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10/06/1992 | FRANCE | N°90-86666

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 juin 1992, 90-86666


CASSATION PARTIELLE sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- l'administration des Impôts, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Agen, chambre correctionnelle, en date du 11 octobre 1990, qui, dans les poursuites exercées contre Robert X... du chef de fraude fiscale, l'a déboutée de ses demandes après relaxe du prévenu.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 1741 du Code général des impôts, 591 et 593 du Code de procédure pénale, du principe de l'autonomie de l'a

ction publique et des procédures visant à l'établissement de l'impôt, défaut ...

CASSATION PARTIELLE sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- l'administration des Impôts, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Agen, chambre correctionnelle, en date du 11 octobre 1990, qui, dans les poursuites exercées contre Robert X... du chef de fraude fiscale, l'a déboutée de ses demandes après relaxe du prévenu.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 1741 du Code général des impôts, 591 et 593 du Code de procédure pénale, du principe de l'autonomie de l'action publique et des procédures visant à l'établissement de l'impôt, défaut de motif :
" en ce que l'arrêt attaqué a relaxé X... du chef d'omission de déclaration des revenus encaissés en 1983 et 1984 en vue de l'établissement d'un impôt sur le revenu ;
" aux motifs que X... reconnaît bien avoir résidé en France en 1983 et 1984, qu'il a admis passer plus de la moitié de l'année dans sa résidence du Lot, que les oeuvres dont la diffusion a procuré un revenu à X... ont certainement été conçues et rédigées majoritairement en France ; que néanmoins, aux termes de l'article 11 de la Convention franco-américaine du 28 juillet 1967, dans sa rédaction issue de l'avenant du 24 novembre 1978, sont exonérés d'impôt les revenus dont bénéficie un résident français ayant la nationalité des Etats-Unis, dès lors que ses revenus répondent aux conditions de l'article 14 de l'avenant, du moment que les services sont rendus aux Etats-Unis ; qu'en l'espèce, X... justifiait par la production des contrats passés à l'époque avec ses éditeurs, que ces conventions ont été passées aux Etats-Unis et que les oeuvres produites ont été éditées et rémunérées dans ce pays dans une proportion extrêmement importante ; que l'Administration ne conteste pas, par ailleurs, que X... faisait de fréquents voyages dans son pays d'origine pour régler ses affaires ; qu'il n'est pas davantage établi que les versements figurant au crédit des comptes bancaires français de X... provenaient de source autre que ses propres comptes aux Etats-Unis ; qu'il doit dès lors être relaxé du chef de fraude fiscale ;
" alors que, d'une part, aux termes des articles 4 B et 170.1 du Code général des impôts, la personne qui a son domicile fiscal en France, pour y avoir établi son foyer ou le lieu de son séjour principal, son activité professionnelle principale, ou encore le centre de ses intérêts économiques, est tenue de porter ses revenus à la connaissance de l'Administration, ne serait-ce que pour permettre à celle-ci d'exercer son contrôle ; qu'en statuant comme ils l'ont fait, bien que leurs propres constatations fassent ressortir que X... avait établi en France son foyer ou le lieu de son séjour principal, et qu'il y exerçait son activité professionnelle principale, les juges du fond ont violé les textes susvisés ;
" et alors que, d'autre part, en application de l'article 170.4 du Code général des impôts, qui a été violé, la personne qui est assujettie au dépôt d'une déclaration de revenus doit porter à la connaissance de l'Administration les sommes qu'elle a encaissées, alors même qu'elle pourrait être exonérée d'impôt en vertu d'une convention de double imposition, ne serait-ce que pour permettre à l'Administration de vérifier les conditions de l'exonération " ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 1741 du Code général des impôts, droit de la Convention franco-américaine du 28 juillet 1967, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif :
" en ce que l'arrêt attaqué a relaxé X... du chef d'omission de déclaration des revenus encaissés en 1983 et 1984 en vue de l'établissement d'un impôt sur le revenu ;
" aux motifs que X... a passé presque intégralement les années 1983 et 1984 sur le territoire français, qu'il paraît avoir résidé à cette époque dans une propriété à Besse-Martel (Lot) avec une concubine ; qu'il a reconnu expressément qu'en 1983 et 1984 il avait à Besse dans le Lot une résidence où il passait plus de la moitié de l'année, soit plus de 183 jours ; que citoyen des Etats-Unis, il ne justifie pas d'une résidence principale aux Etats-Unis, et doit donc être considéré comme résident au sens de l'article 3-3 de la Convention franco-américaine du 28 juillet 1967 ; que néanmoins, X... peut se prévaloir des articles 11 et 14 de la Convention franco-américaine du 28 juillet 1967, dans sa rédaction issue de l'avenant du 24 novembre 1978, prévoyant l'exonération de certains revenus au profit des résidents français ;
" alors que, d'une part, à supposer que la Convention du 28 juillet 1967 puisse être invoquée s'agissant de savoir si une personne est tenue ou non de déposer une déclaration, les juges du fond n'ont pas tiré les conséquences légales de leurs propres constatations dès lors qu'ils ont expressément admis qu'au regard de la Convention franco-américaine du 28 juillet 1967, X... devait être regardé comme résident en France ;
" et alors que, d'autre part, les dispositions des articles 11 et 14 de la Convention franco-américaine du 28 juillet 1967, modifiée par l'avenant du 24 novembre 1978, ne pouvaient en aucune façon être invoquées s'agissant du point de savoir si X... était ou non tenu de déposer une déclaration de revenus " ;
Les moyens étant réunis ;
Vu les articles cités, ensemble l'article 170.4 du Code général des impôts ;
Attendu que selon l'article 170.4 du Code général des impôts, le contribuable est tenu de déclarer, parmi les éléments du revenu global, ceux qui, en vertu d'une convention internationale relative aux doubles impositions, sont susceptibles d'être exonérés mais doivent être pris en compte pour le calcul de l'impôt applicable aux autres éléments du revenu global ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que Robert X..., ressortissant américain, a été poursuivi pour s'être en France, au cours des exercices 1983 et 1984, frauduleusement soustrait à l'établissement et au paiement de l'impôt sur le revenu, en omettant de faire des déclarations dans les délais prescrits et en dissimulant partie des sommes sujettes à l'impôt ;
Attendu que, pour relaxer le prévenu de ce chef, la cour d'appel, après avoir constaté, au vu des éléments de l'espèce par elle analysés, que Robert X... devait être considéré comme résident français au sens de la Convention franco-américaine en matière d'impôt sur le revenu et la fortune du 28 juillet 1967 modifiée, retient, par application des dispositions combinées des articles 14 et 15 de ladite Convention et 11 de l'avenant du 24 novembre 1978, que les revenus tirés de l'activité d'écrivain exercée aux Etats-Unis par le prévenu sont exonérés de toute imposition en France ; que les juges en concluent que ni le ministère public ni l'administration des Impôts ne rapportent la preuve de la réalité de l'infraction poursuivie ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Agen, en date du 11 octobre 1990, mais en ses seules dispositions civiles, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et attendu qu'en l'absence de pourvoi du ministère public aucune condamnation pénale ne pouvant être prononcée, il ne peut être fait droit aux demandes de l'administration des Impôts fondées notamment sur l'article L. 272 du Livre des procédures fiscales ; qu'il ne reste donc rien à juger ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 90-86666
Date de la décision : 10/06/1992
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Impôts directs et taxes assimilées - Fraude fiscale - Eléments constitutifs - Elément légal - Non-déclaration de revenus - Convention internationale relative aux doubles impositions - Obligations du contribuable

Selon l'article 170.4 du Code général des impôts, le contribuable est tenu de déclarer, parmi les éléments du revenu global, ceux qui, en vertu d'une convention internationale relative aux doubles impositions, sont susceptibles d'être exonérés mais doivent être pris en compte pour le calcul de l'impôt applicable aux autres éléments de ce revenu global. Méconnaît les dispositions de ce texte une cour d'appel qui, pour relaxer un contribuable prévenu d'omission de déclaration dans les délais prescrits et de dissimulation de sommes sujettes à l'impôt, se borne à retenir, par application des dispositions de la Convention franco-américaine en matière d'impôt sur le revenu et la fortune du 28 juillet 1967 modifiée, que les revenus tirés de l'activité d'écrivain exercée aux Etats-Unis par le prévenu, résident français, sont exonérés de toute imposition en France (1).


Références :

CGI 170
Convention franco-américaine en matière d'impôt sur le revenu et la fortune du 28 juillet 1967

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen (chambre correctionnelle), 11 octobre 1990

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1989-03-29 , Bulletin crim 1989, n° 153, p. 397 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 jui. 1992, pourvoi n°90-86666, Bull. crim. criminel 1992 N° 224 p. 622
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1992 N° 224 p. 622

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général :M. Perfetti
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Bayet
Avocat(s) : Avocats :M. Foussard, la SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:90.86666
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