CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Lucien, contre l'arrêt de la cour d'appel d'Agen, chambre correctionnelle, en date du 15 octobre 1992, qui, pour infraction au Code du travail, l'a condamné à 10 000 francs d'amende et à des réparations civiles.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles L. 143-3, L. 620-3, R. 154-3 et R. 632-1 du Code du travail, 4 du Code pénal et 390, 550 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Lucien X... coupable de défaut d'inscription au registre unique du personnel et de non-remise des bulletins de salaires aux époux Y... et l'a condamné à une amende de 10 000 francs ;
" aux motifs que ceux-ci auraient " travaillé peu ou prou ", du 2 au 10 juin 1991, le mari, comme " gardien de la propriété " personnelle de Lucien X..., l'épouse, à la cuisine de l'auberge exploitée dans une autre localité par ce dernier, qui ne les avait pas rémunérés, " l'accord ne s'étant pas fait " sur les conditions du contrat de travail " ;
" alors, d'une part, qu'il résultait de cette dernière constatation, dont la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences, que le départ des époux Y... était intervenu à l'issue d'un temps d'observation préliminaire à la conclusion éventuelle du contrat de travail qui aurait déterminé les modalités de leurs tâches et de leur rémunération ; que, dans ces conditions, la cour d'appel qui n'a fait état d'aucune circonstance de fait propre à caractériser la situation de dépendance économique et de subordination juridique dans laquelle se seraient trouvés les époux Y... qui travaillaient " peu ou prou ", n'a pas donné de base légale à sa décision ;
" alors, d'autre part, que, de toute manière, la cour d'appel a confirmé le prononcé de condamnations excédant le maximum prévu pour les infractions, seules explicitées par la citation, de défaut d'inscription au registre unique du personnel, et de non-remise de bulletin de salaire, seule, de surcroît, à pouvoir être retenue dans les relations entre Lucien X... et M. Y... qui ne travaillait pas dans un " établissement " au sens de l'article L. 620-3 du Code du travail " ;
Vu lesdits articles, ensemble l'article L. 324-10 du Code du travail ;
Attendu que, seul entre dans les prévisions de l'article L. 324-10. 3° du Code du travail, l'emploi de salariés par une personne exerçant une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestations de services ou l'accomplissement d'actes de commerce ;
Attendu en outre que le registre unique du personnel prévu par l'article L. 620-3 dudit Code ne doit être tenu que dans les établissements définis à l'article L. 200-1 ;
Attendu que, s'étant borné en cause d'appel à contester avoir employé les époux Y..., le prévenu est irrecevable à prétendre, pour la première fois devant la Cour de Cassation, qu'il n'aurait été poursuivi que pour des contraventions ;
Attendu que Josseline Y... ayant été employée pour une activité de restauration qui entre dans les prévisions de l'article L. 324-10, alinéa 1er, l'inobservation à son égard des formalités prévues par le 3° de cet article est constitutive du délit de travail clandestin ;
Mais attendu que, selon les constatations de l'arrêt attaqué, Yves Y... a été employé, non pour cette activité, mais comme gardien de la propriété privée du prévenu ; que, dès lors, ce dernier n'était pas tenu de l'inscrire sur le registre du personnel ; qu'en outre, le refus, par un particulier employant du personnel de maison, de délivrer un bulletin de paie ne constitue que la contravention prévue et punie par les articles L. 143-3 et R. 154-2 du Code du travail ;
Qu'en déclarant le délit de travail clandestin constitué en raison de l'emploi d'Yves Y... sans l'accomplissement de ces formalités, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et que la censure est encourue de ce chef ;
Et attendu que la peine est indivisible ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen de cassation proposé :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Agen, en date du 15 octobre 1992 ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Toulouse.