CASSATION PARTIELLE sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- la Mutuelle assurance des travailleurs mutualistes (MATMUT), partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 9e chambre, en date du 16 mai 1991, qui, dans la procédure suivie contre Jean-Claude X... du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles L. 124-1, L. 421-1 et R. 421-13 du Code des assurances, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de mise hors de cause de la MATMUT et déclaré l'arrêt opposable à la MATMUT vis-à-vis de Catherine Y... et de Philippe Y..., ès qualités de représentant légal de leur fille mineure ;
" aux motifs que le Fonds de garantie automobile exclut à bon droit toute prise en charge des deux passagères du véhicule, sa garantie ne pouvant être engagée dès lors que l'indemnisation des victimes peut avoir lieu à un autre titre, qu'en application de l'article 2 de la loi du 5 juillet 1985, la MATMUT ne peut opposer la force majeure ou le fait d'un tiers à la demande d'indemnisation présentée par Catherine Y... et Cécile Y... ; que la MATMUT ne le conteste pas mais soutient que devant la juridiction répressive l'action civile n'est recevable que pour les chefs de dommage qui découlent des faits, objet de la poursuite ; que tel est bien le cas en l'espèce même si Philippe Y... n'a commis aucune faute ; qu'il résulte au surplus de l'article 388-1 du Code de procédure pénale que, lorsque les poursuites pénales sont exercées, tous les assureurs sans exception peuvent être mis en cause dès lors que le dommage qu'ils sont appelés à garantir est la conséquence du délit poursuivi ; qu'il s'ensuit que c'est à bon droit que la MATMUT a été mise en cause ; que, sa responsabilité étant d'ordre contractuel, aucune condamnation ne peut être prononcée ; qu'il convient de dire seulement que les condamnations lui sont opposables (arrêt attaqué p. 6, alinéas 6, 7, 8, p. 8, alinéas 2, 3) ;
" 1°) alors qu'en cas de poursuites pénales exercées contre le conducteur d'un véhicule non assuré entré en collision avec un autre véhicule dont le conducteur est assuré, le juge répressif ne peut pas invoquer le fait que ce second véhicule est impliqué au sens de la loi du 5 juillet 1985 pour mettre hors de cause le Fonds de garantie automobile et, en conséquence, déclarer sa décision opposable à l'assureur du conducteur non poursuivi pénalement ; que l'éventualité d'une action indemnitaire de la victime contre cet assureur n'équivaut pas à une prise en charge excluant la mise en cause du Fonds de garantie automobile ; qu'en énonçant en l'espèce que le Fonds de garantie automobile avait exclu à bon droit toute prise en charge de l'indemnisation des deux passagères de M. Y..., partie civile, motif pris de ce que la MATMUT ne pouvait pas s'opposer à leur demande d'indemnisation, le véhicule de M. Y... étant impliqué, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 2°) alors que la juridiction répressive n'a pas compétence pour se prononcer sur la responsabilité civile d'un conducteur non poursuivi pénalement, que la cour d'appel a néanmoins énoncé que les chefs de préjudice subis par Mme Y... et sa fille découlaient des faits, objet de la poursuite, ce qui justifiait la mise en cause de la MATMUT, assureur de M. Y..., partie civile, non poursuivi pénalement, laquelle ne pouvait pas s'opposer à la demande d'indemnisation des deux passagères ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen ;
" 3°) alors que, de surcroît, ni Mme Y... ni Mlle Y... n'avaient mis en cause la responsabilité civile de M. Y..., que cette circonstance excluait toute mise en cause de l'assureur de ce dernier ;
" 4°) alors que seul l'assureur de l'auteur de l'infraction peut être mis en cause dans le procès pénal ; que seul l'assureur de la victime qui a indemnisé celle-ci peut intervenir au procès pénal ; qu'en déclarant que tous les assureurs appelés à garantir le dommage, y compris l'assureur de la partie civile, pouvaient être mis en cause devant la juridiction répressive et se voir opposer la décision sur la responsabilité civile de l'assuré non poursuivi pénalement, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'il résulte de l'article 388-1 du Code de procédure pénale que, devant la juridiction répressive saisie de poursuites pour homicide ou blessures involontaires, seul l'assureur du prévenu ou de la personne civilement responsable peut intervenir ou être mis en cause en tant qu'assureur de responsabilité ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué qu'une collision s'est produite entre l'automobile de Jean-Claude X..., qui avait quitté sa droite, et celle de Philippe Y... ; que Catherine et Cécile Y..., transportées dans ce dernier véhicule, ont été blessées ;
Attendu que, sur les poursuites exercées du chef de blessures involontaires contre Jean-Claude X..., qui n'était pas assuré, les victimes se sont constituées parties civiles et ont mis en cause la MATMUT, assureur de responsabilité de Philippe Y..., en demandant que, le véhicule assuré par elle étant impliqué dans l'accident, la décision à intervenir sur les intérêts civils lui soit déclarée opposable ; que l'assureur a conclu à l'irrecevabilité de cette prétention en faisant valoir que Philippe Y..., dont il garantissait la responsabilité, n'était pas prévenu de blessures involontaires ;
Attendu que, pour déclarer néanmoins opposable à la MATMUT la condamnation indemnitaire prononcée contre Jean-Claude X..., la juridiction du second degré retient que les dommages allégués par les parties civiles " découlent des faits, objet de la poursuite ", et " qu'il résulte de l'article 388-1 du Code de procédure pénale, texte de portée générale, qu'en cas de poursuites pénales tous les assureurs sans exception peuvent être mis en cause devant la juridiction répressive, dès lors que le dommage qu'ils sont appelés à garantir est la conséquence du délit poursuivi " ;
Mais attendu qu'en se déterminant de la sorte, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, en date du 16 mai 1991, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de la MATMUT tendant à sa mise hors de cause et a dit opposable à cet assureur la condamnation prononcée au profit de Catherine et de Cécile Y..., toutes autres dispositions dudit arrêt étant expressément maintenues ;
Vu l'article L. 131-5 du Code de l'organisation judiciaire ;
MET la MATMUT hors de cause ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.