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Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que, par ordonnance du 18 décembre 1987, le président du tribunal d'instance de Bonneville, statuant en référé, a condamné la société à responsabilité limitée L'Esquinade, locataire, à payer à la société Costranex, bailleur, à titre de provision à valoir sur les loyers, la somme de 600 000 francs dont le débiteur devait s'acquitter en quatre règlements égaux de 150 000 francs chacun, les 15 janvier, 15 février, 15 mars et 15 avril 1988 ; qu'il était précisé qu'à défaut de respect d'une seule de ces échéances, la résiliation du bail pourrait être constatée sur simple dénonciation du bailleur ; que la première échéance a été normalement réglée ; qu'en prévision de la seconde, la société L'Esquinade a remis à son avocat, maître X..., le dimanche 14 février 1988, un chèque de 150 000 francs libellé à son nom, lequel a été porté sur le sous-compte Carpa de cet avocat dès le 15 février 1988 ; que, le même jour, maître X... a averti son confrère adverse du règlement intervenu, en lui indiquant qu'il lui serait répercuté dès encaissement ; que le 16 février 1988, maître X... a reçu de son confrère adverse un télex l'avisant que, faute de règlement au 15 février 1988, le bail était résilié ; que, le 17 février 1988, les fonds ont été reversés sur le sous-compte Carpa dudit avocat adverse ; que l'arrêt attaqué (Chambéry, 17 octobre 1989), a estimé que la remise d'un chèque par le débiteur à son propre avocat ne pouvait équivaloir à un paiement, celui-ci étant caractérisé par un règlement effectué entre les mains du créancier ou de son mandataire, de telle sorte que la deuxième mensualité n'avait pas effectivement été réglée à la date fixée du 15 février 1988 ; que, par ailleurs, la cour d'appel a considéré que le télex constituait la dénonciation de bail prévue ; qu'en conséquence, l'expulsion de la société L'Esquinade a été ordonnée ;
Attendu que la société L'Esquinade fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d'une part, que la caisse des règlements pécuniaires agréée (Carpa), au sein de laquelle chaque avocat ne dispose que d'un sous-compte, étant le mandataire, commun de toutes les parties pour ces règlements, le paiement fait par le débiteur au moyen d'un chèque remis à son Conseil, pour le compte de l'adversaire, par l'intermédiaire de la Carpa, et dans le délai prescrit, est parfaitement valable et libératoire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a admis elle-même que les conseils des parties étaient investis du mandat de faire exécuter l'ordonnance du 18 décembre 1987, a violé les articles 411 à 420 du nouveau Code de procédure civile, en décidant que le règlement fait par le débiteur à son Conseil, dans le délai prescrit, n'était pas libératoire ; et alors, d'autre part, que ladite ordonnance du 18 décembre 1987 ayant prévu que la résiliation du bail, à défaut du respect d'une seule échéance, serait constatée sur simple dénonciation du bailleur, la cour d'appel ne pouvait, sans violer les articles 651 et 689 du nouveau Code de procédure civile, considérer que le télex adressé par le conseil de la société Costranex à celui de la société L'Esquinade valait dénonciation au sens de l'ordonnance susvisée ;
Mais attendu, d'abord, que le créancier ne pouvait être réputé avoir reçu paiement aussi longtemps que la somme due n'avait pas été mise à sa disposition par un transfert au sous-compte de son mandataire ; que la somme de 150 000 francs, versée à Maître X..., conseil de la société L'Esquinade, n'ayant été inscrite au crédit du sous-compte de l'avocat de la société Costranex que le 17 février 1988, la cour d'appel en a exactement déduit que le paiement n'était intervenu qu'à cette dernière date, c'est-à-dire hors délai ;
Attendu, ensuite, qu'ayant retenu que la résiliation du bail avait déjà été constatée par le juge des référés, qui s'était borné à en suspendre les effets, la juridiction du second degré a pu en déduire que le litige se situait désormais en dehors du cadre de l'article 25, alinéa 1er, du décret du 30 septembre 1953, et qu'il n'était pas nécessaire de signifier un nouveau commandement au locataire qui n'avait pas respecté les échéances fixées par l'ordonnance, la dénonciation du bail pouvant alors être effectuée par n'importe quel moyen, et spécialement par télex ;
Qu'il s'ensuit que le moyen ne peut être retenu en aucune de ses deux branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi