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22/10/1991 | FRANCE | N°90-85069

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 octobre 1991, 90-85069


REJET du pourvoi formé par :
- X..., partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, chambre correctionnelle, en date du 25 juin 1990, qui, dans les poursuites exercées à sa requête du chef de diffamation publique contre Y..., a déclaré nulle la citation introductive d'instance.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 29, 31, 32, 53, 55 de la loi du 29 juillet 1881, 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt

confirmatif attaqué a déclaré nulle la citation du 18 mai 1989 comme ne satisf...

REJET du pourvoi formé par :
- X..., partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, chambre correctionnelle, en date du 25 juin 1990, qui, dans les poursuites exercées à sa requête du chef de diffamation publique contre Y..., a déclaré nulle la citation introductive d'instance.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 29, 31, 32, 53, 55 de la loi du 29 juillet 1881, 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré nulle la citation du 18 mai 1989 comme ne satisfaisant pas aux prescriptions de l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881 imposées à peine de nullité ;
" aux motifs que M. Z... a, selon la citation, été secrétaire de mairie, qualité dont il a été soutenu à plusieurs reprises jusque devant la Cour de Cassation, qu'elle était celle d'un fonctionnaire public ;
" alors que la Cour se bornait ainsi à émettre un doute, sans aucunement dire en quoi M. Z..., secrétaire de mairie, aurait pu se prévaloir des dispositions de l'article 31, bien qu'il ait été jugé, sans ambiguïté, que les secrétaires de mairie, auxiliaires des maires, ne sont pas investis d'une portion de l'autorité publique, même si un intérêt public s'attache à leurs fonctions ;
" et aux motifs que l'article 31 ne vise que la diffamation commise envers un citoyen chargé d'un mandat public à raison de ses fonctions, et précise, dans son dernier alinéa, que la diffamation commise envers les mêmes personnes concernant la vie privée relève de l'article 32 ; que la seule qualité de M. X... n'implique donc nullement qu'il invoque nécessairement l'application de l'article 31 ;
" alors que, d'une part, la citation précisait et analysait exactement et successivement les divers faits incriminés, qui visaient tous M. X... à raison de ses fonctions, sans aucunement mettre en cause sa vie privée, que par conséquent, la Cour ne pouvait, sans s'en expliquer davantage, voire sans se contredire, relever que les parties civiles avaient analysé successivement les diverses imputations dans leur citation, et considérer néanmoins que la qualité de X..., seule visée, n'impliquait cependant pas qu'il invoque l'article 31 ;
" alors que, d'autre part, dans des conclusions restées sans réponse, les parties civiles avaient fait valoir qu'en usant de la procédure de l'article 55 de la loi du 29 juillet 1881 pour offrir de rapporter la preuve de la vérité de chacun des faits incriminés, Mme Y... avait nécessairement reconnu ne pas s'être méprise et renoncé à invoquer une hypothétique nullité tirée d'un visa des textes insuffisamment précisé " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'avant toute défense au fond, Y..., prévenue, a excipé de la nullité de la citation à elle délivrée à la requête de X..., A... et Z... pour diffamation à leur égard en application des articles 29, 31, 32 de la loi du 29 juillet 1881 à la suite de la distribution, à la veille des élections municipales de mars 1989, d'un tract mettant en cause l'ancienne municipalité et retenu à raison de :
- l'imputation faite à l'équipe sortante de s'obstiner à cacher la vérité,
- l'imputation d'avoir licencié le directeur de l'association gérant la maison du troisième âge de la ville, la B..., coût pour la ville : 70 000 francs,
- l'imputation d'avoir augmenté abusivement les taxes des divers impôts locaux prélevés sur les habitants de C... et notamment celui de la taxe d'habitation,
- l'imputation d'avoir affecté près de la moitié des impôts perçus par la commune au financement de l'office du tourisme présidé par le maire sortant, ainsi que des passages figurant sous la rubrique " L'affaire du lotissement D... ", relative à l'achat d'un terrain de 5 hectares par la société E... dont le gérant était Z... le 4 décembre 1976 pour 400 000 francs, à savoir : " Ce même terrain grâce à une providentielle modification du plan d'occupation des sols effectuée en 79 est revendu 1 500 000 francs le 26 juillet 1980, soit une multiplication par 4 en 3 ans et demi. Un bel exemple de réalisme ", " Le maire a payé l'essentiel des travaux de voirie qui incombent normalement à l'aménageur, société F... (D...) mandataire A..., coût pour le contribuable 478 405 francs " ;
Attendu que, pour confirmer le jugement annulant la citation, la cour d'appel relève que celle-ci après avoir indiqué que le tract incriminé, dirigé contre " l'équipe sortante " ou " l'ancienne municipalité " sans que X..., maire sortant, fût nommément désigné, contenait plusieurs imputations analysées successivement par les parties civiles comme mettant toutes en cause X..., les dernières impliquant également Z... et A... mais sans qu'aucune ne soit qualifiée ; que les juges du second degré énoncent ensuite que l'exploit vise les articles 31 et 32 de la loi du 29 juillet 1881 sans préciser si les faits sont de nature à constituer l'une ou l'autre des infractions réprimées par ces textes et ce, d'autant que l'article 31 punissant les diffamations envers les citoyens chargés d'un mandat public renvoie à l'article 32 pour la répression des atteintes à la vie privée à l'égard de ces mêmes personnes ; que faute par chacune des parties civiles d'avoir précisé, pour chaque imputation, celle par laquelle elle s'estimait diffamée et en quelle qualité elle l'était, la citation ne satisfaisait pas aux prescriptions imposées à peine de nullité par l'article 53 de la loi précitée ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application de la loi sans encourir les griefs du moyen ;
Qu'en effet, d'une part, s'il est permis à plusieurs personnes s'estimant diffamées de se concerter afin de poursuivre l'auteur de ces diffamations par une seule et même citation, celle-ci doit, pour répondre aux exigences de l'article 53 de la loi sur la liberté de la presse, présenter une corrélation entre l'articulation des faits poursuivis, leur qualification légale et les textes de lois applicables ; que tel n'était pas le cas en l'espèce de l'exploit qui, retenant globalement plusieurs imputations sous la qualification générique de diffamation envers les trois parties civiles, visait en outre les articles 31 et 32 de ladite loi réprimant des infractions de nature et de gravité différentes ;
Que, d'autre part, les formalités prévues par l'article 55 de la même loi, qui doivent être accomplies par le prévenu, à peine de déchéance, dans les 10 jours de l'assignation introductive d'instance, et par suite, antérieurement à sa comparution devant les juges, ne constituent pas en elles-mêmes des défenses au fond ; qu'elles ont seulement pour objet de conserver les droits du prévenu à faire valoir ses moyens de preuve devant le Tribunal et de permettre à la partie poursuivante de rassembler les siens ; que, dès lors, leur accomplissement ne saurait nuire à la libre et entière défense du prévenu ni impliquer de sa part une renonciation à proposer au Tribunal les exceptions et moyens de nullité dont il peut se prévaloir, pourvu qu'il le fasse avant toute discussion sur le fond ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 90-85069
Date de la décision : 22/10/1991
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° PRESSE - Procédure - Citation - Mentions obligatoires - Pluralité de victimes - Citation unique - Condition.

1° S'il est permis à plusieurs personnes s'estimant diffamées de se concerter afin de poursuivre l'auteur de ces diffamations par une seule et même citation, celle-ci doit, pour répondre aux exigences de l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881, présenter une corrélation entre l'articulation des faits poursuivis, leur qualification légale et les textes de loi applicables. Tel n'est pas le cas de l'exploit qui, retenant globalement plusieurs imputations sous la qualification générique de diffamation envers trois parties civiles, vise en outre les articles 31 et 32 de la loi sur la liberté de la presse réprimant des infractions de nature et de gravité différentes (1).

2° PRESSE - Procédure - Citation - Nullité - Exception - Proposition - Proposition avant toute défense au fond - Défense au fond - Définition.

2° Les formalités prévues par l'article 55 de la loi du 29 juillet 1881, qui doivent être accomplies par le prévenu, à peine de déchéance, dans les 10 jours de l'assignation introductive d'instance, et, par suite, antérieurement à sa comparution devant les juges, ne constituent pas une défense au fond (2).


Références :

Loi du 29 juillet 1881 art. 31, 32, 53
Loi du 29 juillet 1881 art. 55

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre correctionnelle), 25 juin 1990

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1891-05-28 , Bulletin criminel 1891, n° 120, p. 206 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1911-12-15 D.P. 1913-01-22 ;

A rapprocher : Chambre criminelle, 1972-06-13 , Bulletin criminel 1972, n° 197, p. 496 (rejet). CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1949-12-15 , Bulletin criminel 1949, n° 344, p. 549 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1990-06-06 , Bulletin criminel 1990, n° 229, p. 583 (action publique éteinte et cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 oct. 1991, pourvoi n°90-85069, Bull. crim. criminel 1991 N° 366 p. 911
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1991 N° 366 p. 911

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général :M. Robert
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Dardel
Avocat(s) : Avocat :M. Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:90.85069
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