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11/02/1992 | FRANCE | N°90-87500

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 février 1992, 90-87500


REJET du pourvoi formé par :
- X... Patrice,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, en date du 16 novembre 1990 qui, pour entraves au fonctionnement régulier du comité d'entreprise, l'a condamné à 20 000 francs d'amende et à des réparations civiles.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 6.2 de la Convention européenne des droits de l'homme, 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, L. 432-1, L. 434-3, L. 434-8 et L. 483-1 du Code du travail, 388, 485, 512 e

t 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base léga...

REJET du pourvoi formé par :
- X... Patrice,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, en date du 16 novembre 1990 qui, pour entraves au fonctionnement régulier du comité d'entreprise, l'a condamné à 20 000 francs d'amende et à des réparations civiles.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 6.2 de la Convention européenne des droits de l'homme, 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, L. 432-1, L. 434-3, L. 434-8 et L. 483-1 du Code du travail, 388, 485, 512 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Patrice X... coupable du délit d'entrave au fonctionnement du comité d'établissement de l'hôtel Louvre-Concorde ;
" aux motifs, d'une part, que le comité n'a pas été réuni en avril sans que le prétexte allégué par la défense (absence de Patrice X...) puisse être considéré comme un fait justificatif ; que de même, le litige opposant Patrice X... aux représentants du personnel tant sur l'absence de reddition de comptes du comité que sur l'utilisation des fonds destinés aux oeuvres sociales ne constitue qu'un autre prétexte sous lequel Patrice X... ne pouvait prétendre s'abriter pour échapper à son obligation légale de réunir le comité au mois de décembre 1985 ; qu'ainsi pour les mois d'avril et de décembre, le délit d'entrave au fonctionnement du comité d'établissement est bien constitué sur ce chef de la prévention, la circonstance que les représentants du personnel aient pu, à certains moments, refuser ou de fixer les dates des réunions ou de siéger ne justifiant pas pour autant Patrice X... de ne pas les avoir convoqués chaque mois comme la loi lui en faisait l'obligation ;
" alors que les juges du fond étaient saisis des seuls faits consistant pour X... à ne pas avoir tenu les réunions mensuelles du comité d'entreprise en avril et décembre 1985, de sorte qu'en se déterminant par la circonstance que le prévenu n'aurait pas régulièrement convoqué les membres dudit comité, la cour d'appel, qui se fonde sur des faits non visés par l'acte de saisine, a violé l'article 388 du Code de procédure pénale ;
" que de surcroît, entre la convocation du comité d'établissement et la réunion de celui-ci s'interpose la volonté ou le refus des membres de participer aux réunions mensuelles, de sorte qu'en déclarant que cet élément était inopérant, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 434-3 et L. 483-1 du Code du travail ;
" aux motifs, d'autre part, que le montant annuel de la subvention de fonctionnement du comité d'établissement de l'hôtel Louvre-Concorde doit, par application de l'article L. 434-8 du Code du travail être équivalent à 0,2 % de la masse salariale brute ;
" que la somme qui revenait au comité d'établissement de l'hôtel Louvre-Concorde au titre de la subvention due pour l'année 1984 était de l'ordre de 24 000 francs alors que c'est une somme globale pour les oeuvres sociales et pour la subvention de fonctionnement au comité d'établissement de l'hôtel Louvre-Concorde qui a été versée sans que Patrice X... ait jamais pu démontrer qu'ainsi qu'il le déclare, le comité d'établissement ait été rempli de ses droits pour ladite subvention ;
" qu'il soutient en vain que ce n'était pas lui qui était, au sein du groupe, chargé de faire payer cette subvention alors qu'il était le président du comité d'établissement et qu'il lui appartenait donc, sous sa responsabilité, de faire tout ce qui était en son pouvoir pour que la subvention de fonctionnement soit effectivement allouée au comité d'établissement conformément à la loi ;
" alors qu'en se bornant à énoncer que la somme devant revenir au comité d'établissement pour l'année 1984 était de 24 000 francs et qu'une somme globale incluant la subvention et les oeuvres sociales avait été versée à celui-ci pour en déduire que ces faits caractériseraient le délit d'entrave au fonctionnement du comité, la cour d'appel qui ne recherche pas en quoi ce dernier n'aurait pas été rempli de ses droits et s'abstient d'indiquer le montant de la somme globale versée par le prévenu, prive sa décision de toute base légale au regard des articles L. 434-8 et L. 483-1 du Code du travail ;
" qu'en outre, en statuant comme elle l'a fait, sans répondre aux conclusions du prévenu qui faisait valoir qu'une somme globale de 47 498 francs - bien supérieure au montant de la subvention exigée par la loi - avait été versée au comité pour l'année 1984, la cour d'appel a violé l'article 593 du Code de procédure pénale ;
" que, de surcroît, en se déterminant par la circonstance que tout en ayant versé au comité d'établissement une somme globale, le prévenu n'établissait pas que ledit comité ait été rempli de ses droits, la cour d'appel a méconnu le principe de la présomption d'innocence et violé l'article 6.2 de la Convention européenne des droits de l'homme et l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;
" aux motifs, enfin, qu'il est constant que des travaux importants ont été entrepris en 1985 dans l'hôtel puisqu'ils se montaient à quelques 10 millions de francs et que, si ces travaux (qui concernaient notamment les vestiaires des personnels) ont donné lieu à des informations livrées au comité d'établissement par la direction lors de quatre réunions de comité en 1985 et 1986, les procès-verbaux prouvent qu'il n'y a pas eu de véritable consultation du comité lui permettant de donner son avis indépendamment de celui qui, selon Patrice X..., aurait été fourni par le comité central d'entreprise ;
" que l'obligation légale en la matière n'a donc pas été respectée par Patrice X... ;
" alors qu'en statuant comme elle l'a fait, sans répondre aux conclusions d'appel du prévenu qui faisait valoir que les travaux litigieux ne concernaient qu'une remise en état des sous-sols de l'hôtel n'affectant pas la marche générale de l'entreprise et, par conséquent, n'entrant pas dans la catégorie des questions devant être soumises à la consultation du comité d'établissement, la cour d'appel a violé l'article 593 du Code de procédure pénale ;
" alors, en outre, que les attributions du comité d'établissement s'exercent dans la limite des pouvoirs confiés au chef de l'établissement, de sorte qu'en se déterminant par la circonstance que ledit comité n'aurait pas été régulièrement consulté sur les travaux entrepris sans répondre aux conclusions du prévenu faisant valoir que le chef d'établissement n'avait aucun pouvoir de décision en la matière et que ces questions, qui relevaient de la seule compétence de la société hôtelière Concorde, avaient été régulièrement examinées par le comité central d'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 432-1 et L. 483-1 du Code du travail " ;
Sur le moyen pris en sa première branche :
Attendu que, pour déclarer Patrice X..., directeur de l'hôtel Louvre-Concorde et président du comité d'établissement, coupable d'avoir porté atteinte au fonctionnement régulier de ce comité en ayant omis de le réunir aux mois d'avril et décembre 1985, la juridiction du second degré énonce que le fait pour le prévenu d'avoir été absent au mois d'avril ne constitue pas un fait justificatif et que le litige qui a pu opposer le directeur de l'hôtel au comité sur la reddition des comptes de cet organisme ne le dispensait pas de son obligation légale de réunir le comité au mois de décembre ; qu'elle relève en outre que la circonstance que les représentants du personnel aient pu, à certains moments, refuser de fixer les dates de réunion ou de siéger n'exemptait pas Patrice X... de convoquer chaque mois les membres du comité comme la loi lui en faisait obligation ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel a légalement justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ; que, selon les dispositions de l'article L. 434-3 du Code du travail, le comité d'entreprise se réunit au moins une fois par mois sur convocation du chef d'entreprise ou de son représentant ; qu'en considérant qu'en l'absence de convocation le défaut de réunion était imputable au prévenu, les juges ont fait l'exacte application de la loi et n'ont pas modifié la prévention ;
Sur le moyen pris en sa deuxième branche :
Attendu que Patrice X..., qui a été également poursuivi du chef d'entrave au fonctionnement régulier du comité d'entreprise pour avoir omis de verser en 1984 la subvention de fonctionnement prévue par l'article L. 434-8 du Code du travail, a soutenu dans ses conclusions d'appel qu'il avait réglé, sous la rubrique " oeuvres sociales " et sans distinction entre les oeuvres sociales proprement dites et la subvention de fonctionnement, une somme globale de 47 498 francs ;
Attendu que, pour rejeter cette argumentation et déclarer le prévenu coupable de l'infraction poursuivie, la juridiction du second degré énonce qu'il était dû au comité d'établissement au titre de la subvention de fonctionnement une somme de l'ordre de 24 000 francs, qu'il a été versé une somme globale pour les oeuvres sociales et ladite subvention sans que Patrice X... ait pu démontrer que le comité précité avait été rempli de ses droits en ce qui concerne cette dernière ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel a légalement justifié sa décision sans méconnaître la présomption d'innocence ; qu'en effet, s'il résulte de l'article L. 434-8 du Code du travail que l'employeur peut déduire de la subvention de fonctionnement prévue par ce texte les sommes ou la valeur des moyens en personnel mis à la disposition du comité d'entreprise, c'est à la condition qu'il établisse que cette somme, quelle que soit son importance, ou ces moyens ne sont alloués que pour les besoins du fonctionnement dudit comité autres que ceux qui sont nécessités par les activités sociales et culturelles ;
D'où il suit que le moyen pris en ses première et deuxième branches ne peut être accueilli ;
Sur le moyen pris en sa troisième branche :
Attendu que Patrice X..., poursuivi encore du chef d'entrave au fonctionnement régulier du comité d'établissement pour avoir omis de consulter cet organisme sur la décision de procéder à des travaux de rénovation, a soutenu qu'il ne disposait pas du pouvoir d'engager de tels travaux, que l'hôtel Louvre-Concorde ne disposait d'aucune autonomie juridique, que la décision avait été prise par la société hôtelière Concorde qui avait informé et consulté le comité central d'entreprise ;
Attendu que, pour rejeter cette argumentation et déclarer le prévenu coupable, la juridiction du second degré se borne à énoncer que l'importance des travaux entrepris dans l'hôtel, et concernant notamment les vestiaires du personnel, justifiait que le comité d'établissement soit consulté indépendamment du comité central ;
Attendu qu'il résulte des dispositions des articles L. 435-2 et L. 435-3 du Code du travail que les comités d'établissements ont, en matière économique, les mêmes attributions que les comités d'entreprise dans la limite des pouvoirs confiés aux chefs d'établissements, les autres attributions légales des comités d'entreprises étant exercées par le comité central ; que, par suite, dans les matières où la décision appartient à la direction générale de l'entreprise, les comités d'établissements ne sont obligatoirement consultés que dans la mesure où la mise en oeuvre de la décision et son application au cas particulier de l'établissement rendent nécessaire l'élaboration de dispositions particulières relevant normalement du chef d'établissement ;
Attendu néanmoins que la censure n'est pas encourue dès lors que la peine prononcée et les dommages-intérêts alloués sont justifiés par la déclaration de culpabilité relative aux deux autres chefs d'entrave au fonctionnement régulier du comité d'entreprise ;
D'où il suit que le moyen ne peut non plus être admis en sa troisième branche ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 90-87500
Date de la décision : 11/02/1992
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° TRAVAIL - Comité d'entreprise - Fonctionnement - Subvention de fonctionnement - Calcul - Sommes et moyens en personnel versés par l'employeur pour les besoins de fonctionnement - Déduction - Conditions.

1° L'employeur ne peut déduire de la subvention de fonctionnement prévue par l'article L. 434-8 du Code du travail la somme déjà versée ou la valeur des moyens en personnel déjà mis à la disposition du comité que s'il rapporte la preuve que cette somme et ces moyens ne sont alloués que pour les besoins de fonctionnement dudit comité autres que ceux qui résultent de ses activités sociales et culturelles (1).

2° TRAVAIL - Comité d'entreprise - Comité central - Attributions - Délimitation.

2° Il résulte des dispositions des articles L. 435-2 et L. 435-3 du Code du travail que les comités d'établissement créés dans les entreprises comportant des établissements distincts ont, en matière économique, les mêmes attributions que les comités d'entreprise dans la limite des pouvoirs confiés aux chefs de ces établissements, les autres attributions légales du comité d'entreprise étant exercées par le comité central (2). Par suite, lorsque des travaux sont ordonnés dans un établissement par le directeur général de l'entreprise après consultation du comité central, le chef de cet établissement n'est tenu de consulter le comité d'établissement que dans le cas où la mise en oeuvre de la décision rend nécessaire l'élaboration de dispositions particulières relevant de ses pouvoirs.


Références :

Code du travail L434-8
Code du travail L435-2, L435-3

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 16 novembre 1990

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1989-10-04 , Bulletin criminel 1989, n° 341 (1), p. 824 (cassation partielle). CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1984-01-17 , Bulletin criminel 1984, n° 23, p. 60 (cassation), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1988-07-26 , Bulletin criminel 1988, n° 308 (2), p. 836 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 fév. 1992, pourvoi n°90-87500, Bull. crim. criminel 1992 N° 68 p. 174
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1992 N° 68 p. 174

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général :M. Amiel
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Dumont
Avocat(s) : Avocat :la SCP Célice et Blancpain

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:90.87500
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