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09/11/1994 | FRANCE | N°93-85536

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 09 novembre 1994, 93-85536


CASSATION PARTIELLE sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X... Jean,
- la compagnie Drouot assurances, aux droits de laquelle se trouve la compagnie Axa assurances, partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'amiens, 4e chambre, du 5 novembre 1993 qui, dans la procédure suivie contre Jean X... pour blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du Code civil, 2, 3, 485, 593 du Code de procédure pénale, défau

t et contradiction de motifs, manque de base légale, défaut de réponse à con...

CASSATION PARTIELLE sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X... Jean,
- la compagnie Drouot assurances, aux droits de laquelle se trouve la compagnie Axa assurances, partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'amiens, 4e chambre, du 5 novembre 1993 qui, dans la procédure suivie contre Jean X... pour blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du Code civil, 2, 3, 485, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, défaut de réponse à conclusions :
" en ce que l'arrêt attaqué a fixé le préjudice, soumis à recours, subi par M. Y..., a la somme de 9 221 819, 76 francs dont 4 922 113, 39 francs pour tierces personnes et a condamné Jean X... et la compagnie Axa Assurances à régler à Mme Y... ès qualités, et après déduction de la créance des organismes sociaux, la somme de 4 651 559, 24 francs ;
" aux motifs adoptés que la somme revenant à Mme Y... ès qualités sera allouée en capital et non sous forme de rente ; qu'il est nécessaire en effet de réparer sans attendre l'intégralité du préjudice subi ;
" et aux motifs propres que le premier juge a clairement exposé les éléments de la cause et répondu à chacun des moyens articulés par les parties par des développements pertinents que la Cour adopte ; qu'après déduction de la créance des organismes sociaux, il reste le solde à payer par le prévenu et sa compagnie d'assurances, au bénéfice de la partie civile soit la somme de 4 651 559, 24 francs ;
" alors, d'une part, que l'indemnité pour tierce personne étant indépendante de l'indemnisation pour incapacité permanente partielle et ayant pour finalité de pallier l'impossibilité pour la victime d'assumer seule les actes de la vie courante, il en résulte que lorsque ces actes sont accomplis dans le cadre d'une hospitalisation, ils sont pris en charge par un organisme social, ce qui exclut que la victime puisse, durant cette période, toucher une indemnité pour tierce personne ; que dès lors, en accordant à la victime l'indemnité pour la tierce personne, sous forme d'un capital, la cour d'appel a violé les règles de l'indemnisation qui ne peut être source de profit pour la victime ;
" alors, d'autre part, que la cour d'appel ne pouvait accorder à la victime l'indemnité pour tierce personne sous forme d'un capital sans répondre aux conclusions du prévenu et de son assureur faisant valoir que l'indemnisation pour tierce personne ne pouvait se faire que sous la forme d'une rente dans la mesure où des changements dans la vie de la victime (hospitalisation) peuvent survenir ce qui entraîne un transfert de l'assistance tierce personne à l'établissement hospitalier et entraîne pour le tiers responsable une double indemnisation et pour la victime un profit non justifié " ;
Attendu que, se prononçant sur la réparation des dommages découlant de l'atteinte à l'intégrité physique de Jean-François Y..., agent des PTT blessé lors d'un accident de service dont Jean X... a été déclaré responsable, la juridiction du second degré, qui était saisie de conclusions de ce dernier et de son assureur tendant à l'indemnisation du préjudice résultant de la nécessité de l'assistance d'une tierce personne sous la forme d'une rente, alloue de ce chef à la victime une indemnité en capital ;
Attendu qu'en cet état la cour d'appel, appréciant souverainement les modalités de la réparation du préjudice soumis à son examen, et répondant par là même aux conclusions dont elle était saisie, a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Mais sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 1er de l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959, 1153, 1382 du Code civil, L. 376-1, L. 454-1 du Code de la sécurité sociale, 2, 3, 485, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, défaut de réponse à conclusions, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné Jean X... et son assureur le groupe Drouot a verser à la poste et à la mutuelle des PTT les sommes respectives de 4 451 143, 52 francs, et 119 117 francs avec intérêts de droit pour la première à compter du 1er octobre 1990 et pour la seconde du 28 juin 1990 ;
" aux motifs adoptés qu'il y a lieu de faire droit intégralement à la demande de l'agent judiciaire du Trésor, ainsi qu'à la demande de la mutuelle générale des PTT ;
" et aux motifs propres que La Poste, établissement public venant aux droits du Trésor public, bénéficiant des dispositions de l'ordonnance du 7 janvier 1959, le recours subrogatoire se traduit par une indemnisation en capital, quels qu'en soient les éléments et non sous forme de rente ; que compte tenu de la diminution des frais sollicités par la poste, la Cour fixe exactement l'indemnisation soumise à recours ainsi :
" frais médicaux et hospitaliers1 219 920, 70 F " I. T. T. 225 228, 00 F " I. P. P. 90 % 1 800 000, 00 F " aménagement du logement4 922 113, 39 F " capitalisation des frais futurs à supporter par La Poste835 380, 67 F " créance de la mutuelle des PTT119 117, 00 F9 221 819, 76 F " à déduire :
" créance de La Poste (avec intérêts à compter du 1er octobre 1990) 4 451 143, 52 F " créance de la mutuelle des PTT (avec intérêts à compter du 28 juin 1990) 119 117, 00 F4 570 260, 52 F
" alors, d'une part, que la cour d'appel ne pouvait faire droit à la demande de La Poste réclamant la somme de 835 380, 67 francs évaluée forfaitairement pour les dépenses futures, sans répondre aux conclusions de Jean X... et de son assureur faisant valoir qu'une partie de ces frais affectés au " nursing " faisait double emploi avec les frais pour tierce personne ; que dès lors, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
" alors, d'autre part, que la cour d'appel ne pouvait accorder à La Poste venant aux droits de l'Etat, la somme de 835 380, 67 francs représentant le capital constitutif des frais futurs et celle de 730 688, 87 francs pour capital représentatif de la tierce personne, dès lors que l'ordonnance du 7 janvier 1959 ne prévoit le versement au bénéfice de l'Etat des capitaux constitutifs que des pensions ou des rentes ce qui exclut la capitalisation des frais futurs ;
" alors encore que la cour d'appel ne pouvait accorder à La Poste le capital représentatif des frais futurs sans répondre aux conclusions de Jean X... et du groupe Drouot faisant valoir que seuls les versements des capitaux constitutifs des rentes et pensions étaient prévus par l'ordonnance de 1959 ;
" alors enfin que la cour d'appel ne pouvait, sans violer les textes visés au moyen, accorder à La Poste et à la mutuelle des PTT les intérêts à compter des 28 juin et 1er octobre 1990 sur des sommes non encore déboursées " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que, sauf les exceptions énumérées à l'article 1- III de l'ordonnance du 7 janvier 1959 et concernant les arrérages de pensions ou rentes ayant fait l'objet d'une concession définitive, l'Etat ou les personnes publiques visées par ce texte ne sont admis à poursuivre contre le tiers responsable d'un accident que le remboursement des sommes qu'ils ont effectivement déboursées ;
Attendu d'une part, que les juges allouent à l'établissement public La Poste, aux droits du Trésor public, le capital représentatif des frais futurs pris en charge par cet établissement en retenant que, " bénéficiant des dispositions de l'ordonnance du 7 janvier 1959 ", son " recours subrogatoire se traduit par une indemnisation en capital quels qu'en soient les éléments et non sous une forme de rente " ;
Que, d'autre part, ils allouent à la mutuelle générale des PTT le capital constitutif du complément de la pension d'invalidité servie par elle à la victime ; qu'enfin ils accordent à chacun de ces organismes les intérêts au taux légal sur lesdites sommes à compter de sa demande ;
Attendu qu'en cet état il ne saurait être fait grief à l'arrêt attaqué ni d'avoir fait droit à la réclamation de La Poste concernant l'évaluation des frais futurs pris en charge par elle, leur relation avec l'accident n'étant pas contestée, ni de lui avoir alloué le capital représentatif de la majoration pour tierce personne de la pension concédée à la victime, cette pension ainsi majorée entrant dans les prévisions de l'article 1- III de l'ordonnance du 7 janvier 1959 ;
Que, par ailleurs, il est vainement reproché aux juges d'avoir accordé aux tiers payeurs les intérêts au taux légal à compter de leurs demandes, tant sur la capital représentatif de la majoration pour tierce personne servie par La Poste, que sur celui du complément de pension d'invalidité versé par la mutuelle dont le remboursement n'est pas contesté dès lors qu'il s'agit de créances dont la décision judiciaire se borne à reconnaître l'existence dans la limite du préjudice résultant de l'atteinte à l'intégrité physique de la victime ;
Mais attendu qu'en allouant en outre à La Poste, sans l'accord de la personne tenue à réparation et de son assureur le capital représentatif des frais futurs, alors que cette somme correspond au remboursement anticipé de prestations non encore exposées par cet établissement et n'entrant pas dans les prévisions de l'article 1- III de l'ordonnance précitée, la cour d'appel a méconnu les textes et le principe ci-dessus rappelés ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Amiens du 5 novembre 1993, mais seulement en ses dispositions relatives au remboursement au profit de l'établissement public La Poste de la somme de 835 380, 67 francs représentant le montant capitalisé des frais futurs et compris dans la somme de 4 451 143, 52 francs allouée à ce tiers payeur, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Vu l'article L. 131-5 du Code l'organisation judiciaire ;
Condamne Jean X... à rembourser à La Poste, au fur et à mesure de ses versements, le montant des frais futurs exposés pour Jean-François Y... et dont le capital constitutif est fixé à 835 380, 67 francs, avec intérêts au taux légal à compter du jour du paiement ;
DIT le présent arrêt opposable à la compagnie Axa Assurances ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 93-85536
Date de la décision : 09/11/1994
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° SECURITE SOCIALE - Régimes spéciaux - Agent d'un établissement public à caractère administratif - Accident du travail - Tiers responsable - Recours de l'établissement public - Assiette - Frais futurs - Capital représentatif - Exigibilité (non).

1° Sauf les exceptions énumérées à l'article 1-III de l'ordonnance du 7 janvier 1959 et concernant les arrérages de pensions ou de rentes ayant fait l'objet d'une concession définitive, l'Etat ou les personnes publiques visées par ce texte ne sont admis à poursuivre contre le tiers responsable d'un accident que le remboursement des sommes qu'ils ont effectivement déboursées. Encourt, dès lors, la cassation l'arrêt qui alloue à La Poste, sans l'accord de la personne tenue à réparation ou de son assureur, le capital représentatif des frais futurs(1).

2° SECURITE SOCIALE - Régimes spéciaux - Agent d'un établissement public à caractère administratif - Accident du travail - Tiers responsable - Recours de l'établissement public - Intérêts du capital représentatif d'une pension d'invalidité ou d'une rente - Point de départ.

2° Justifie sa décision la cour d'appel qui alloue à l'une des personnes publiques visées par l'ordonnance du 7 janvier 1959 les intérêts au taux légal à compter de la demande sur le capital représentatif d'une pension d'invalidité servie à un agent, victime d'un accident, dès lors que ce capital constitue, aux termes de l'article 1-III de ce texte, la créance de ce tiers payeur, dont la décision judiciaire se borne à constater l'existence dans la limite du préjudice découlant de l'atteinte à l'intégrité physique(2).


Références :

2° :
Ordonnance 59-76 du 07 janvier 1959 art. 1

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 05 novembre 1993

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1976-07-06, Bulletin criminel 1976, n° 252, p. 662 (cassation partielle) ;

Chambre criminelle, 1977-06-28, Bulletin criminel 1977, n° 247, p. 623 (cassation partielle) ;

Chambre criminelle, 1993-02-03, Bulletin criminel 1993, n° 61, p. 144 (cassation partielle). A comparer : Chambre criminelle, 1984-07-03, Bulletin criminel 1984, n° 252, p. 667 (cassation partielle). CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre civile 2, 1991-05-24, Bulletin 1991, II, n° 160, p. 86 (cassation) ;

Chambre civile 1, 1990-05-09, Bulletin 1990, I, n° 99, p. 73 (cassation) ;

A rapprocher : Chambre criminelle, 1981-04-01, Bulletin criminel 1981, n° 114, p. 313 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1982-07-09, Bulletin criminel 1982, n° 187, p. 514 (cassation partielle) ;

En sens contraire : Chambre civile 2, 1993-06-23, Bulletin 1993, II, n° 222, p. 120 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 09 nov. 1994, pourvoi n°93-85536, Bull. crim. criminel 1994 N° 360 p. 883
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1994 N° 360 p. 883

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Souppe, conseiller doyen faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Galand.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Blin.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Rouvière et Boutet.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1994:93.85536
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