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29/11/1994 | FRANCE | N°93-15711

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 29 novembre 1994, 93-15711


Attendu que, par deux ordonnances du 10 octobre 1991, le président du tribunal de grande instance de Metz a autorisé des agents de la Direction générale des Impôts, en vertu de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales, à effectuer une visite et une saisie de documents au 14 place d'Armes à Phalsbourg, domicile des époux X..., et locaux professionnels de l'EURL Erckmann-Chatrian, en vue de rechercher la preuve de la fraude fiscale de M. X... et de l'EURL Erckmann-Chatrian ;

Attendu que, le 12 février 1993, M. et Mme X... et l'EURL Erckmann-Chatrian ont demandé l'annu

lation des opérations de visite et saisie effectuées le 14 octob...

Attendu que, par deux ordonnances du 10 octobre 1991, le président du tribunal de grande instance de Metz a autorisé des agents de la Direction générale des Impôts, en vertu de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales, à effectuer une visite et une saisie de documents au 14 place d'Armes à Phalsbourg, domicile des époux X..., et locaux professionnels de l'EURL Erckmann-Chatrian, en vue de rechercher la preuve de la fraude fiscale de M. X... et de l'EURL Erckmann-Chatrian ;

Attendu que, le 12 février 1993, M. et Mme X... et l'EURL Erckmann-Chatrian ont demandé l'annulation des opérations de visite et saisie effectuées le 14 octobre 1991 ; que, par ordonnance contradictoire du 20 avril 1993, le président du tribunal de grande instance de Metz a rejeté leur recours ; que M. et Mme X... et l'EURL Erckmann-Chatrian se sont pourvus en cassation contre cette ordonnance n° 114/93 rendue le 20 avril 1993 sur leur assignation ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. et Mme X... et l'EURL Erckmann-Chatrian font grief à l'ordonnance d'avoir déclaré irrecevable comme tardif leur recours, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'aucune disposition légale n'enferme, dans d'autres délais que ceux du droit commun, l'exercice du droit, par celui dont le domicile a fait l'objet d'une visite, de soumettre au magistrat, qui a autorisé la visite, la constatation des irrégularités qui entachent les opérations effectuées par l'Administration pour qu'il en prononce l'annulation ; qu'en déclarant irrecevable comme tardif le recours formé le 12 février 1993, tendant à l'annulation des opérations effectuées le 14 octobre 1991, le président du tribunal de grande instance, qui a énoncé à tort que ce recours devait être formé " dans un délai voisin " de celui qui est accordé à l'Administration pour restituer les pièces et les documents saisis, a violé l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ; alors, d'autre part, que la signature sans réserve de procès-verbaux d'opérations de visite domiciliaire et d'inventaire de saisie ne constitue pas une renonciation à exercer le recours ouvert par la loi à tout intéressé ; qu'en retenant, dès lors, pour écarter le recours tendant à l'annulation des opérations de visite et de saisie que M. et Mme X... n'avaient formulé aucune observation ni réserve et qu'ils avaient signé les procès-verbaux de ces opérations, le président du tribunal de grande instance a, une fois encore, violé l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ; et alors, enfin, que le juge ne peut opposer de fins de non-recevoir qui ne résultent pas des textes ; qu'en opposant la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté du recours et la fin de non-recevoir tirée de la signature sans réserve par les intéressés du procès-verbal des opérations de visite et de saisie, lesquelles ne résultent d'aucune disposition légale, le président du tribunal de grande instance a, en outre, violé l'article 122 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que le président du tribunal n'a pas rejeté le recours pour avoir été formé après le délai imparti à l'administration fiscale pour restituer les documents saisis ou parce que les requérants avaient signé les procès-verbaux de visite et saisie sans observation ni réserve, mais parce que les faits évoqués comme irréguliers étaient connus des requérants depuis le jour de la visite, soit le 14 octobre 1991 et qu'ils n'ont introduit leur recours que le 12 février 1993, alors que l'efficacité du contrôle de la régularité des opérations par le juge suppose sa saisine rapide ; que le moyen manque en fait pour partie et n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le second moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. et Mme X... et l'EURL Erckmann-Chatrian font enfin grief à l'ordonnance d'avoir rejeté leur recours en annulation des opérations de visite et saisie, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en examinant le bien fondé du recours dont il était saisi après en avoir prononcé l'irrecevabilité, le président du tribunal de grande instance a excédé ses pouvoirs, violant ainsi l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ; et alors, subsidiairement que, les agents de l'Administration autorisés à effectuer des visites et à procéder à des saisies ne tiennent d'aucune disposition légale le pouvoir de recueillir les déclarations des intéressés à l'issue de leurs opérations et d'en dresser procès-verbal ; qu'en refusant de prononcer la nullité des opérations de visite et de saisie effectuées dans les locaux d'habitation de M. et Mme X... et dans les locaux professionnels de l'EURL Erckmann-Chatrian, tout en constatant que, à l'issue de chacune de ces opérations, les agents de l'Administration, qui n'en tenaient le pouvoir ni de la loi ni des décisions judiciaires les ayant habilités, avaient recueilli les déclarations des intéressés qu'ils avaient consignées dans les procès-verbaux, le président du tribunal de grande instance a violé l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ; et alors, toujours subsidiairement, que les opérations de visite et de saisie, effectuées par les agents de l'Administration dans d'autres lieux que ceux pour lesquels l'autorisation leur a été conférée par le juge, sont entachées d'une nullité qu'il appartenait au président du tribunal de grande instance de constater à la demande des intéressés ; qu'en s'abstenant, dès lors, de rechercher si, comme le faisaient valoir les requérants, les agents de l'Administration autorisés à visiter les locaux d'habitation de M. et Mme X... n'avaient pas entaché leurs opérations de nullité en procédant à la visite du grenier dont les intéressés faisaient la preuve qu'il était affecté à l'exploitation professionnelle, le président du tribunal de grande instance, qui a énoncé de manière inopérante que Mme X... avait donné son assentiment à la visite du grenier et que certaines pièces de l'habitation étaient parfois affectées à un usage professionnel, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ;

Mais attendu que le président du tribunal n'a pas prononcé l'irrecevabilité du recours pour cause de tardiveté ; qu'il n'a pas davantage refusé d'annuler les opérations alors que les agents auraient recueilli des déclarations ou visité des locaux autres que ceux visés dans ses ordonnances d'autorisation, mais parce qu'il relevait que les demandeurs n'apportaient pas la preuve de faits particuliers à l'appui de leurs allégations ; que si les dispositions de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales n'autorisent pas les interrogatoires, elles n'interdisent pas la consignation de déclarations faites spontanément par les personnes titulaires des locaux visités et parce que les agents n'avaient visité que les locaux pour lesquels le juge les avait missionnés ; que le moyen manque en fait pour partie et n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 93-15711
Date de la décision : 29/11/1994
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° IMPOTS ET TAXES - Visites domiciliaires - Exécution des opérations - Déroulement - Irrégularité - Requête à adresser au juge - Saisine rapide - Nécessité.

1° Un président de tribunal ne rejette pas un recours pour avoir été formé après le délai imparti à l'administration fiscale pour restituer les documents saisis ou du fait de la signature sans observation ni réserve des procès-verbaux de saisie mais parce que les faits évoqués comme irréguliers étaient connus des requérants depuis le jour de la visite et qu'ils n'ont introduit leur recours que 16 mois plus tard alors que l'efficacité du contrôle de la régularité des opérations par le juge suppose sa saisine rapide.

2° IMPOTS ET TAXES - Visites domiciliaires - Exécution des opérations - Déroulement - Irrégularité - Faits - Preuve - Charge.

2° IMPOTS ET TAXES - Visites domiciliaires - Exécution des opérations - Déroulement - Procès-verbal - Déclaration spontanée - Interdiction (non).

2° Un président de tribunal, qui relève que les demandeurs n'apportent pas la preuve des faits particuliers à l'appui de leurs allégations, que si les dispositions de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales n'autorisent pas les interrogatoires elles n'interdisent pas la consignation de déclarations faites spontanément par les personnes titulaires des locaux visités et que les agents n'ont visité que les locaux pour lesquels il les avait missionnés, est fondé à rejeter le recours en contestation de la régularité des opérations de visite et saisie domiciliaires.


Références :

2° :
Livre des procédures fiscales L16B

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Metz, 20 avril 1993


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 29 nov. 1994, pourvoi n°93-15711, Bull. civ. 1994 IV N° 357 p. 293
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1994 IV N° 357 p. 293

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Nicot, conseiller doyen faisant fonction. .
Avocat général : Avocat général : M. Curti.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Geerssen.
Avocat(s) : Avocats : MM. Parmentier, Foussard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1994:93.15711
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