certificat délivré par un médecin spécialiste " choisi sur une liste établie par le procureur de la République ; que cette formalité est substantielle ; qu'ainsi le défaut de production par les consorts X... de ce certificat rendait nécessairement leur requête irrecevable et justifiait légalement la seule saisine d'office du juge des tutelles ; qu'ainsi le Tribunal a violé les articles 1244, alinéa 1er, et 1255 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que, contrairement aux allégations de la deuxième branche du deuxième moyen, le tribunal de grande instance a constaté que, bien que le juge des tutelles eût indiqué qu'il se saisissait d'office, il résultait cependant du dossier que ce magistrat avait été saisi par une requête aux termes de laquelle MM. Axel et Marc X... demandaient le placement de leur père sous le régime de la curatelle, en faisant état de sa prodigalité manifestée depuis 1987 ; que le grief n'est donc pas fondé ;
Attendu, ensuite, que l'article 1244 du nouveau Code de procédure civile renvoie à l'article 493-1 du Code civil et qu'il résulte de ce dernier texte que la production du certificat médical n'est exigée que lorsque la requête invoque une altération des facultés mentales ou corporelles de la personne à protéger ; que la requête de MM. X... étant fondée sur la prodigalité, le deuxième moyen est, de ce chef, inopérant ;
Attendu, enfin, qu'il résulte de l'article 1214 du nouveau Code de procédure civile, auquel renvoie l'article 1243 du même Code, que le juge des tutelles doit faire notifier sa décision au requérant ; que le tribunal de grande instance, qui a constaté que le jugement du 20 avril 1992 n'avait pas été notifié à MM. Axel et Marc X... et que ceux-ci n'en avaient eu connaissance que le 1er juin 1992, en a exactement déduit qu'aucun délai n'ayant couru leur recours était recevable ; que le premier moyen est dès lors sans fondement ;
Et sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il est encore fait grief au jugement d'avoir placé M. Marc Louis X... sous le régime de la curatelle, alors, d'une part, que le Tribunal, qui s'est borné à reprocher à M. X... d'avoir aliéné, au cours des 5 années précédentes, une partie de son patrimoine immobilier, mais qui n'a pas constaté que le capital en provenance de ces opérations avait été dilapidé, ni reconnu que l'intéressé avait besoin d'être " conseillé ou contrôlé dans la vie civile " (sic), n'aurait pas légalement justifié sa décision ; et alors, d'autre part, qu'en ne répondant pas aux conclusions par lesquelles M. Marc Louis X... faisait valoir, en substance, que les produits de sa propriété de Neuvillard ne permettaient pas d'assumer l'ensemble des charges pesant sur ce domaine, que les ventes de bétail n'avaient pas été effectuées sur ses instructions et que la vente de certains bâtiments, nécessitant des frais d'entretien et de réparation, constituait un acte de bonne gestion, les juges du second degré auraient méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que le jugement constate, d'abord, que M. Marc Louis X... a perçu, à la suite de la vente de sa maison sise en Californie, ainsi que de la cession des actions qu'il détenait dans le capital d'une société dont il avait été le dirigeant, une somme de l'ordre de 1 800 000 dollars US ; qu'il constate ensuite que la vente de biens meubles et immeubles situés en France a rapporté 950 000 francs à M. X... et que celui-ci se préparait, lorsque la procédure a commencé, à céder pour une somme de 10 000 000 francs le reste de son patrimoine immobilier ; qu'il relève enfin que si M. X... a dû acquitter, avec son épouse, dont il est séparé, une dette fiscale s'élevant au total à 868 236 dollars US, il est en revanche dans l'impossibilité de justifier de l'emploi de ses autres fonds et se borne à faire état de son désir de procéder dans l'avenir à des réinvestissements avantageux ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations le Tribunal a souverainement estimé que la preuve de la prodigalité de M. X... était rapportée et que si l'intéressé continuait à dilapider son capital, ainsi qu'il le faisait depuis 5 ans, ses ressources se réduiraient aux seules retraites auxquelles il peut prétendre, selon les indications fournies par ses enfants eux-mêmes ; qu'il s'ensuit que les juges du second degré, qui ont répondu aux conclusions invoquées par la seconde branche, ont constaté la réunion des conditions exigées par l'article 488, alinéa 3, du Code civil et que leur décision est légalement justifiée ; qu'ainsi en aucune de ses branches le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.