REJET du pourvoi formé par :
- X... René,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, en date du 12 mars 1993, qui, pour défaut de paiement de cotisations en matière d'assurance maladie, l'a condamné à 1 200 francs d'amende et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation de l'article 2 du protocole n° 4 additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, article 12 du Pacte des Nations Unies sur les droits civils et politiques, L. 244-1, L. 244-2, L. 244-4, L. 612-9, L. 615-1, R. 244-4 et R. 615-10 et suivants du Code de la sécurité sociale, 16 de la Convention franco-suisse du 9 septembre 1966, 4 et suivants de la Convention franco-suisse de sécurité sociale du 24 novembre 1976, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a reconnu X... coupable du défaut de paiement de cotisations sociales et, en conséquences, a fait droit aux demandes de la partie civile ;
" aux motifs qu'il résulte de ces dispositions que les soins fournis en Suisse à une personne qui s'y trouve domiciliée et qui exerce une profession libérale en France ne peuvent être pris en charge par l'organisme français de sécurité sociale (d'où la raison d'être de l'assurance en Suisse) ; que ces dispositions ne signifient cependant pas que l'organisme français de sécurité sociale n'est pas tenu de rembourser des soins prodigués en France à cette même personne ; qu'une maladie voire une hospitalisation de ladite personne en France étant possible, l'affiliation au régime obligatoire français ne constitue pas une obligation financière dépourvue de contrepartie ; que le caractère obligatoire de l'affiliation à la caisse d'assurance maladie des professions libérales provinces, pour laquelle l'organisme conventionné est la Fédération nationale de la mutualité française, ne constitue pas une restriction à la liberté de chacun de quitter son pays pour résider à l'étranger ; que les inconvénients financiers inhérents à la situation dans laquelle un individu choisit librement de résider dans un pays et d'exercer sa profession dans un autre pays ne sauraient être assimilés à une entrave à l'exercice de cette liberté ; que l'assujettissement au régime de sécurité sociale ne saurait être confondu avec la fiscalité ;
" alors, d'une part, que l'assujettissement au régime de sécurité sociale français, par l'intermédiaire d'un organisme conventionné, qui a pour corollaire le paiement de cotisations par l'assujetti, n'a de raison d'être que si celui-ci ne dépend que de ce seul régime, l'organisme prestataire étant ainsi dans l'obligation d'assurer le remboursement des soins médicaux dans les limites et plafond définis par ce régime ; qu'il en est autrement lorsque l'assujetti n'a pas sa résidence en France et est assujetti dans son état de résidence à un régime de sécurité sociale obligatoire ; que dans ces conditions le versement en France de cotisations de sécurité sociale n'a plus de raison d'être et leur paiement à l'organisme français devient sans objet ; que pour en avoir décidé autrement, la Cour a violé les articles visés au moyen ;
" alors, d'autre part, que la liberté de quitter son pays, d'exercer son activité professionnelle dans un pays distinct de celui de sa résidence a pour corollaire que la charge financière supportée par celui qui exerce cette liberté ne soit pas une entrave à son exercice ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'arrêt que X... supporte, en matière d'assujettissement à l'assurance maladie une charge égale à celle supportée par les avocats exerçant leur profession en France et à celle supportée par les résidents suisses ; qu'une telle charge est contraire :
" 1° à l'article 2 du protocole n° 4 additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme,
" 2° à l'article 1er de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen " ;
Attendu que, pour déclarer René X..., ressortissant français domicilié en Suisse, mais exerçant sa profession d'avocat en France, coupable de non-paiement de cotisations d'assurance maladie, la juridiction du second degré se prononce par les motifs partiellement reproduits au moyen ; qu'elle ajoute que les obligations auxquelles est soumis l'intéressé ne constituent pas une entrave à la liberté de chacun de quitter son pays pour résider à l'étranger ;
Attendu qu'en cet état, l'arrêt attaqué n'encourt pas les griefs allégués ; qu'aux termes de l'article 7-2 de la Convention de sécurité sociale franco-suisse du 3 juillet 1975, publiée par décret du 24 novembre 1976, les travailleurs indépendants qui exercent leur activité professionnelle sur le territoire de l'un des Etats sont soumis à la législation de cet Etat, même s'ils résident sur le territoire de l'autre ; que l'article L. 615-1 du Code de la sécurité sociale soumet au régime obligatoire d'assurance maladie des travailleurs non salariés des professions non agricoles le groupe des professions libérales, comprenant les avocats ; qu'il en résulte que l'affiliation à ce régime d'un avocat français exerçant sa profession en France, et le paiement des cotisations correspondantes, trouvent leur contrepartie financière dans le versement par l'organisme français des prestations susceptibles d'être servies à l'assuré dans les conditions fixées par la Convention précitée et par la législation interne, indépendamment des contraintes sociales inhérentes au libre choix de l'intéressé de résider en Suisse ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.