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28/10/1992 | FRANCE | N°92-80726

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 octobre 1992, 92-80726


REJET des pourvois formés par :
- X..., Y..., Z..., A... Julien,
contre l'arrêt de la cour d'assises des mineurs de la Haute-Savoie, en date du 16 septembre 1991, qui les a condamnés : X..., à 20 ans de réclusion criminelle pour assassinat, tentative d'assassinat, vol qualifié, tentative de vol qualifié, complicité de tentative de vol qualifié, destruction volontaire de biens mobiliers et immobiliers par l'effet d'un incendie ou par tout autre moyen de nature à créer un danger pour la sécurité des personnes, Y..., à la même peine, pour assassinat, vol qualifié, destructi

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REJET des pourvois formés par :
- X..., Y..., Z..., A... Julien,
contre l'arrêt de la cour d'assises des mineurs de la Haute-Savoie, en date du 16 septembre 1991, qui les a condamnés : X..., à 20 ans de réclusion criminelle pour assassinat, tentative d'assassinat, vol qualifié, tentative de vol qualifié, complicité de tentative de vol qualifié, destruction volontaire de biens mobiliers et immobiliers par l'effet d'un incendie ou par tout autre moyen de nature à créer un danger pour la sécurité des personnes, Y..., à la même peine, pour assassinat, vol qualifié, destruction volontaire de biens mobiliers et immobiliers par l'effet d'un incendie ou par tout autre moyen de nature à créer un danger pour la sécurité des personnes, Z..., à 18 ans de réclusion criminelle pour assassinat, vols qualifiés, destruction volontaire de biens mobiliers et immobiliers par l'effet d'un incendie ou par tout autre moyen de nature à créer un danger pour la sécurité des personnes, A..., à la même peine pour assassinat et vol qualifié.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit commun aux demandeurs ;
Sur le sixième moyen de cassation pris de la violation des articles 285 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble violation des droits de la défense :
" en ce que, par une ordonnance prise le 20 juin 1991, et communiquée aux parties, dont les accusés, après la lecture des cinq arrêts de renvoi, le président de la cour d'assises a décidé la jonction de cinq procédures différentes, et la comparution conjointe des accusés de ces procédures lors du même débat devant la cour d'assises ;
" alors, d'une part, qu'aux termes de l'article 6. 3 b de la Convention européenne précitée, tout accusé doit avoir le temps et les facilités nécessaires à la préparation de sa défense ; que tel n'est pas le cas lorsqu'il apprend au moment de sa comparution devant la cour d'assises et après le commencement des débats, qu'il serait jugé avec d'autres personnes, à raison de faits dans lesquels il n'est en aucun façon impliqué ;
" alors, d'autre part, qu'il n'est pas équitable de joindre en un seul procès différents faits, que ne rattache aucun lien d'indivisibilité, pour la seule raison que certains d'entre eux auraient été commis par certains accusés communs ; que cette façon de procéder, de nature à aggraver la situation de chacun des accusés, artificiellement présenté comme plus ou moins impliqué dans une bande organisée, porte atteinte aux droits de la défense ;
" alors, enfin, que la constatation d'une bonne administration de la justice, fondement de la décision de jonction prise par le président de la cour d'assises, ne peut en rien légitimer l'atteinte aux droits de la défense résultant d'une jonction artificielle qui ne peut qu'aggraver la situation de chaque accusé " ;
Attendu que contrairement à ce qui est allégué au moyen, ce n'est pas au moment de la comparution devant la cour d'assises et après le commencement des débats que A..., Y..., X... et Z... ont eu connaissance de l'ordonnance de jonction rendue le 20 juin 1991 mais, au plus tard, lors de la signification des listes de témoins et d'experts dans les différentes procédures dont le président a prononcé la jonction ; qu'il ressort des pièces de procédure que ces significations ont eu lieu les 27 et 30 juillet 1991, soit près de 2 mois avant l'ouverture de la session des Assises ; que, dès lors, les demandeurs ne sauraient prétendre qu'ils n'ont pas bénéficié du temps et des facilités nécessaires à la préparation de leur défense ; que pas davantage ils ne peuvent soutenir que la jonction a été décidée de manière arbitraire dans le but d'aggraver leur situation en les présentant comme plus ou moins impliqués dans une bande organisée ; que les arrêts de renvoi ayant été rendus contre les mêmes accusés, à l'exclusion de A..., pour des infractions différentes, le président a fait au contraire l'exacte application de l'article 285 du Code de procédure pénale ; qu'ils n'ont soulevé aucune exception de nullité lorsque le jury de jugement a été définitivement constitué ;
Attendu en cet état que c'est vainement que les demandeurs invoquent une violation de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le cinquième moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation de l'article 349 du Code de procédure pénale :
" en ce que la question n° 57 : est-il constant qu'à Rumilly (Haute-Savoie) entre le 12 et le 13 juillet 1988, la mort a été volontairement donnée à M. Georges B..., ainsi qu'à son épouse née Pauline C... ?, ainsi que les questions n° s 60 et 62 portant respectivement sur le point de savoir si A... et Y... étaient coupables de ce meurtre, étaient entachées de complexité pour interroger la Cour et le jury en une seule fois sur deux homicides distincts, que ne réunissait pas un lien d'indivisibilité " ;
Attendu que A... et Y... ont été renvoyés devant la cour d'assises pour avoir volontairement donné la mort aux époux B... qu'ils avaient surpris dans leur sommeil à leur domicile ; que l'arrêt de renvoi énonce que A... frappait les victimes à coups de gourdin tandis que Y... éclairait la scène avec une lampe de poche ;
Que sur cette accusation ont été posées la question n° 57 exactement reproduite au moyen et les questions n° s 60 et 62 interrogeant la Cour et le jury sur le point de savoir si A... et Y... se sont rendus coupables des faits spécifiés à la question n° 57 ;
Que la Cour et le jury ayant répondu affirmativement aux trois questions, A... et Y... ont été déclarés coupables d'homicide volontaire et condamnés de ce chef ;
Attendu que les questions, telles qu'elles ont été posées, n'encourent pas les griefs allégués ;
Que, quel que fût le nombre de victimes, les crimes dont A... et Y... ont été accusés procédaient, pour chacun d'entre eux, d'un acte unique et indivisible accompli par les mêmes moyens dans les mêmes circonstances de temps et de lieu, inspiré par une même pensée homicide et devant entraîner les mêmes conséquences pénales ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation des articles 20 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945, 349 et 356 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense :
" en ce que, pour chacun des accusés X..., Z... et Y..., mineurs au moment des faits, la question de savoir s'il y avait lieu de l'exclure du bénéfice de l'excuse atténuante de minorité a été posée (et résolue affirmativement) après la question relative aux circonstances atténuantes ;
" alors que la question relative aux circonstances atténuantes doit être posée en dernier " ;
Attendu que la délibération de la Cour et du jury étant secrète, il n'y a pas lieu de rechercher dans quel ordre les questions ont été examinées ;
Qu'au demeurant, lorsqu'il est, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, répondu négativement à la question demandant s'il y a lieu d'exclure un accusé du bénéfice de l'excuse atténuante de minorité, la peine doit être calculée en appliquant d'abord, le cas échéant, les circonstances atténuantes et ensuite l'excuse de minorité ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation de l'article 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt pénal porte condamnation de X..., Z... et Y... du chef d'assassinat sur la personne de M. D..., crime qui serait concomitant d'un vol aggravé commis au préjudice de ce dernier ;
" alors que, si la Cour et le jury ont répondu affirmativement à la question (n° 34) posée abstraitement de la concomitance entre ces deux crimes, aucune question sur le point de savoir si les accusés seraient chacun coupable d'un assassinat concomitant d'un vol qualifié n'a été posée ; qu'aucune déclaration de culpabilité sur la circonstance de concomitance n'est intervenue, et que l'arrêt pénal se trouve ainsi en contradiction flagrante avec les réponses aux questions " ;
Et sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation de l'article 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt pénal porte condamnation de A... et Y... du chef d'homicide volontaire sur les personnes de M. Georges B... et de son épouse Mme Pauline C..., homicides qui seraient concomitants d'un vol aggravé commis au préjudice de ces derniers " ;
" alors, que si la Cour et le jury ont répondu affirmativement à la question (n° 58) posée abstraitement de la concomitance entre ces deux crimes, aucune question sur le point de savoir si les accusés seraient chacun coupable de meurtres concomitants d'un vol qualifié n'a été posée ; qu'aucune déclaration de culpabilité sur la circonstance de concomitance n'est intervenue et que l'arrêt pénal se trouve ainsi en contradiction flagrante avec les réponses aux questions " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que la Cour et le jury ont répondu affirmativement aux questions nos 37, 38, 41, 42, 43 et 44 qui les interrogeaient sur le point de savoir si X..., Z... et Y... se sont rendus coupables, d'une part, d'un assassinat sur la personne de Marcel D... et, d'autre part, d'un vol qualifié commis à son préjudice ; qu'ils ont aussi résolu par l'affirmative les questions nos 59 et 60 déclarant A... coupable d'homicide volontaire sur la personne des époux B... et de vol qualifié commis à leur préjudice et la question n° 61 déclarant Y... coupable d'homicide volontaire seulement ;
Attendu que dans les deux affaires, la question de concomitance a été posée in abstracto et résolue par l'affirmative ; qu'il n'importe, dès lors, qu'aucune question n'ait été posée sur le point de savoir si les accusés s'étaient rendus coupables d'un assassinat ou d'un homicide volontaire concomitant d'un vol qualifié ;
Qu'en effet, les circonstances aggravantes d'un crime, lorsqu'elles ont été régulièrement constatées, étendent de droit leurs conséquences à tous les auteurs ; que par suite la référence à un fait principal dans une question relative à la culpabilité d'un accusé, implique nécessairement ce fait principal avec les circonstances aggravantes retenues par la Cour et le jury ; qu'il ne saurait être admis d'exception que pour les circonstances aggravantes morales ou personnelles ;
D'où il suit que l'arrêt pénal condamnant les demandeurs pour assassinat ou homicide volontaire concomitant d'un vol qualifié, se trouve en concordance avec les réponses aux questions posées et que les moyens ne sont pas fondés ;
Sur le mémoire proposant un moyen additionnel :
Attendu que le mémoire a été produit après expiration du délai imparti et postérieurement au dépôt du rapport par le conseiller commis ; qu'il y a lieu, conformément aux dispositions de l'article 590, alinéa 3, du Code de procédure pénale, de le déclarer irrecevable ;
Et attendu que la procédure est régulière et que les peines ont été légalement appliquées aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;
REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 92-80726
Date de la décision : 28/10/1992
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° COUR D'ASSISES - Procédure antérieure aux débats - Jonction - Jonction antérieure à la signification des listes de témoins ou d'experts - Convention européenne des droits de l'homme - Articles 6 - 1 et 6 - 3 b - Violation (non).

1° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 - Droit de l'accusé à disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense - Cour d'assises - Procédure antérieure aux débats - Jonction - Jonction antérieure à la signification des listes de témoins ou d'experts 1° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 - Droit de toute personne à ce que sa cause soit entendue équitablement - publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial - Cour d'assises - Procédure antérieure aux débats - Jonction - Jonction antérieure à la signification des listes de témoins ou d'experts.

1° N'est contraire ni aux dispositions de l'article 6.1 ni à celles de l'article 6.3 b de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales l'ordonnance de jonction rendue par le président de la cour d'assises en exécution de l'article 285 du Code de procédure pénale, dès lors que les procédures jointes concernaient des faits différents commis par les mêmes accusés et que ceux-ci ont eu connaissance de l'ordonnance au plus tard lors de la signification des listes de témoins ou d'experts dans les différentes procédures dont le président a prononcé la jonction

2° COUR D'ASSISES - Questions - Complexité - Homicide volontaire - Pluralité de victimes.

2° N'est pas entachée de complexité la question qui interroge la Cour et le jury sur deux homicides volontaires procédant, pour chacun d'entre eux, d'un acte unique et indivisible accompli par les mêmes moyens, dans les mêmes circonstances de temps et de lieu, inspiré par la même pensée homicide et devant entraîner les mêmes conséquences pénales (1).

3° MINEUR - Excuse de minorité - Circonstances atténuantes - Concours.

3° EXCUSES - Excuse de minorité - Circonstances atténuantes - Concours.

3° Quel que soit l'ordre dans lequel les questions ont pu être posées, ce qu'au demeurant le secret du délibéré interdit de rechercher, l'atténuation de peine dérivant de la minorité de l'accusé, si celui-ci n'a pas été exclu de cette excuse, a pour base la détermination préalable de la peine par lui encourue, compte tenu éventuellement des circonstances atténuantes, indépendamment de la qualité de mineur (2).

4° COUR D'ASSISES - Questions - Circonstances aggravantes - Concomitance - Meurtre - Réponse affirmative à une question posée in abstracto demandant si un homicide volontaire a été précédé - accompagné ou suivi d'un vol qualifié - Effet.

4° HOMICIDE VOLONTAIRE - Circonstances aggravantes - Concomitance - Caractère matériel.

4° La concomitance définie par l'article 304 du Code pénal est une circonstance aggravante matérielle et, par suite, étend de droit ses conséquences à tout auteur du meurtre qui a précédé, accompagné ou suivi un autre crime. L'accusé déclaré coupable du crime spécifié dans les questions posées dans une forme abstraite devient par là même passible de l'aggravation de peine (3).

5° CASSATION - Pourvoi - Mémoire - Production - Délai - Mémoire additionnel.

5° La Cour de Cassation peut, aux termes de l'article 590, alinéa 3, du Code de procédure pénale, déclarer irrecevable un mémoire additionnel produit après l'expiration du délai imparti et postérieurement au dépôt du rapport du conseiller commis (4).


Références :

Code de procédure pénale 285
Code de procédure pénale 349
Code de procédure pénale 349, 356
Code de procédure pénale 590 al. 3
Code de procédure pénale 593
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 6
Ordonnance 45-174 du 02 février 1945 art. 20

Décision attaquée : Cour d'assises des mineurs de la Haute-Savoie, 16 septembre 1991

CONFER : (2°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1894-01-25 , Bulletin criminel 1894, n° 22, p. 33 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1959-08-22 , Bulletin criminel 1959, n° 395, p. 776 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1960-05-31 , Bulletin criminel 1960, n° 306, p. 625 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1978-05-31 , Bulletin criminel 1978, n° 177, p. 444 (cassation). CONFER : (3°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1985-11-27 , Bulletin criminel 1985, n° 384, p. 986 (rejet), et les arrêts cités. CONFER : (4°). (3) Cf. Chambre criminelle, 1973-01-05 , Bulletin criminel 1973, n° 8, p. 19 (rejet), et les arrêts cités. CONFER : (5°). (4) Cf. Chambre criminelle, 1969-02-12 , Bulletin criminel 1969, n° 74, p. 182 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1977-11-09 , Bulletin criminel 1977, n° 340, p. 866 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 28 oct. 1992, pourvoi n°92-80726, Bull. crim. criminel 1992 N° 347 p. 956
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1992 N° 347 p. 956

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Malibert, conseiller le plus ancien faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Amiel
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Guilloux
Avocat(s) : Avocat :la SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:92.80726
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