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12/02/1992 | FRANCE | N°90-13432

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 12 février 1992, 90-13432


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Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 février 1990), que la SCI Maref, propriétaire de sept lots dans un immeuble en copropriété, a donné congé aux époux Y..., locataires d'un appartement correspondant à quatre de ces lots, avec offre de vente aux prix de 1 650 000 francs ; que les époux Y... ayant refusé cette proposition, les lots ont été vendus, par acte notarié du 31 octobre 1984, à M. X..., moyennant le même prix ; que, par un second acte notarié du 12 décembre 1984, la SCI Maref a vendu à M. X... les trois autres lots, don

t elle était restée propriétaire, correspondant à une chambre de bonne, une cav...

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Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 février 1990), que la SCI Maref, propriétaire de sept lots dans un immeuble en copropriété, a donné congé aux époux Y..., locataires d'un appartement correspondant à quatre de ces lots, avec offre de vente aux prix de 1 650 000 francs ; que les époux Y... ayant refusé cette proposition, les lots ont été vendus, par acte notarié du 31 octobre 1984, à M. X..., moyennant le même prix ; que, par un second acte notarié du 12 décembre 1984, la SCI Maref a vendu à M. X... les trois autres lots, dont elle était restée propriétaire, correspondant à une chambre de bonne, une cave et un placard, moyennant le prix de 10 000 francs ; que les époux Y..., estimant que les deux ventes successives, consenties à M. X..., avaient été réalisées en fraude de leurs droits, la seconde ayant pour effet de rendre plus avantageuses les conditions de la première, ont assigné la SCI Maref et M. X... pour faire reconnaître leur droit de substitution sur les lots qui leur étaient loués ;

Attendu que les époux Y... font grief à l'arrêt de décider qu'il n'y avait pas lieu de leur notifier la vente des biens immobiliers, donnés en location, et qu'ils n'étaient pas recevables à exercer leur droit de substitution, alors, selon le moyen, 1°) que l'article 11, alinéa 4, de la loi du 22 juin 1982, confère au locataire la faculté de se substituer à l'acquéreur lorsque le bien a été vendu à un tiers, à des conditions ou à un prix plus avantageux pour celui-ci que ceux prévus dans l'offre de vente, et ouvre cette faculté de substitution dans le délai d'un mois à compter de la notification du contrat de vente, en précisant que cette notification " doit être faite à la diligence du notaire ayant reçu l'acte " ; qu'il s'ensuit que le notaire doit notifier toutes les ventes qu'il a reçues sans distinction ; qu'il ne lui appartient pas, en effet, de se substituer au locataire pour se faire juge du caractère plus avantageux des conditions ou du prix de la vente, comparés à ceux qui lui ont été proposés ; qu'en décidant, pourtant, en l'espèce, qu'il n'y avait pas lieu à notification de l'acte aux époux Y..., la cour d'appel a violé les dispositions du texte susvisé ; 2°) que la fraude fait exception à toutes les règles et est de nature à justifier l'exercice, par le locataire, du droit de substitution, prévu par la loi du 22 juin 1982, en cas de vente à un tiers à des conditions ou à un prix plus avantageux que ceux qui lui avaient été offerts, même lorsque la vente des locaux loués a été réalisée à des conditions formellement et apparemment identiques ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé l'intention de la SCI Maref, telle qu'exprimée dans le procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 27 juillet 1983, de vendre la totalité des lots lui appartenant à M. X... pour un prix correspondant à celui de l'offre de vente, aux époux Y..., des seuls lots n°s 12, 20, 56 et 57, objet de leur bail ; qu'elle a ensuite constaté le rapprochement des dates des deux actes de vente au profit de M. X... (espacés de moins d'un mois et demi) et la publication tardive de la seconde vente, donnant lieu à pénalité de retard ; qu'elle a encore relevé que la seconde vente, portant sur les lots

n°s 39, 45 et 71, a été conclue au prix de 10 000 francs, soit une somme très nettement inférieure à la valeur du bien, estimé par l'expert à 78 000 francs ; qu'en se bornant à énoncer que chacun de ces éléments ne constituait pas une présomption suffisante de fraude et que les deux ventes successives, consenties au même acquéreur, n'étaient pas indissociables, sans procéder à une analyse d'ensemble des différents indices allégués par les époux Y..., dont la convergence était de nature à faire apparaître, non seulement la volonté, dès l'origine, de la société Maref de céder à M. X... la totalité des lots lui appartenant, mais encore la manoeuvre des parties aux actes de vente, destinée à empêcher les époux Y... d'exercer leur droit de substitution en procédant artificiellement à une scission de l'opération, envisagée globalement en une double vente, de façon à dissimuler le caractère manifestement plus avantageux des conditions de la première, compte tenu du prix dérisoire stipulé pour la seconde, circonstances qui caractérisaient la fraude en vue d'éluder ainsi la mise en oeuvre du droit de substitution, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard du principe susvisé ; 3°) que la cour d'appel n'a pas recherché, ainsi qu'elle y était invitée, l'incidence de la seconde vente, réalisée à vil prix, des lots n°s 39, 45 et 71 sur le prix et les conditions de vente effectives des lots n°s 12, 20, 56 et 57 loués et offerts à la vente aux époux Y... ; qu'une telle recherche aurait fait ressortir la manoeuvre tendant à englober partiellement le prix de la deuxième vente dans celui de la première, de sorte que celle-ci fût, en réalité, réalisée à des conditions plus avantageuses puisqu'elle permettait à M. X... d'acquérir les lots vendus à un prix sensiblement inférieur à celui stipulé dans l'acte, qui comprenait la majeure partie du prix des lots, objets de la seconde vente ; qu'en n'y procédant pas, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 11, alinéa 4, de la loi du 22 juin 1982 ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a statué au fond, en déboutant les époux Y... de toutes leurs demandes, a légalement justifié sa décision en relevant exactement que la vente du 31 octobre 1984 n'ayant pas eu lieu à des conditions ou à un prix plus avantageux que ceux contenus dans l'offre faite aux locataires, le notaire n'était pas tenu de procéder à la notification de cette vente, et en retenant souverainement qu'aucun des indices allégués, qu'elle a analysés, ne constituait une présomption suffisante de fraude ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 90-13432
Date de la décision : 12/02/1992
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

VENTE - Immeuble - Droit de préemption des locataires ou occupants d'appartements - Offre de vente faite aux mêmes conditions qu'à l'acquéreur - Notification préalable par le notaire - Obligation (non)

BAIL (règles générales) - Vente de la chose louée - Droit de préemption des locataires ou occupants d'appartements - Offre de vente faite aux mêmes conditions qu'à l'acquéreur - Notification préalable par le notaire - Obligation (non)

BAIL A LOYER (loi du 22 juin 1982) - Vente de la chose louée - Droit de préemption des locataires ou occupants d'appartements - Offre de vente faite aux mêmes conditions qu'à l'acquéreur - Notification préalable par le notaire - Obligation (non)

VENTE - Immeuble - Droit de préemption des locataires ou occupants d'appartements - Vente à l'acquéreur sans conditions plus avantageuses - Notification préalable - Nécessité (non)

Le notaire n'est pas tenu de procéder à la notification de la vente du local loué alors que cette vente n'a pas eu lieu à des conditions ou à un prix plus avantageux que ceux contenus dans l'offre notifiée au locataire en application de l'article 11 de la loi n° 82-526 du 22 juin 1982.


Références :

Loi 82-526 du 22 juin 1982 art. 11

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 02 février 1990


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 12 fév. 1992, pourvoi n°90-13432, Bull. civ. 1992 III N° 45 p. 27
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1992 III N° 45 p. 27

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Paulot, conseiller doyen faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Marcelli
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Vaissette
Avocat(s) : Avocats :la SCP Delaporte et Briard, M. Parmentier.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:90.13432
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