Sur le moyen unique :
Attendu qu'à la suite de la mise en cause des accords collectifs régissant leur situation, les salariés de la Société nouvelle d'armement transmanche (SNAT) se sont mis en grève au mois d'avril 1991 ; que la société a alors décidé, le 14 juin 1991, de désarmer les navires, tout en payant les salariés par imputation sur leurs congés payés ; que le comité d'entreprise de la SNAT, l'Union syndicale des marins pêcheurs réunis CGT et le syndicat maritime Nord CFDT ont saisi le tribunal de grande instance pour faire juger que cette décision était illicite et pour qu'il soit fait défense à l'employeur d'imputer le montant des salaires dûs pour la période d'arrêt de travail imposé aux salariés sur le montant de leur indemnité de congés payés ;
Attendu que la SNAT fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 14 septembre 1993) de lui avoir fait défense d'imputer l'arrêt de travail imposé par sa décision du 14 juin 1991 sur les congés payés du personnel, alors que, selon le moyen, la mesure de mise en chômage technique du personnel est justifiée lorsque les salariés grévistes procèdent à des arrêts de travail répétés, inopinés et de courte durée en vue de désorganiser l'entreprise ; qu'il n'est pas contesté en l'espèce que les arrêts de travail répétitifs du personnel navigant empêchant le départ des navires se produisaient de manière inopinée ou avec un préavis très bref ; qu'en s'abstenant dès lors de rechercher si ces arrêts de travail répétés ne procédaient pas d'une volonté de désorganiser l'entreprise et si la SNAT ne pouvait pas légitimement craindre leur renouvellement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision, au regard de l'article L. 521-1 du Code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a relevé que les salariés avaient cessé leur travail en vue d'appuyer des revendications professionnelles, et que leur mouvement de grève, s'il avait rendu l'exploitation des lignes, très onéreuse et plus difficile, n'avait pas abouti à une désorganisation de l'entreprise ; qu'elle a pu, dès lors, écarter tout abus du droit de grève et qu'ayant constaté que la SNAT ne s'était pas trouvée dans une situation contraignante, elle a exactement décidé que cette entreprise n'était pas dégagée de son obligation de fournir un travail à ses salariés, que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.