CASSATION PARTIELLE sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X... Roger, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Pau, chambre correctionnelle, en date du 20 juin 1990, qui, dans la procédure suivie contre Gérard Y... du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 1382 du Code civil, 2, 3, 485, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce qu'après avoir fixé le préjudice soumis à recours subi par M. X... à la somme de 632 397,58 francs, la cour d'appel a déduit de cette somme, notamment celle de 100 455,08 francs, représentant les salaires versés par l'employeur à la victime ;
" alors, d'une part, qu'il résulte des propres conclusions de cet employeur (Trésor public), et comme le constate l'arrêt, que les indemnités journalières versées à M. X... durant son indisponibilité ne s'étaient élevées qu'à la somme de 77 439,80 francs ; que, dès lors, en accordant à l'employeur une somme supérieure à celle réclamée, la cour d'appel a violé les règles de l'indemnisation, privant ainsi la victime d'une partie des indemnités lui revenant ;
" alors, d'autre part, que, et en toute hypothèse, la cour d'appel ne pouvait accorder au Trésor public la somme de 77 439,80 francs représentant les indemnités journalières versées à la victime par son employeur, sans déduire au préalable de cette somme celle de 8 080,37 francs représentant les charges patronales qui ne pouvaient être incluses dans le préjudice résultant de l'accident ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a, à nouveau, violé les règles de l'indemnisation " ;
Vu lesdits articles, ensemble les articles 29, 31 et 32 de la loi du 5 juillet 1985 ;
Attendu que la réparation du préjudice résultant d'une infraction doit être intégrale ;
Attendu, en outre, que si l'employeur est admis à poursuivre directement contre la personne tenue à réparation ou son assureur le remboursement des charges patronales afférentes aux rémunérations maintenues ou versées à la victime pendant la période d'indisponibilité de celle-ci, ces charges ne doivent pas être imputées sur l'indemnité réparant le préjudice de la victime ;
Attendu qu'après avoir évalué à 632 397,58 francs l'indemnité correspondant à l'atteinte à l'intégrité physique de Roger X..., employé d'un établissement industriel de l'Etat, victime le 9 octobre 1986 d'un accident causé par Gérard Y..., les juges imputent sur cette indemnité la somme de 100 455,08 francs au titre des salaires maintenus par l'Etat pendant la période d'indisponibilité de la victime, et condamnent en conséquence le prévenu et son assureur à payer à celle-ci, compte tenu d'autres éléments d'un montant non contesté de 100 260,35 francs, une somme de 431 682,15 francs à titre de dommages-intérêts ;
Mais attendu qu'en se prononçant ainsi tout en relevant que la créance du Trésor public consécutive à l'accident ne s'élevait qu'à 77 439,80 francs et alors qu'en outre cette créance était constituée, à concurrence de 8 080,37 francs, de charges patronales - de sorte que la somme imputable sur l'indemnité correspondant à l'atteinte à l'intégrité physique du blessé aurait dû être fixée à 69 359,43 francs seulement -, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Attendu, cependant, que la Cour de Cassation trouve dans les constatations des juges du fond, qui ont souverainement apprécié les divers chefs de dommage, les éléments lui permettant d'appliquer la règle de droit appropriée et de mettre fin au litige ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Pau, en date du 20 juin 1990, mais seulement en ce qu'il a condamné Gérard Y... et la compagnie La Concorde à payer à Roger X... la somme de 431 682,15 francs, toutes autres dispositions dudit arrêt étant expressément maintenues ;
Vu les articles L. 131-5 du Code de l'organisation judiciaire, 1153-1 du Code civil et 388-3 du Code de procédure pénale ;
CONDAMNE Gérard Y... à payer à Roger X... la somme de 462 777,80 francs avec intérêts au taux légal à compter du 20 juin 1990 ;
DECLARE cette décision opposable à la compagnie La Concorde ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.