CASSATION sur le pourvoi formé par :
- le procureur général près la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion,
contre l'arrêt en date du 16 mai 1991 de ladite Cour, chambre correctionnelle, qui a déclaré amnistiée l'infraction à l'article L. 106 du Code électoral dont Guy X... était prévenu.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation de l'article 19 de la loi du 15 janvier 1990 relative à la limitation des dépenses électorales et à la clarification du financement des activités politiques ;
Vu ledit article, ensemble l'article L. 106 du Code électoral ;
Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article 19 de la loi du 15 janvier 1990 que ne sont amnistiées, sous certaines réserves prévues par ce texte, que les infractions commises avant le 15 juin 1989 en relation avec le financement direct ou indirect de campagnes électorales ou de partis et de groupements politiques ;
Attendu que Guy X... a été poursuivi devant la juridiction répressive du chef d'infraction à l'article L. 106 du Code électoral ;
Attendu que pour faire bénéficier le prévenu des dispositions de l'article 19 de la loi du 15 janvier 1990 portant amnistie, la cour d'appel énonce que la distribution par X..., candidat aux élections cantonales, de bons de secours d'urgence, avec l'accord de la municipalité, en vue de la reconduction de l'équipe au pouvoir, qui n'a procuré aucun enrichissement à son auteur, constitue des dépenses engagées pour une élection ; que ces faits, commis avant le 15 juin 1989 ne sont pas réprimés par les articles 132 à 138 ou 175 à 179 du Code pénal ; que les juges en déduisent qu'il y a lieu de constater l'amnistie au profit du prévenu ;
Mais attendu que l'article L. 106 du Code électoral réprime les agissements de quiconque, par des dons ou libéralités, en argent ou en nature, par des promesses de libéralités, de faveurs, d'emplois publics ou privés ou d'autres avantages particuliers, faits en vue d'influencer le vote d'un ou plusieurs électeurs, aura obtenu ou tenté d'obtenir leur suffrage, soit directement, soit pas l'entremise d'un tiers ; que la provenance des avantages ainsi attribués ou promis est sans effet sur la caractérisation de l'infraction dont l'objet est l'obtention de suffrages et non pas le financement direct ou indirect d'une campagne électorale ou d'un parti ou groupement politique ; qu'il en résulte que ce délit n'est pas en relation avec un tel financement ;
Qu'ainsi c'est par une fausse interprétation de l'article 19 de la loi du 15 juin 1990 précité que les juges ont fait bénéficier le prévenu de l'amnistie et que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions l'arrêt de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 16 mai 1991 ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris.