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Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 9 février 1989), que M. Y... a été engagé par la société Auguste Thouard le 2 avril 1986 en qualité d'expert en évaluation ; que le contrat de travail stipulait une période d'essai de 3 mois renouvelable une fois et une rémunération mensuelle brute de 20 000 francs durant les trois premiers mois, puis, à compter du quatrième mois, de 40 % des honoraires encaissés pour les travaux du salarié ; que les parties sont convenues de proroger de 3 mois la période d'essai qui expirait initialement le 27 octobre 1986 ; que, le 26 janvier 1987, la société Auguste Thouard notifiait à M. Y... la cessation des relations contractuelles au motif que ses méthodes de travail ne correspondaient pas à celles utilisées par la société ; qu'ayant appris la suppression de son poste, le salarié a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société Auguste Thouard fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à M. Y... une somme à titre de dommages-intérêts et une autre à titre de rappels de salaires et d'indemnités de congés payés et de préavis, alors, selon le moyen, qu'en convenant expressément, à l'expiration de la période d'essai de 3 mois, de la renouveler " aux conditions de l'essai initial " durant lequel M. Y... n'avait perçu qu'une rémunération fixe de 20 000 francs par mois, la société Auguste Thouard, qui s'est bornée à maintenir cette même rémunération, et M. Y..., qui n'a élevé aucune contestation, ont écarté, par là même, les stipulations antérieures au contrat de travail prévoyant à partir du quatrième mois de présence une rémunération au pourcentage du chiffre d'affaires ; qu'en refusant dès lors d'appliquer la lettre modificative du 24 octobre 1986, aux motifs que le contrat du 2 avril 1986 avait limité le " fixe " aux trois premiers mois et que la rémunération de M. Y... avait été placée dans ses bulletins de salaires à la rubrique " commissions " bien qu'elle ait constaté qu'aucune commission n'a jamais été versée, la cour d'appel a dénaturé la lettre du 24 octobre 1986 et, partant, violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'après avoir rappelé que le contrat de travail prévoyait, sans qu'aucune relation ne soit faite avec la période d'essai et son renouvellement, que le salarié bénéficierait d'une rémunération fixe mensuelle durant les trois premiers mois de sa présence dans l'entreprise et qu'à compter du quatrième mois ladite rémunération correspondrait à 40 % des honoraires encaissés sur ses travaux, c'est sans dénaturer les termes de l'accord du 24 octobre 1986 prolongeant la période d'essai de 3 mois aux conditions prévues par l'essai initial que la cour d'appel a décidé que le salarié devait être rémunéré à compter du quatrième mois non sur la base d'un fixe, mais en fonction du chiffre d'affaires réalisé ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article L. 122-4 du Code du travail ;
Attendu que, pour condamner l'employeur à payer au salarié une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive de la période d'essai, la cour d'appel énonce que le poste de M. Y... a été effectivement supprimé en 1987 ; que l'appelante ne démontre pas que la mutation de M. X... ait été motivée par la nécessité de le remplacer ; qu'il est donc établi que le motif de la rupture est étranger à la finalité de la période d'essai et que, dans ces conditions, le conseil de prud'hommes a décidé à bon droit que l'employeur avait agi abusivement et avec une légèreté blâmable ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le fait de ne pas avoir remplacé un salarié dont l'employeur a mis fin à la période d'essai n'est pas à lui seul constitutif d'un abus de l'exercice du droit de tout employeur de mettre fin à l'essai, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Auguste Thouard à payer à M. Y... la somme de 200 000 francs à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive, l'arrêt rendu le 9 février 1989, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes