Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le plan de cession à la société Eagles Imhotep (société Eagles) de l'entreprise exploitée par la société L'Iliade, en redressement judiciaire, a été arrêté par jugement du 18 décembre 1991 ; que ce plan comportait le paiement de la somme de 500 000 francs le jour même et de celle de 2 000 000 francs à la date de la signature de l'acte constatant la régularisation de la cession ; que le paiement de la somme de 500 000 francs a été reporté, par la suite, au 6 février 1992 ; que la société Eagles n'ayant rien versé à cette date ni depuis, le Tribunal, à la demande du commissaire à l'exécution du plan, a nommé administrateur ad hoc M. X..., déjà administrateur judiciaire de la société L'Iliade, avec la mission, notamment, de déterminer la solvabilité de la société Eagles, de déclarer, à défaut de solvabilité, son état de cessation des paiements en vue de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, de procéder provisoirement à la fermeture de l'établissement et de proposer la mise en chômage technique du personnel ; que la cour d'appel a confirmé cette décision ;
Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par la défense :
Attendu que M. X... et le commissaire à l'exécution du plan soutiennent qu'est irrecevable le pourvoi contre l'arrêt qui se borne, avant dire droit, à désigner un administrateur ad hoc ;
Mais attendu que l'arrêt, en ce qu'il ne se borne pas à ordonner une mesure d'instruction ou une mesure provisoire et confie à l'administrateur ad hoc qu'il désigne la mission de déclarer l'état de cessation des paiements de la société cessionnaire, tranche une partie du principal ; que le pourvoi est donc recevable ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que la société Eagles fait grief à l'arrêt d'avoir nommé M. X... comme administrateur ad hoc, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le mandataire de justice désigné par le jugement d'ouverture de la procédure collective comme administrateur ne peut être désigné administrateur ad hoc, en cas de défaut de paiement du prix de cession ; qu'en nommant comme administrateur ad hoc M. X..., administrateur désigné par le jugement ayant prononcé le redressement judiciaire de la société L'Iliade, la cour d'appel a violé l'article 90 de la loi du 25 janvier 1985 ; et alors, d'autre part, que, pour statuer sur la demande de récusation formée par la société Eagles, la cour d'appel devait nécessairement rechercher si, compte tenu de l'opposition d'intérêt existant entre les deux sociétés, la qualité d'administrateur de la société L'Iliade de M. X... était compatible avec l'objectivité nécessairement requise de l'administrateur ad hoc de la société cessionnaire ; qu'en se bornant à énoncer, sans procéder à cette recherche à laquelle elle était invitée par la société Eagles, que cette société ne produisait aucun élément de nature à douter de l'objectivité de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 90 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Mais attendu qu'aucune disposition n'interdit la désignation de l'administrateur du redressement judiciaire comme administrateur ad hoc en application de l'article 90 précité ; que la cour d'appel n'a fait qu'user de son pouvoir souverain d'appréciation en retenant qu'il n'existait pas de doute sur l'objectivité dont M. X... devait faire preuve dans l'accomplissement de sa mission ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux premières branches ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 90 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu que l'arrêt a confié à l'administrateur ad hoc qu'il désignait la mission de déclarer, au cas d'insolvabilité de la société Eagles, son état de cessation des paiements, de procéder provisoirement à la fermeture de l'établissement et de proposer la mise en chômage technique du personnel ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la mission de l'administrateur ad hoc doit être limitée à l'entreprise cédée et ne peut tendre ni à la déclaration de cessation des paiements du cessionnaire ni à des mesures provisoires concernant l'entreprise de celui-ci, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a donné pour mission à l'administrateur ad hoc de déclarer l'état de cessation des paiements de la société Eagles, de proposer provisoirement la fermeture de l'établissement et de proposer la mise en chômage technique du personnel, l'arrêt rendu le 7 mai 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes.