Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 novembre 1992), que M. X..., hémophile contaminé par le virus d'immunodéficience humaine (VIH) à l'occasion de l'injection de produits sanguins entre novembre 1984 et juin 1985, a présenté une demande d'indemnisation au Fonds d'indemnisation des transfusés et hémophiles contaminés par le VIH (le Fonds), créé par l'article 47 de la loi n° 91-1406 du 31 décembre 1991 ; que M. X..., n'ayant pas accepté les offres du Fonds, a saisi la cour d'appel de Paris aux fins d'indemnisation ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir, après avoir décidé que le Fonds devait verser immédiatement à M. X... l'intégralité de la part d'indemnisation du préjudice spécifique de contamination dérivant de sa séropositivité, jugé, en revanche, que le paiement d'un complément d'indemnisation de ce préjudice afférent au syndrome d'immunodéficience acquise (SIDA) déclaré, était subordonné à la constatation médicale de la maladie, alors que, d'une part, doit être immédiatement indemnisé un préjudice qui, bien que futur, présente un degré de certitude suffisant ; qu'ainsi la cour d'appel n'aurait pu exiger que le préjudice résultant pour une victime déjà séropositive de la survenance du SIDA soit " absolument certain " et aurait violé les articles 47-I, III et IV de la loi du 31 décembre 1991 et 1382 du Code civil, alors que, d'autre part, la volonté clairement exprimée du législateur au cours des travaux préparatoires a été de considérer comme un préjudice certain et immédiatement indemnisable la survenance du SIDA chez une personne séropositive, que, par suite, aurait été violé l'article 47 de la loi du 31 décembre 1991, alors qu'enfin il résultait de l'audition du professeur Montagnier que, compte tenu des données actuelles et prévisibles de la science pour plusieurs années, 90 % des personnes séropositives étaient appelées à contracter le SIDA dans un délai de 12 ans à compter de leur séroconversion ; que la cour d'appel, au lieu de se fonder exclusivement sur les allégations du Fonds, aurait dû rechercher s'il ne résultait pas de cette audition qu'elle avait elle-même ordonnée, mais dont elle n'a pas tenu compte, que le préjudice lié à la survenance du SIDA chez une personne déjà séropositive depuis 8 ans et située au stade IV et dernier de la contamination sur l'échelle du CDC, était suffisamment certain pour être d'ores et déjà indemnisé, qu'ainsi elle aurait privé sa décision de base légale au regard des articles 47-I, III et IV de la loi du 31 décembre 1991 et 1382 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient que le préjudice de M. X... comprend les troubles dans ses conditions d'existence entraînés par la séropositivité puis, s'il y a lieu, par la survenance du SIDA déclaré, et que de nombreux essais thérapeutiques en cours visent à retarder, voire à bloquer, le passage à la maladie ;
Que, de ces seules énonciations, qui relèvent de son pouvoir souverain d'appréciation, la cour d'appel a pu déduire, justifiant légalement sa décision, que le préjudice résultant de la survenance du SIDA n'avait pas un caractère certain et décider que le paiement de l'indemnisation afférente au SIDA déclaré serait subordonné à la constatation médicale de la maladie ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.