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18/11/1992 | FRANCE | N°90-44362;90-45064

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 novembre 1992, 90-44362 et suivant


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Vu la connexité, joint les pourvois n°s 90-44.362 et 90-45.064 ;

Attendu que M. X... a été engagé le 2 avril 1973 par la Banque Sudameris en qualité de fondé de pouvoir ; que, devenu inspecteur, il a été chargé en 1988 d'une mission de contrôle des risques auprès de la Banque Sudameris Columbia à Bogota ; qu'après avoir remis le 13 octobre 1988 un rapport de synthèse à son supérieur hiérarchique, il a pris l'initiative d'envoyer directement au président et aux membres du comité consultatif de la banque, le 7 décembre 1988, un rapport sur les mesures qu'il j

ugeait urgentes et nécessaires pour une bonne et saine gestion de la banque ; qu...

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Vu la connexité, joint les pourvois n°s 90-44.362 et 90-45.064 ;

Attendu que M. X... a été engagé le 2 avril 1973 par la Banque Sudameris en qualité de fondé de pouvoir ; que, devenu inspecteur, il a été chargé en 1988 d'une mission de contrôle des risques auprès de la Banque Sudameris Columbia à Bogota ; qu'après avoir remis le 13 octobre 1988 un rapport de synthèse à son supérieur hiérarchique, il a pris l'initiative d'envoyer directement au président et aux membres du comité consultatif de la banque, le 7 décembre 1988, un rapport sur les mesures qu'il jugeait urgentes et nécessaires pour une bonne et saine gestion de la banque ; qu'il a été mis à pied le 20 décembre 1988 et licencié pour faute grave le 23 janvier 1989 ;

Sur le premier moyen du pourvoi formé par le salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 7 juin 1990) de l'avoir débouté de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors que, selon le moyen, d'une part, la lettre de mise à pied du 20 décembre 1988 ayant visé l'application de l'article 7 C du règlement intérieur qui ne traite que " du blâme et de la mise à pied disciplinaire ", sans envisager l'engagement d'une procédure de licenciement, laquelle ne devait être commencée que 28 jours plus tard, manque de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 122-14-4 du Code du travail, l'arrêt qui admet que cette mise à pied n'ayant qu'un caractère conservatoire, l'employeur avait pu sanctionner les faits litigieux d'un licenciement ; alors que, d'autre part, manque encore de base légale au regard des mêmes textes l'arrêt qui admet que la mise à pied n'aurait eu qu'un caractère conservatoire, bien que le salarié ait ensuite repris son activité, pris des congés et réintégré à nouveau ses fonctions avant son licenciement ; que ce manque de base légale est d'autant plus caractérisé que l'arrêt a omis de prendre en considération la contradiction de l'attitude de l'employeur qui avait laissé le salarié réoccuper son poste après l'exécution de sa mise à pied, tout en le licenciant ensuite pour faute grave en raison du fait ayant motivé la mise à pied ; alors, enfin, que viole l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, l'arrêt qui omet de s'expliquer sur le moyen faisant valoir que le caractère conservatoire de la mise à pied était encore contredit par le fait que la banque avait attendu 13 jours à partir de la remise du rapport litigieux pour prendre cette mesure ;

Mais attendu que la cour d'appel a relevé que la mise à pied avait été expressément décidée à titre conservatoire dans l'attente des résultats d'une mesure d'instruction, et qu'elle n'avait été interrompue que pour éviter de priver M. X... de son salaire pendant une durée excessive ; qu'elle a, dès lors, pu décider, sans avoir à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que, malgré une référence équivoque au règlement intérieur, la mesure ne constituait pas une sanction ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi formé par le salarié : (sans intérêt) ;

Sur le troisième moyen du pourvoi formé par le salarié :

Attendu que le salarié reproche enfin à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en paiement de l'indemnité de licenciement prévue par la convention collective nationale du personnel des banques alors que, selon le moyen, l'article 58 de cette convention prévoit le versement d'une indemnité de licenciement dans les cas de licenciement visés par l'article 48 de la convention, à l'exception des hypothèses de révocation visées à l'article 32, de sorte qu'ayant constaté que M. X... avait fait l'objet d'un licenciement, viole les articles 58 et 48 précités, l'arrêt qui lui refuse le bénéfice de l'indemnité conventionnelle de licenciement ; que, de surcroît, manque de base légale au regard de l'article 48 de la convention collective, l'arrêt qui omet de vérifier si les griefs admis par la cour d'appel et déduits notamment d'un défaut de respect par le salarié de contraintes hiérarchiques, ne caractérisaient pas l'insuffisance professionnelle visée par ce texte ;

Mais attendu que l'article 58 de la convention collective applicable ne prévoit le versement de l'indemnité conventionnelle que dans les cas de licenciements prononcés soit pour insuffisance physique, intellectuelle ou professionnelle soit pour suppression d'emploi ; qu'ayant constaté que le licenciement était intervenu pour faute, la cour d'appel a écarté à bon droit la demande du salarié ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi formé par l'employeur :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné à payer les indemnités de préavis et de congés payés sur préavis, l'indemnité légale de licenciement et une indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement alors que, selon le moyen, de première part, l'arrêt ne tire pas les conséquences légales de ses propres constatations ; que dans la mesure où il constate lui-même qu'investi de hautes fonctions d'inspection, M. X... a, sans que rien ne l'impose, l'inspecteur général et le directeur général ayant été avertis, rédigé un document corrosif, parfois accablant pour la direction de la banque, adressé en méconnaissance totale des règles qui gouvernent la hiérarchie de l'entreprise, à l'intention du président et du comité consultatif de la banque (c'est-à-dire la Banca Commerciale Italiana, la Banque Indosuez, la Dresder Bank, la SPB Paribas, l'Union des banques suisses) en spécifiant dans une lettre d'accompagnement qu'il n'ignorait pas l'irrégularité de son initiative, il ne pouvait tenir pour possible la poursuite du contrat de travail pendant le préavis et dénier la faute grave de l'intéressé dont l'ancienneté n'excluait pas, au contraire, la gravité de la faute ; alors que, de deuxième part,

l'arrêt dénature les conclusions de la banque en qualifiant d'ambigus les griefs de la direction " qui paraît tout à la fois dénoncer la manière et regrette que le salarié n'ait pas fait état plus tôt des informations qu'il prétendait détenir à les supposer fondées " ; que la banque a, en effet, tout simplement justifié de la gravité du manquement commis par M. X... soit qu'il y ait eu des faits graves appelant un remède immédiat, qu'il lui appartenait de porter d'urgence à la connaissance de son chef hiérarchique au lieu de partir en vacances et de solliciter des entretiens imprécis ayant pour objet sa propre situation, soit qu'il n'y ait eu que des rumeurs imprécises et non vérifiées qu'il ne pouvait brutalement et tardivement porter hors hiérarchie à la connaissance de tiers ; alors que, de troisième part, l'arrêt est entaché d'un défaut de réponse à conclusions en ce qu'il est totalement muet sur le fait que l'envoi du document corrosif en cause a été adressé aux membres du comité consultatif pris à titre personnel, c'est-à-dire aux autres banques françaises ou étrangères, actionnaires de Sudameris, en envoyant ce mémorandum à l'adresse personnelle de chacun des membres du comité consultatif en France ou à l'étranger ; qu'il s'agissait pour un cadre parfaitement au courant des rouages de la banque de nuire délibérément ; que l'arrêt est également muet sur le fait que lors du procès-verbal d'audition de janvier 1989, M. X... a reconnu qu'il ne pouvait justifier des diverses accusations portées notamment sur le problème du blanchiment de l'argent de la drogue et de la responsabilité de la banque en ce domaine ; alors que, de quatrième part, la faute de M. X... ne pouvait être atténuée par la référence abstraite et injustifiée à la " perception " d'une situation qui se serait confirmée, cette situation " de dimension internationale " étant étrangère à la Banque Sudameris ni par le fait que M. X... était un cadre ancien, l'ancienneté ne pouvant être retenue comme une excuse ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui n'avait pas à répondre à de simples arguments et qui n'a pas dénaturé les conclusions dont elle était saisie, a pu décider que le comportement fautif d'un cadre ancien, qui avait seulement témoigné d'un zèle excessif et d'une maladresse, ne rendait pas impossible son maintien dans l'entreprise pendant la durée du préavis et ne constituait donc pas une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 90-44362;90-45064
Date de la décision : 18/11/1992
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Pouvoir disciplinaire - Mesure disciplinaire - Définition - Mise à pied conservatoire (non).

1° Une mise à pied expressément décidée à titre conservatoire, dans l'attente des résultats d'une mesure d'instruction et qui n'est interrompue que pour éviter de priver le salarié de son salaire pendant une durée excessive, ne constitue pas une sanction.

2° CONVENTIONS COLLECTIVES - Banque - Convention nationale du personnel des banques - Licenciement - Indemnités - Indemnité conventionnelle de licenciement - Attribution - Condition.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement - Indemnités - Indemnité conventionnelle de licenciement - Attribution - Condition 2° BANQUE - Personnel - Contrat de travail - Licenciement - Indemnités - Indemnité conventionnelle de licenciement - Attribution - Condition.

2° Dès lors que le licenciement d'un salarié d'une banque est intervenu pour faute, celui-ci ne peut prétendre au paiement de l'indemnité conventionnelle de licenciement prévue par l'article 58 de la convention collective nationale du personnel des banques.

3° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement - Indemnités - Délai-congé - Faute du salarié - Gravité - Cadre - Cadre ancien ayant témoigné d'un zèle excessif et d'une maladresse.

3° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement - Indemnités - Indemnité de licenciement - Faute du salarié - Gravité - Cadre - Cadre ancien ayant témoigné d'un zèle excessif et d'une maladresse.

3° Ne constitue pas une faute grave le comportement d'un cadre ancien d'une banque qui avait seulement témoigné d'un zèle excessif et d'une maladresse.


Références :

convention collective nationale du personnel des banques art. 58

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 07 juin 1990


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 nov. 1992, pourvoi n°90-44362;90-45064, Bull. civ. 1992 V N° 551 p. 349
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1992 V N° 551 p. 349

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Kuhnmunch
Avocat général : Avocat général :M. Kessous
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Waquet
Avocat(s) : Avocats :la SCP Rouvière, Lepître et Boutet, M. Choucroy.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:90.44362
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