.
Attendu que le 13 juin 1959, Anne A..., veuve X..., a fait donation à sa fille Jeanne, de biens immobiliers à charge de verser à la donatrice 600 000 anciens francs, de lui assurer son entretien, et de lui réserver un droit d'usage et d'habitation ; qu'Anne X... est décédée le 11 novembre 1978, laissant, outre sa fille Jeanne, deux autres enfants, M. Charles X... et Mme Y...
X..., épouse B...
Z... ; qu'à la suite de difficultés opposant les héritiers sur la liquidation de la succession de leur mère, qui ne comprenait que les biens donnés à Mlle Jeanne X..., l'arrêt attaqué, retenant que celle-ci était redevable, à l'égard de M. Charles X... de la somme de 18 554 francs correspondant à sa réserve héréditaire, mais qu'elle-même était créancière de ce dernier pour la somme de 10 748,43 francs, a prescrit la compensation de ces dettes en principal et intérêts, à concurrence de leurs quotités respectives ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses diverses branches :
Attendu que M. Charles X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir admis cette compensation, en retenant qu'il n'était pas fondé à opposer l'irrecevabilité de la demande reconventionnelle présentée à cette fin par sa soeur, faute de l'avoir fait en première instance, ou à contester la somme réclamée par celle-ci, en vertu d'une reconnaissance de dette non déniée en son principe comme dans son montant, alors, selon le moyen, de première part, que la fin de non-recevoir dont il se prévalait pouvait être opposée en tout état de cause selon l'article 123 du nouveau Code de procédure civile ; alors, de seconde part, que le juge du partage ne peut connaître que des contestations sur la liquidation successorale, et non de celles concernant une créance personnelle d'un cohéritier à l'égard d'un autre ; alors, de troisième part, que sont demeurées sans réponse des conclusions de M. X... contestant la somme qui lui était réclamée, et dont il a été déclaré débiteur, sans que soit précisé le fondement de cette dette ; et alors, enfin, qu'en prescrivant une compensation entre une soulte rapportable à la masse successorale et la créance personnelle d'un cohéritier à l'encontre d'un autre, la cour d'appel a violé l'article 1289 du Code civil ;
Mais attendu, sur les deux premiers griefs, que la compensation judiciaire peut s'opérer au moyen d'une demande reconventionnelle, toujours recevable, même si elle n'est pas connexe à la demande principale, ou ne procède pas de la même cause que celle-ci ; que par ce seul motif de pur droit, l'arrêt se trouve légalement justifié ;
Attendu, sur le troisième grief, que la cour d'appel, non tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a relevé que la demande reconventionnelle de Mlle X... procédait d'une reconnaissance de dette non contestée dans son principe ni dans son montant libellé en anciens francs, et qu'après remboursement d'une somme de 100 000 anciens francs, il restait dû 565 700 anciens francs avec intérêts au taux conventionnel de 3 %, de sorte qu'il résultait d'un calcul simple et clair figurant dans les conclusions de la créancière, que celle-ci réclamait un solde justifié de 5 657 nouveaux francs avec intérêts à 3 % pendant 30 ans ; qu'ainsi, il a été répondu implicitement aux conclusions que vise le moyen ;
Attendu, enfin, sur le quatrième grief, que si la compensation ne peut s'opérer qu'entre deux personnes respectivement débitrices l'une de l'autre, l'interposition d'une indivision successorale entre deux héritiers purs et simples, n'empêche pas la compensation de toutes les dettes dont ils sont redevables l'un à l'égard de l'autre ; qu'ayant constaté que Mlle Jeanne X... était débitrice de son frère M. Charles X..., à concurrence d'une somme de 18 554 francs représentant l'indemnité équivalente à la réserve héréditaire de celui-ci dans la succession de leur mère, mais que M. Charles X..., était de son côté débiteur de sa soeur, Jeanne, pour un montant justifié de 10 748,83 francs, la cour d'appel, qui a relevé l'existence entre ces cohéritiers de dettes réciproques et personnelles, en a constaté à bon droit la compensation ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 922 du Code civil ;
Attendu que lorsqu'une donation est assortie, au profit du donateur, d'une charge d'entretien, seul l'émolument net procuré par la libéralité, doit être compris dans la masse de calcul de la réserve, le montant de la charge déductible devant être déterminé au jour de son exécution ;
Attendu que pour fixer l'indemnité à devoir par Mlle X... à M. Charles X... au titre de la portion excessive de la libéralité dont elle était bénéficiaire, la cour d'appel a décidé que l'émolument gratuit résultant de cette donation devait être déterminé en déduisant de la valeur rapportable les charges d'entretien dont elle se trouvait assortie, revalorisées dans les mêmes proportions que les biens qui en étaient l'objet ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions fixant l'indemnité due par Mlle X... à M. Charles X... au titre de la portion excessive de la libéralité dont elle est bénéficiaire, l'arrêt rendu le 17 novembre 1989, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz