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Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société CISO a été déclarée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Paris du 2 avril 1986 ; que, le 9 juin 1986, le Tribunal a arrêté le plan de redressement de cette société, comportant la cession des éléments du fonds de commerce de l'une des deux usines dont elle était propriétaire au profit de la Société nouvelle Baudou ; que des salariés ont été licenciés par l'administration, pour motif économique, le 11 juin 1986, avec dispense de préavis ; que dix-neuf d'entre deux, embauchés quelques mois plus tard par la Société nouvelle Baudou, conformément à ce qui était prévu dans le plan de redressement, ont, à la suite du refus du GARP de payer leurs indemnités de rupture, saisi le conseil de prud'hommes de Libourne de demandes tendant au versement des indemnités de rupture par la société CISO ; que, par jugement du 27 janvier 1987, le conseil de prud'hommes a jugé leurs demandes irrecevables, au motif que leur contrat de travail avait été repris par la Société nouvelle Baudou, de sorte qu'ils ne pouvaient agir contre la société CISO et ses représentants ; que la société Baudou ayant formé tierce opposition, le conseil de prud'hommes l'a, par jugement du 16 décembre 1988, déboutée de cette demande ; que MM. X..., Y... et Z... ont alors engagé à l'encontre de la Société nouvelle Baudou une procédure tendant à voir reconnaître le bénéfice de l'ancienneté acquise par eux au sein de la société CISO jusqu'au 15 juin 1986, date de leur licenciement par cette société, ainsi qu'au paiement de congés payés et de primes ; que par jugement du 16 décembre 1988, le conseil de prud'hommes de Libourne a jugé que les demandeurs pouvaient bénéficier de l'ancienneté acquise par eux au sein de la la société CISO, mais les a déboutés de leurs demandes au titre d'indemnités de congés payés et primes dues pour la période du 1er janvier au 30 juin 1986 ;
Attendu que la Société nouvelle Baudou reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que les contrats de travail des salariés licenciés par l'administrateur de la société CISO, en redressement judiciaire, avaient subsisté avec la Société nouvelle Baudou, ayant repris l'exploitation d'une usine de la société Baudou, alors que l'application de l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail implique que le contrat de travail s'est poursuivi sans solution de continuité au service du nouvel employeur ; que tel n'est pas le cas des contrats de travail conclus par lui avec des salariés de l'entreprise cédée, licenciés pour motif économique en exécution du plan de redressement de cette entreprise, arrêté par le tribunal de commerce ; que si ces salariés sont ultérieurement embauchés par le nouvel exploitant après que le licenciement ainsi prononcé a produit ses effets, ils bénéficient d'un nouveau contrat de travail et non de la poursuite du précédent, définitivement rompu ; qu'en l'espèce, les trois salariés de la société CISO, licenciés le 11 juin 1986, et embauchés par la Société nouvelle Baudou le 8 septembre 1986, soit plusieurs semaines après l'expiration du préavis, l'ont été en vertu de nouveaux contrats de travail, même s'ils ont exécuté le même travail au sein de la société cessionnaire dont l'activité était
analogue à celle du cédant ; qu'en refusant de tenir compte des licenciement intervenus, comme de l'interruption temporaire d'activité desdits salariés, l'arrêt, qui a considéré que les contrats de travail des salariés embauchés en septembre 1986 par la Société nouvelle Baudou étaient la suite des contrats antérieurs, a violé, ce faisant, les articles L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail et 62 et suivants de la loi n° 85.98 du 25 janvier 1985 ;
Mais attendu que la cour d'appel, ayant fait ressortir qu'il y avait eu transfert d'une entité économique conservant son identité dont l'activité avait été poursuivie ou reprise, a exactement décidé que l'article L. 122-12 du Code du travail s'était appliqué de plein droit, ce qui avait eu pour conséquence de priver d'effet les licenciements prononcés par le premier employeur ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article L. 122-12-1 du Code du travail ;
Attendu que la cour d'appel a jugé qu'en application de l'article L. 122-12 du Code du travail les créances salariales antérieures au transfert étaient à la charge du nouvel employeur ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la modification dans la situation juridique de l'employeur étant intervenue dans le cadre d'une procédure collective, les créances salariales antérieures au transfert restaient à la charge de l'ancien employeur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a mis à la charge de la Société nouvelle Baudou les sommes dues aux salariés par la société CISO pour la période du 1er janvier au 30 juin 1986, l'arrêt rendu le 27 juin 1990, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse