La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/11/1991 | FRANCE | N°89-14639

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 26 novembre 1991, 89-14639


Attendu que Joël X..., alors âgé de 17 ans, a incendié une maison d'habitation appartenant à M. Indieri ; que l'information pénale a été clôturée par une ordonnance de non-lieu en raison de l'état de démence du mineur au moment des faits ; que M. Indieri et son assureur, la Mutuelle de l'Indre, ont assigné en réparation de leur préjudice Joël X..., devenu majeur, sa mère, ainsi que le Groupement d'assurances mutuelles de France (GAMF), auprès duquel celle-ci avait souscrit un contrat garantissant notamment la responsabilité civile du chef de famille ; que cet assureur a oppo

sé la clause d'exclusion de garantie relative aux " dommages ayant...

Attendu que Joël X..., alors âgé de 17 ans, a incendié une maison d'habitation appartenant à M. Indieri ; que l'information pénale a été clôturée par une ordonnance de non-lieu en raison de l'état de démence du mineur au moment des faits ; que M. Indieri et son assureur, la Mutuelle de l'Indre, ont assigné en réparation de leur préjudice Joël X..., devenu majeur, sa mère, ainsi que le Groupement d'assurances mutuelles de France (GAMF), auprès duquel celle-ci avait souscrit un contrat garantissant notamment la responsabilité civile du chef de famille ; que cet assureur a opposé la clause d'exclusion de garantie relative aux " dommages ayant pour origine un état d'arriération mentale ou d'aliénation " ;.

Sur le premier moyen du pourvoi principal de Mme X... et de M. Joël X..., pris en ses deux branches :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré Mme X... civilement responsable de son fils, alors que, d'une part, la cour d'appel se serait contredite en retenant à la fois que le mineur habitait avec sa mère et couchait effectivement au domicile de son employeur, et alors que, d'autre part, en reprochant à la mère une faute de surveillance et en ne vérifiant pas si elle avait pu avoir connaissance des carences mentales de son fils et prévoir que celui-ci, qui n'avait causé aucune difficulté à son entourage, commettrait le dommage, la cour d'appel n'aurait pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1384, alinéa 4, du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir constaté que le mineur, qui couchait au domicile de son employeur pour des raisons de commodité, séjournait chez sa mère le dimanche et les jours fériés, l'arrêt retient que le jour des faits, le mineur était en congé chez sa mère et habitait avec elle, qu'il présentait des anomalies mentales graves et que sa mère, en lui laissant toute liberté de mouvement, n'avait pas assuré une surveillance vigilante pour prévenir tout écart de conduite, dès lors que son fils se trouvait à la limite de la débilité ; que, de ces constatations et énonciations, la cour d'appel, hors de toute contradiction, a pu déduire, justifiant légalement sa décision, que la responsabilité de Mme X... était engagée sur le fondement de l'article 1384, alinéa 4, du Code civil ;

LE REJETTE ;

Mais sur le second moyen du même pourvoi, pris en sa première branche, qui est recevable comme étant de pur droit :

Vu l'article L. 121-2 du Code des assurances ;

Attendu qu'aux termes de ce texte, dont les dispositions sont impératives, l'assureur est garant des pertes et dommages causés par des personnes dont l'assuré est civilement responsable en vertu de l'article 1384 du Code civil, quelles que soient la nature et la gravité des fautes de ces personnes ; qu'il en résulte que l'assureur ne peut opposer à l'assuré, en vue de lui refuser sa garantie, la circonstance que les actes dont il doit répondre ont été commis, par lesdites personnes, sous l'empire d'un trouble mental ;

Attendu que, pour décider que le GAMF ne devait pas sa garantie, l'arrêt attaqué énonce que l'état de démence prévu par l'article 64 du Code pénal et retenu par le juge d'instruction pour qualifier le comportement de M. Joël X... au moment des faits correspond à l'état d'arriération mentale et d'aliénation prévu dans la clause d'exclusion de garantie de l'article 26 des conditions générales du contrat d'assurance ;

Attendu, cependant, que si l'article L. 121-2 du Code des assurances ne porte pas atteinte à la liberté des parties de convenir du champ d'application du contrat d'assurance et de déterminer la nature et l'étendue de la garantie et si, par suite, n'est pas critiquable la clause excluant de cette garantie les dommages " ayant pour origine un état d'arriération mentale ou d'aliénation ", lorsqu'ils sont commis par l'assuré, est contraire aux dispositions de l'article précité la même clause en ce qu'elle concerne les actes commis par les personnes dont l'assuré est civilement responsable en vertu de l'article 1384 du Code civil ;

Qu'en se déterminant comme elle a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer, ni sur les deux autres branches du second moyen du pourvoi principal, ni sur le moyen unique du pourvoi incident de la Mutuelle de l'Indre et de M. Indieri, qui tend aux mêmes fins :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que le GAMF ne devait pas sa garantie, l'arrêt rendu le 21 juin 1988, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Riom


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 89-14639
Date de la décision : 26/11/1991
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Père et mère - Présomption de responsabilité - Conditions - Défaut de surveillance - Mineur à la limite de la débilité.

1° RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Père et mère - Présomption de responsabilité - Conditions - Cohabitation - Cohabitation au moment des faits.

1° Est engagée, sur le fondement de l'article 1384, alinéa 4, du Code civil, la responsabilité de la mère d'un mineur en congé chez elle le jour des faits, qui n'a pas assuré une surveillance vigilante pour prévenir tout écart de conduite, dès lors que son fils se trouvait à la limite de la débilité.

2° ASSURANCE (règles générales) - Garantie - Etendue - Responsabilité de l'assuré en tant que civilement responsable - Article L - du Code des assurances - Application - Personne ayant commis le dommage sous l'empire d'un trouble mental.

2° ASSURANCE RESPONSABILITE - Garantie - Etendue - Responsabilité de l'assuré en tant que civilement responsable - Article L - du Code des assurances - Application - Personne ayant commis le dommage sous l'empire d'un trouble mental 2° ASSURANCE (règles générales) - Garantie - Etendue - Responsabilité de l'assuré en tant que civilement responsable - Article L - du Code des assurances - Caractère impératif 2° ASSURANCE (règles générales) - Garantie - Exclusion - Exclusion formelle et limitée - Définition - Etat d'arriération ou d'aliénation mentale de l'assuré - Possibilité.

2° Il résulte des dispositions de l'article L. 121-2 du Code des assurances, qui sont impératives, que la clause d'un contrat d'assurances excluant de la garantie les dommages " ayant pour origine un état d'arriération ou d'aliénation mentale " ne vaut que pour l'assuré lui-même et non pour les personnes dont il est civilement responsable.


Références :

Code civil 1384 al. 4
Code des assurances L121-2

Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges, 21 juillet 1988

A RAPPROCHER : (1°). Chambre civile 2, 1989-01-25 , Bulletin 1989, II, n° 21, p. 10 (cassation)

arrêt cité. (2°). Chambre civile 1, 1991-05-14 , Bulletin 1991, I, n° 146, p. 97 (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 26 nov. 1991, pourvoi n°89-14639, Bull. civ. 1991 I N° 337 p. 219
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1991 I N° 337 p. 219

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Viennois, conseiller le plus ancien faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Gaunet
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Fouret
Avocat(s) : Avocats :la SCP Waquet, Farge et Hazan, la SCP Urtin-Petit et Rousseau-Van Troeyen, M. Parmentier.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:89.14639
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award