CASSATION sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X... Karim,
accusé de vol avec port d'arme, contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 20 janvier 1993, qui a rejeté sa demande de mise en liberté.
LA COUR,
Vu le mémoire personnel produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 212, 215 et 215-1 du Code de procédure pénale, des articles 591 et 593 du même Code, de l'article 5.4 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, violation de la loi, défaut de motifs et manque de base légale, défaut de réponse à conclusions :
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé de faire droit à l'argumentation du concluant, fondée sur l'exécution anticipée de l'ordonnance de prise de corps, en date du 5 novembre 1992, et partant sur l'irrégularité de sa détention ;
" aux motifs que " la Cour estime que Karim X... était régulièrement détenu en vertu du mandat décerné le 7 janvier 1992 par le juge d'instruction de Créteil, jusqu'à l'arrêt de renvoi de la chambre d'accusation du 5 novembre 1992. A compter de cette date, l'ordonnance de prise de corps décernée par la chambre d'accusation a remplacé le mandat de dépôt délivré le 7 janvier 1992, par le juge d'instruction ; la détention de l'accusé est donc régulière (...) " ;
" alors que Karim X... qui avait été placé sous mandat de dépôt le 7 janvier 1992, à la suite de son inculpation pour le vol avec arme, commis le 17 mai 1991, devait être mis en liberté à la suite de l'arrêt de la chambre d'accusation de Paris du 5 novembre 1992, disant n'y avoir lieu à suivre contre lui, pour ce vol avec arme ; qu'en effet, s'agissant du vol avec arme commis le 15 février 1991 à l'Hay-les-Roses et pour lequel il a été renvoyé devant la cour d'assises du Val-de-Marne, Karim X..., inculpé par le juge d'instruction le 20 mars 1992, n'avait pas été placé sous mandat de dépôt pour ces nouveaux faits ; qu'en conséquence, le concluant devait être considéré comme libre dans cette affaire ; ainsi l'ordonnance de prise de corps décernée à son encontre par la chambre d'accusation, le 5 novembre 1992, ne pouvait prendre effet que dans les conditions prévues par l'article 215-1 du Code de procédure pénale ; qu'ainsi, il résulte des dispositions combinées des articles 212, 215 et 215-1 du Code de procédure pénale, que Karim X... était détenu sans titre régulier, l'ordonnance de prise de corps l'affectant ayant été mise à exécution de manière prématurée, qu'ainsi l'arrêt attaqué a violé les dispositions précitées " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que la détention provisoire ne peut s'appliquer à d'autres faits que ceux pour lesquels le titre de détention a été délivré ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Karim X... a, le 7 janvier 1992, été inculpé de " vol avec port d'arme commis le 17 mai 1991 au Crédit Lyonnais de Maisons-Alfort " et, pour ces faits, placé en détention provisoire ;
Attendu que, l'intéressé ayant reconnu être l'auteur d'un autre vol avec port d'arme, commis dans un magasin de l'Hay-les-Roses le 15 février 1991, le procureur de la République a saisi le juge d'instruction d'un réquisitoire supplétif en exécution duquel ce magistrat a, le 20 mars 1992, inculpé X... de ce second vol avec port d'arme mais n'a pris aucune mesure de détention ;
Attendu qu'après ordonnance de transmission des pièces portant sur les deux vols avec port d'arme, la chambre d'accusation, par arrêt du 5 novembre 1992, devenu définitif, a prononcé non-lieu pour le vol commis à Maisons-Alfort le 17 mai 1991 mais a renvoyé Karim X... devant la cour d'assises pour le second vol avec port d'arme, en décernant ordonnance de prise de corps ;
Attendu que, le 31 décembre 1992, Karim X... a saisi la chambre d'accusation d'une demande de mise en liberté en faisant valoir qu'il n'avait été placé en détention provisoire que pour le vol de Maisons-Alfort en sorte que, un non-lieu étant intervenu pour ce vol, il aurait dû, par application des dispositions de l'article 212, alinéa 2, du Code de procédure pénale, être mis d'office en liberté, l'ordonnance de prise de corps devant alors être exécutée selon les modalités de l'article 215-1 du même Code ;
Attendu que, par l'arrêt attaqué, les juges ont rejeté cette demande en énonçant que " l'ordonnance de prise de corps a remplacé le mandat de dépôt délivré le 7 janvier 1992 par le juge d'instruction " ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que les faits pour lesquels Karim X... avait été placé en détention avaient été l'objet d'un non-lieu et que, aucun mandat de dépôt n'ayant été décerné pour les autres faits criminels, l'accusé devait être mis immédiatement en liberté, la chambre d'accusation a méconnu le sens et la portée du principe susénoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 20 janvier 1993 ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE la mise en liberté de Karim X..., s'il n'est détenu pour autre cause.