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07/06/1995 | FRANCE | N°93-16597

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 07 juin 1995, 93-16597


Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que M. X..., père de deux enfants, Pierre et Luc (les consorts X...), a épousé le 6 octobre 1973 en secondes noces, sous le régime de la séparation de biens, Mme Y... veuve Quinquis, mère de deux autres enfants ; que, le 27 mars 1985, il a vendu à la Société immobilière France investissement (SIFI) un ensemble immobilier sis à La Baule et qui lui appartenait en propre, moyennant le prix de 1 000 000 francs et le versement à son profit d'une rente viagère annuelle indexée de

100 000 francs, réversible sur la tête de Mme Y... ; que l'acte sti...

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que M. X..., père de deux enfants, Pierre et Luc (les consorts X...), a épousé le 6 octobre 1973 en secondes noces, sous le régime de la séparation de biens, Mme Y... veuve Quinquis, mère de deux autres enfants ; que, le 27 mars 1985, il a vendu à la Société immobilière France investissement (SIFI) un ensemble immobilier sis à La Baule et qui lui appartenait en propre, moyennant le prix de 1 000 000 francs et le versement à son profit d'une rente viagère annuelle indexée de 100 000 francs, réversible sur la tête de Mme Y... ; que l'acte stipulait que le vendeur déclarait vouloir donner à la clause de réversion au profit de son épouse le caractère d'une libéralité ; qu'en outre, cet acte comportait en faveur de Mme Y... une réserve d'usufruit relative à un appartement dépendant de cet ensemble ; que, le 24 avril 1985, les époux X... ont acheté indivisément à la société SIFI une villa également située à La Baule, pour le prix de 480 000 francs payé hors la vue du notaire ; que M. X... est décédé le 26 février 1990 ; que, le 14 août suivant, les consorts X..., enfants du premier lit, ont assigné Mme Y... en liquidation-partage de la succession de leur père, en faisant valoir que les différentes opérations immobilières constituaient autant de donations déguisées au profit de leur belle-mère, à laquelle devaient s'appliquer les peines du recel successoral ; que l'arrêt confirmatif attaqué (Rennes, 2 mars 1993) a estimé que la vente du 27 mars 1985 et l'achat du 24 avril 1985 devaient s'analyser comme des donations indirectes en faveur de Mme Y..., rapportables à la succession et éventuellement réductibles à la quotité disponible spéciale entre époux ;

Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt d'avoir refusé de prononcer la nullité des actes des 27 mars et 24 avril 1985 comme constituant des donations déguisées, alors, selon le moyen, d'une part, que toute donation entre époux, déguisée ou faite à personne interposée, est nulle ; qu'invité par MM. Pierre et Luc X..., héritiers réservataires, à rechercher si leur père n'avait pas disposé au profit de sa seconde épouse, Mme Y..., de son important actif immobilier au travers des deux actes des 27 mars et 24 avril 1985, en raison de leur étroite liaison dans le temps, le million de francs versé au comptant le 27 mars ayant servi en partie à régler l'acquisition du 24 avril, et en raison également de la présence de la société SIFI, acquéreur de l'ensemble immobilier et vendeur de la villa de La Baule, ce qui révélait un dessein de fraude à la réserve des enfants du premier lit avec l'intention de créer une apparence trompeuse et mensongère quant à l'origine des deniers, l'arrêt attaqué, qui a isolé artificiellement les deux actes, sans pour autant exclure pour chacun d'eux des avantages indirects dépassant la quotité disponible spéciale entre époux et qui a refusé de prononcer leur nullité, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1094-1 et 1099, alinéa 2, du Code civil ; et alors, d'autre part, que, dès lors que le dépassement de cette quotité disponible spéciale provenait de donations déguisées, le refus d'appliquer les peines du recel successoral se trouvait privé de fondement juridique au regard de l'article 792 du même Code ;

Mais attendu, d'abord, que s'agissant de la vente du 27 mars 1985, l'arrêt attaqué a considéré à bon droit que la clause de réversibilité de la vente viagère au profit de Mme Y... constituait à l'égard de cette dernière une donation valable en vertu des dispositions des articles 1973, alinéa 3, et 1099, alinéa 1er, du Code civil, et soumise à celles de l'article 1098 du même Code ; qu'en ce qui concerne l'acquisition indivise du 24 avril 1985, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que la cour d'appel a estimé qu'en dépit de son imprécision la mention selon laquelle le prix avait été payé au moyen de fonds personnels du mari ne suffisait pas à caractériser chez les époux une volonté de simulation, révélatrice du désir de créer une apparence trompeuse, ni une intention de dissimulation mensongère de l'origine des fonds, et qu'on ne se trouvait pas dès lors en présence d'une donation déguisée

Attendu, ensuite, qu'ayant ainsi écarté toute intention de fraude dans les deux opérations immobilières susvisées, la cour d'appel en a exactement déduit que le recel successoral n'était pas constitué ;

Qu'il s'ensuit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses deux branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 93-16597
Date de la décision : 07/06/1995
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SUCCESSION - Recel - Eléments constitutifs - Intention frauduleuse - Absence - Effet .

SUCCESSION - Recel - Eléments constitutifs - Intention frauduleuse - Nécessité

Ayant écarté toute intention de fraude, une cour d'appel en déduit exactement que le recel successoral n'est pas constitué.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 02 mars 1993


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 07 jui. 1995, pourvoi n°93-16597, Bull. civ. 1995 I N° 247 p. 174
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1995 I N° 247 p. 174

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Grégoire, conseiller doyen faisant fonction. .
Avocat général : Avocat général : M. Gaunet.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Thierry.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Le Bret et Laugier, la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:93.16597
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