REJET du pourvoi formé par :
- X... Michel,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux, chambre correctionnelle, du 24 septembre 1991, qui, pour exercice illégal de l'art dentaire et publicité de nature à induire en erreur, l'a condamné à 50 000 francs d'amende et à des réparations civiles.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 592 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué mentionne, d'une part, que les débats se sont déroulés le 2 juillet 1991 devant la Cour composée de M. Leportier, président, Mme Edoux de Lafont et M. Boulet, conseillers, et, d'autre part, que l'arrêt a été rendu le 24 septembre 1991 par la Cour composée de M. Bizot, président, Mme Edoux de Lafont et M. Boulet, conseillers ;
" alors qu'aux termes de l'article 592 du Code de procédure pénale, sont déclarées nulles les décisions rendues par des juges qui n'ont pas assisté à toutes les audiences de la cause et qu'en l'espèce, M. Bizot, qui a concouru à l'arrêt attaqué, n'ayant pas assisté aux débats, cet arrêt est entaché de nullité " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que, lors des débats qui se sont déroulés le 2 juillet 1991 et lors du délibéré, la cour d'appel était composée de M. Leportier, président, et de Mme Edoux de Lafont et M. Boulet, conseillers ; qu'à l'audience du 24 septembre 1991, à laquelle l'arrêt a été rendu, ladite cour d'appel était composée de M. Bizot, président et de Mme Edoux de Lafont et M. Boulet, conseillers ;
Attendu que l'arrêt précise en outre que la minute a été signée par Mme Edoux de Lafont, conseiller ;
Attendu qu'il se déduit de ces mentions que M. Leportier, président, étant empêché, l'arrêt a été lu à l'audience par Mme Edoux de Lafont conformément aux prescriptions de l'article 486, alinéa 3, du Code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des principes de l'applicabilité directe du droit communautaire et de sa primauté sur le droit national, violation des articles 177 du traité de Rome et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement entrepris sur le rejet de l'exception d'irrecevabilité fondée sur l'article 85.1 du traité de Rome et de la demande de sursis à statuer en vue de poser une question préjudicielle en interprétation à la Cour de justice des Communautés européennes ;
" aux motifs adoptés des premiers juges que les poursuites engagées le sont sur la base de textes de droit français s'appliquant à des ressortissants français agissant sur le territoire national et que l'action civile, selon l'article 2 du Code de procédure pénale, appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l'infraction ;
" 1°) alors que tout ressortissant de la Communauté économique européenne peut invoquer l'application du traité de Rome en vertu des principes de l'applicabilité directe du droit communautaire et de sa primauté sur le droit national et qu'en l'espèce, X... pouvait donc parfaitement invoquer l'article 85.1 du traité de Rome pour contester la recevabilité de la plainte avec constitution de partie civile des organismes professionnels poursuivants ;
" 2°) alors qu'en s'abstenant d'examiner ce moyen d'irrecevabilité tiré de l'article 85.1 du traité de Rome, la Cour a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions " ;
Attendu que Michel X..., qui était poursuivi pour exercice illégal de l'art dentaire et publicité de nature à induire en erreur, a soutenu que l'interdiction faite aux prothésistes dentaires de vendre directement des prothèses à leurs clients, de même que les ententes existant entre l'Ordre des chirurgiens-dentistes et les diverses organisations professionnelles, étaient contraires au droit communautaire et a demandé que la Cour de justice des Communautés fût saisie d'une demande d'interprétation du Traité instituant la Communauté économique européenne ;
Attendu que, pour rejeter cette demande, la juridiction du second degré retient, par motifs adoptés des premiers juges, que les poursuites ont été engagées sur le fondement de textes de droit interne s'appliquant à des ressortissants français agissant sur le territoire national ;
Attendu qu'abstraction faite du motif erroné mais surabondant justement critiqué par le demandeur, la cour d'appel n'a pas encouru le grief allégué ;
Qu'en effet, d'une part, selon l'article 177 du Traité, les juges d'appel dont la décision est susceptible d'un recours juridictionnel de droit interne, ne sont pas tenus de saisir la Cour de justice d'une demande en interprétation et de surseoir à statuer ;
Que, d'autre part, selon l'article 36 du Traité, les dispositions des articles 30 à 34 relatives aux restrictions quantitatives et aux mesures d'effet équivalent ne font pas obstacle aux interdictions ou restrictions justifiées par des raisons de protection de la santé et de la vie des personnes, à moins qu'elles ne constituent une restriction déguisée dans le commerce entre les Etats membres, ce qui n'a pas été allégué en l'espèce ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.