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20/10/1992 | FRANCE | N°89-18523

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 20 octobre 1992, 89-18523


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Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après la mise en redressement judiciaire de la société Stéphane Gontard (la société) prononcée par un jugement du 23 mai 1986, l'Union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Grenoble (l'URSSAF) a demandé le paiement, sur le fondement de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985, des cotisations et majorations de retard afférentes tant aux salaires de la période du 1er au 23 mai 1986, réglés le 12 juin 1986, qu'aux indemnités de préavis et de congés payés versées aux salariés licen

ciés le 11 juillet 1986 ; que la cour d'appel, après avoir relevé que la li...

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Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après la mise en redressement judiciaire de la société Stéphane Gontard (la société) prononcée par un jugement du 23 mai 1986, l'Union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Grenoble (l'URSSAF) a demandé le paiement, sur le fondement de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985, des cotisations et majorations de retard afférentes tant aux salaires de la période du 1er au 23 mai 1986, réglés le 12 juin 1986, qu'aux indemnités de préavis et de congés payés versées aux salariés licenciés le 11 juillet 1986 ; que la cour d'appel, après avoir relevé que la liste des créances mentionnées à l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985 non encore payées n'avait pas été déposée au greffe par l'administrateur dans le délai de 2 mois à compter de l'expiration de la période d'observation, a déclaré la demande recevable et a dit que la société était tenue de payer les sommes réclamées par l'URSSAF ;

Sur le premier moyen en tant qu'il concerne les cotisations et majorations de retard afférentes aux indemnités de préavis et de congés payés :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que la créance de l'URSSAF relative à ces indemnités relevait des dispositions de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985 aux motifs, selon le pourvoi, que le fait générateur de la créance est le versement effectif des rémunérations et non la prestation de travail et que le versement effectif ayant eu lieu postérieurement au jugement déclaratif autorisant la poursuite de l'activité, la créance de l'URSSAF doit être payée à son échéance, l'activité s'étant poursuivie, alors qu'il résulte de la combinaison des articles 40 et 50 de la loi du 25 janvier 1985 que seules les créances qui ont leur origine postérieurement au jugement d'ouverture sont payées à leur échéance lorsque l'activité est poursuivie, celles dont l'origine est antérieure devant être déclarées ; que par ailleurs, le fait générateur des cotisations sociales se trouve dans le travail fourni et non dans le paiement des salaires, lequel n'est qu'une condition de leur exigibilité ; qu'en l'espèce, la cour d'appel reconnaît que les salaires et indemnités salariales versées postérieurement au jugement déclaratif sont considérés comme se rapportant à des contrats de travail dont l'origine était antérieure à l'ouverture de la procédure ; qu'elle constate, par ailleurs, que les cotisations réclamées sont afférentes à des salaires dus pour la période antérieure au jugement déclaratif ; qu'en ne tirant pas de ses propres constatations la conséquence légale qui en découlait nécessairement, à savoir que la créance invoquée par l'URSSAF trouvait sa source dans un acte antérieur au jugement déclaratif et devait comme telle être déclarée, la cour d'appel a violé les articles susvisés ;

Mais attendu que la créance relative aux indemnités de préavis et de congés payés dues à la suite des licenciements prononcés durant la période d'observation étant née régulièrement après le jugement d'ouverture du redressement judiciaire, la créance de l'URSSAF au titre des cotisations et majorations de retard se rapportant à ces indemnités entrait dans les prévisions de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985 ; que par ce motif de pur droit, substitué à celui, erroné, énoncé par la cour d'appel, l'arrêt se trouve justifié ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le second moyen, en tant qu'il concerne les cotisations et majorations de retard afférentes aux indemnités de préavis et de congés payés :

Attendu que la société reproche encore à l'arrêt d'avoir déclaré directement recevable la demande en paiement de l'URSSAF, alors, selon le pourvoi que, pour les créances nées postérieurement au jugement déclaratif, si l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985 pose le principe de leur paiement à l'échéance lorsque l'activité est poursuivie, c'est l'article 61, alinéa 3, du décret du 27 décembre 1985 qui règle la procédure à suivre par le créancier non payé ; qu'aux termes de ce texte, celui-ci, après avoir pris connaissance de la liste des créances visées à l'article 40 de la loi peut la contester, dans un délai précisé devant le tribunal du redressement judiciaire ; qu'il en résulte qu'aucun paiement ne peut être directement exigé concernant des créances nées postérieurement au jugement déclaratif et non payées à leur échéance si, non inscrites sur la liste, elles n'ont pas fait l'objet d'une contestation par leur titulaire ; qu'en conséquence, en admettant la demande en paiement direct de l'URSSAF, sans sanctionner le non-respect de la procédure précisément prévue pour les créances visées par cette demande, la cour d'appel a violé les articles 40 de la loi du 25 janvier 1985 et 61 du décret du 27 décembre 1985 ;

Mais attendu que les dispositions de l'article 61 du décret du 27 décembre 1985, dans sa rédaction applicable en la cause, n'interdisaient pas à l'URSSAF, pour sa créance née régulièrement après le jugement d'ouverture du redressement judiciaire, d'exercer son droit de poursuite individuelle, dès lors que cette créance n'avait pas été payée à l'échéance et que c'est donc à bon droit que sa demande a été déclarée recevable ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen en tant qu'il concerne les cotisations et majorations de retard afférentes aux salaires de la période du 1er au 23 mai 1986 :

Vu les articles 40 et 47, alinéa 1er, de la loi du 25 janvier 1985 ;

Attendu que pour accueillir la demande en paiement de l'URSSAF, l'arrêt retient que le fait générateur des cotisations de sécurité sociale est constitué par le versement effectif des salaires et que ce versement ayant eu lieu, en l'espèce, après le jugement d'ouverture de la procédure collective, la créance de cotisations devait être payée à son échéance ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que les cotisations dont le paiement était poursuivi se rapportaient à des salaires perçus pour une période de travail antérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective, ce dont il résultait que la créance de l'URSSAF avait son origine antérieurement à ce jugement, peu important l'époque à laquelle ces salaires avaient été payés, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu'il y a lieu de faire application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile en appliquant la règle de droit appropriée ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que la société Stéphane Gontard devait payer à l'URSSAF le montant des cotisations de sécurité sociale et majorations de retard afférentes aux salaires de la période du 1er au 23 mai 1986, l'arrêt rendu le 20 juin 1989, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

DEBOUTE l'URSSAF de sa demande en paiement relative aux cotisations et majorations de retard afférentes aux salaires de la période du 1er au 23 mai 1986


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 89-18523
Date de la décision : 20/10/1992
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement judiciaire - Créanciers de la procédure - Sécurité sociale - Cotisations - Indemnités de congés payés et de préavis - Licenciements prononcés durant la période d'observation.

1° La créance de cotisations sociales et de majorations de retard due au titre des indemnités versées à la suite des licenciements prononcés durant la période d'observation ouverte par le jugement de redressement judiciaire entre dans les prévisions de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985.

2° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement judiciaire - Créanciers de la procédure - Action individuelle - Créance non payée à l'échéance - Liste des créances - Contestation préalable - Nécessité (non).

2° Sous l'empire de l'article 61 du décret du 27 décembre 1985, dans sa rédaction antérieure au décret du 29 mai 1989, le créancier dont la créance est née régulièrement après l'ouverture du redressement judiciaire peut exercer directement son droit de poursuite individuelle s'il n'est pas payé à l'échéance de celle-ci et n'est pas tenu de contester au préalable l'établissement de la liste, prévue à l'article 61 précité, des créances mentionnées à l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985 qui n'ont pas été payées.

3° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement judiciaire - Créanciers du débiteur - Sécurité sociale - Cotisations - Salaires payés postérieurement au jugement d'ouverture - Période de travail antérieure.

3° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement et liquidation judiciaires - Créances - Déclaration - Créance née avant l'ouverture de la procédure collective - Cotisations de sécurité sociale - Salaires payés postérieurement au jugement d'ouverture - Période de travail antérieure.

3° La créance de cotisations et de majorations de retard se rapportant à des salaires perçus pour une période de travail antérieure au jugement d'ouverture du redressement judiciaire a son origine antérieurement à ce jugement, même si ces salaires ont été payés postérieurement et n'entre pas, dès lors, dans les prévisions de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 20 juin 1989

A RAPPROCHER : (1°). (3°). Chambre commerciale, 1990-05-02 , Bulletin 1990, IV, n° 127, p. 85 (cassation) ; Chambre commerciale, 1990-05-02 , Bulletin 1990, IV, n° 130, p. 87 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 20 oct. 1992, pourvoi n°89-18523, Bull. civ. 1992 IV N° 318 p. 226
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1992 IV N° 318 p. 226

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Bézard
Avocat général : Avocat général :Mme Le Foyer de Costil
Rapporteur ?: Rapporteur :Mme Pasturel
Avocat(s) : Avocats :la SCP Urtin-Petit et Rousseau-Van Troeyen, la SCP Rouvière, Lepître et Boutet.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:89.18523
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