CASSATION sur les pourvois formés par :
- X... Jean-Marc,
- Y... Claude,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Agen du 1er février 1995, qui, dans la procédure suivie contre eux des chefs de fraudes rendant la marchandise impropre à la consommation et falsification de denrées alimentaires, a dit n'y avoir lieu à annulation de pièces.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, du 26 avril 1995, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit commun aux demandeurs ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 215-17 du Code de la consommation, 173, 174, 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt a déclaré valides les conclusions déposées par Mme Z... et M. A..., experts et, en conséquence, a refusé de statuer sur la validité des actes postérieurs ;
" aux motifs qu'en matière de contrôle bactériologique ou de pureté biologique, les deux experts doivent procéder en commun, dans le laboratoire auquel l'échantillon a été remis, à l'examen de cet échantillon par application de l'article L. 215-17 du Code de la consommation ; qu'en l'espèce les experts n'ont pas procédé en commun à l'examen de ces échantillons et l'expert M. A... a analysé des échantillons dont les scellés avaient été enlevés par l'expert Mme Z... pour les besoins de ses propres travaux ; que cependant Y... et X... ne soutiennent pas, sans le prétendre d'ailleurs, que la violation des formes prescrites par la loi ait eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la partie concernée, dès lors qu'ils soutiennent dans leur mémoire que la nullité de cette contre-expertise découle du défaut d'authenticité des échantillons portant atteinte aux intérêts des parties concernées, à savoir Y..., X... et B..., personnes aujourd'hui mises en examen, alors que Stewart B..., concerné par cette contre-expertise, n'a pas déposé de mémoire pour prétendre à la nullité de cette mesure d'instruction et alors que la Cour ne peut retenir la nullité du déroulement des actes d'instruction et plus précisément des prélèvements d'échantillons et, en conséquence, des conclusions qui ont été données ainsi que la contre-expertise demandée par le juge d'instruction à Mme Z... et à M. A... dès lors que, pour les motifs ci-dessus exposés, cette demande en nullité est irrecevable devant la chambre d'accusation ;
" alors, d'une part, qu'en matière de contrôle bactériologique ou de pureté biologique, les deux experts commis doivent procéder en commun, dans le laboratoire auquel l'échantillon a été remis, à son examen ; que le défaut de respect de ces prescriptions entraîne, sans qu'il soit nécessaire de démontrer un préjudice, la nullité des actes accomplis en violation de ces règles ; qu'en l'espèce la Cour qui a constaté le défaut de respect des prescriptions précitées et refusé d'annuler les conclusions déposées en violation desdites prescriptions n'a pas légalement justifié sa décision ;
" alors, d'autre part, que le défaut de saisine, par une partie, de la chambre d'accusation dans les conditions fixées par l'article 173, alinéa 3, du Code de procédure pénale pour qu'il soit statué sur une nullité de l'information n'est pas exclusif de son droit à présenter, devant cette juridiction, des observations tendant à cette même fin lorsque cette dernière a été saisie à l'initiative du magistrat instructeur d'une requête aux fins d'annulation d'un acte de la procédure ; qu'en déclarant néanmoins irrecevables les conclusions du prévenu tendant à voir déclarer nul un acte de la procédure, la Cour n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'aux termes de l'article 174, alinéa 1er, du Code de procédure pénale, lorsque la chambre d'accusation est saisie sur le fondement de l'article 173, tous moyens pris de la nullité de la procédure qui lui est transmise doivent, sans préjudice du droit qui lui appartient de les relever d'office, lui être proposés ; qu'à défaut, les parties ne sont plus recevables à en faire état, sauf le cas où elles n'auraient pu les connaître ;
Attendu que, saisie par le juge d'instruction aux fins de l'annulation d'une expertise ordonnée par ce magistrat, la chambre d'accusation a déclaré irrecevable le mémoire en invalidation des procès-verbaux initiaux et des actes postérieurs, régulièrement déposé par Y... et X..., conformément à l'article 198 du même Code ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que les dispositions de l'article 174 susvisé concernent toutes les parties auxquelles est notifiée la date de l'audience à laquelle est examinée une demande de nullité relevant de l'article 173, la chambre d'accusation a méconnu le sens et la portée des textes précités ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt, en date du 1er février 1995, de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Agen et, pour être à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les conditions prévues par l'article 609-1, alinéa 2, du Code de procédure pénale ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Toulouse.