CASSATION sur le pourvoi formé par :
- l'administration des Douanes, partie poursuivante,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Angers, chambre correctionnelle, en date du 11 juin 1991, qui a déclaré irrecevables les poursuites par elles engagées contre André X..., Jean Y... et Roger Z... des chefs d'importation sans déclaration de marchandises prohibées, délit douanier, et de fausse déclaration d'espèce, contravention douanière de 1ère classe.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 38, 426. 2°, 414, 435, 395, 396, 399, 404, 406, 407, 382, 410, 343 du Code des douanes, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevables les poursuites engagées par l'administration des Douanes à l'encontre des prévenus ;
" aux motifs que devant la juridiction pénale, l'administration des Douanes tient des articles 343. 1 et 342. 2 du Code des douanes le droit d'agir à titre principal pour l'application des sanctions fiscales en répression d'infractions douanières ; qu'en l'espèce l'Administration a agi seule comme elle en avait le droit à l'encontre des prévenus, mais il résulte des citations qu'elle demandait qu'ils soient notamment condamnés à des amendes pénales prévues par les articles 410 et 414 du Code des douanes ; qu'en l'absence de poursuites du ministère public, l'administration des Douanes aux termes de l'article 343 du Code des douanes ne pouvait exercer l'action que pour l'application des sanctions fiscales à défaut de toute condamnation pénale ;
" alors que l'action pour l'application des sanctions fiscales est exercée par l'administration des Douanes à titre principal ; que les articles 410 et 414 du Code des douanes prévoient la condamnation à des amendes fiscales respectivement pour toute fausse déclaration d'espèces n'ayant aucune incidence sur l'application des droits ou des prohibitions et pour toute importation sans déclaration de marchandises prohibées ou fortement taxées ; qu'en déclarant irrecevables les poursuites engagées par l'administration des Douanes aux motifs que les amendes édictées par les articles 410 et 414 du Code des douanes seraient des amendes pénales et qu'en l'absence du ministère public, elle ne pouvait exercer l'action que pour l'application des sanctions fiscales à défaut de toute condamnation pénale, la cour d'appel a violé les articles 343, 410 et 414 du Code des douanes " ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 14, 441, 446 et 447 du Code des douanes, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevables les poursuites engagées par la demanderesse contre les prévenus ;
" aux motifs que les citations à comparaître ont été délivrées alors que la Commission de conciliation et d'expertise douanière saisie depuis le 18 janvier 1988 n'avait ni notifié ses conclusions aux parties ni invité celles-ci à faire valoir leurs observations ; qu'il résulte des termes des articles 446 et 447 du Code des douanes que la procédure devant les tribunaux ne peut être engagée en cas de contestation du déclarant que subséquemment à la phase de conciliation et d'expertise douanière ;
" alors qu'aucun texte du Code des douanes ne subordonne la recevabilité d'une citation au prononcé préalable de l'avis de la Commission de conciliation et d'expertise douanière ; que si la cour d'appel estimait que cet avis était péremptoire pour la solution du litige et que les autres éléments étaient insuffisants pour établir sa conviction, elle devait, comme l'avait fait valoir la demanderesse, surseoir à statuer ; qu'en refusant de le faire et en déclarant irrecevable la citation aux motifs qu'elle aurait été délivrée avant que la Commission de conciliation et d'expertise douanière ait rendu son avis, la cour d'appel a violé les articles 104, 446 et 447 du Code des douanes " ;
Les moyens étant réunis ;
Vu lesdits articles, ensemble l'article 450 du Code des douanes ;
Attendu d'une part, qu'aux termes de l'article 343 du Code des douanes, l'action pour l'application des peines est exercée par le ministère public, l'action pour l'application des sanctions fiscales est exercée par l'administration des Douanes ou par le ministère public accessoirement à l'action publique ;
Attendu, d'autre part, que selon l'article 450 du même Code, les poursuites peuvent être engagées devant les tribunaux, qu'il y ait, ou non, consultation préalable de la Commission de conciliation et d'expertise douanière ;
Attendu que, pour accueillir les exceptions de nullité présentées avant toute défense au fond et déclarer irrecevables les poursuites engagées par l'administration des Douanes pour infractions aux articles 410 et 414 du Code susvisé, la cour d'appel énonce que les citations ne pouvaient demander la condamnation des prévenus aux amendes pénales prévues par ces textes à défaut d'exercice de l'action publique, ni être délivrées avant la notification de l'avis de la Commission de conciliation et d'expertise douanière ; qu'elle en déduit que la procédure est irrégulière ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que les amendes douanières ont un caractère mixte, à la fois pénal et fiscal et que les poursuites de l'administration des Douanes ne sont pas subordonnées à l'avis préalable de la Commission précitée, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des principes susrappelés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Angers, en date du 11 juin 1991, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Rennes.