Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 122-44 du Code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le salarié, responsable de l'équipe de préparation des véhicules à la société Sogaral, a, par lettre du 27 mars 1987 qui lui reprochait un certain nombre de faits, été rétrogradé au poste de simple préparation de véhicules avec perte de la prime de responsabilité ; que, saisi d'un recours du salarié, le conseil de prud'hommes, par jugement du 7 décembre 1987, a annulé la sanction pour irrégularité de forme en raison de l'absence d'entretien préalable ; que le 27 janvier 1988, l'employeur a convoqué le salarié à un entretien préalable fixé le 29 suivant, et, le 4 février 1988, lui a notifié sa rétrogradation au poste de préparateur avec perte de la prime de responsabilité à compter du 4 février 1988 ;
Attendu que, pour déclarer régulière la sanction disciplinaire prononcée le 4 février 1988 et débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts représentant la perte de la prime mensuelle supprimée du fait de sa rétrogradation, la cour d'appel a énoncé qu'il ressort de l'interprétation littérale des dispositions de l'article L. 122-44 du Code du travail que la courte prescription opposable à l'employeur s'oppose à l'" engagement de poursuites disciplinaires " et qu'au contraire, c'est la manifestation formelle et écrite par l'employeur de relever le fait fautif et d'en tirer des conséquences contractuelles qui constitue l'engagement de poursuites disciplinaires et interrompt la prescription ; que, si la décision du 27 mars 1987 a été annulée pour vice de forme, cette annulation ne peut porter que sur les conséquences de la décision de l'employeur concernant l'exécution du contrat de travail du salarié, mais ne saurait faire disparaître la manifestation de volonté de la société Sogaral exprimée le 27 mars 1987 de relever des faits fautifs et d'engager des poursuites ; qu'il s'en déduit que l'employeur ne saurait se voir opposer une nouvelle prescription alors que la décision du 7 décembre 1987 n'avait pour effet que de remettre les parties dans l'état où elles se trouvaient antérieurement et que la société avait engagé le 27 mars 1987 les poursuites disciplinaires dans le délai prévu par la loi ;
Attendu, cependant, qu'aucun acte d'engagement des poursuites n'ayant précédé la sanction du 27 mars 1987, laquelle a été annulée, faute d'entretien préalable, et qui ne peut produire aucun effet, le délai prévu par l'article L. 122-44 du Code du travail n'a pas été interrompu ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré régulière la sanction disciplinaire du 4 février 1988, et a débouté le salarié de ses demandes d'indemnisation, l'arrêt rendu le 1er février 1990, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble.