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22/10/1991 | FRANCE | N°90-83338

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 octobre 1991, 90-83338


CASSATION sans renvoi et ACTION PUBLIQUE ETEINTE sur le pourvoi formé par :
- X...,
- Y...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, en date du 13 février 1990 qui, pour entrave à l'exercice du droit syndical, les a condamnés, le premier, à une amende de 10 000 francs, le second à une amende de 8 000 francs, et tous deux à des réparations civiles.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 2.2° et 29.16° de la loi n° 88-828 du 20 juillet 1988 portant amnistie, de l'article L. 481-2 du Code

du travail et de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs,...

CASSATION sans renvoi et ACTION PUBLIQUE ETEINTE sur le pourvoi formé par :
- X...,
- Y...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, en date du 13 février 1990 qui, pour entrave à l'exercice du droit syndical, les a condamnés, le premier, à une amende de 10 000 francs, le second à une amende de 8 000 francs, et tous deux à des réparations civiles.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 2.2° et 29.16° de la loi n° 88-828 du 20 juillet 1988 portant amnistie, de l'article L. 481-2 du Code du travail et de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a rejeté le moyen d'irrecevabilité des poursuites invoqué par les prévenus et tiré de l'amnistie ;
" aux motifs qu'il résulte des dispositions combinées des articles 2.2° et 29.16° de la loi d'amnistie du 20 juillet 1988, que les délits commis en matière de législation du travail antérieurement au 22 mai 1988 ne sont amnistiés de droit que s'ils l'ont été à l'occasion de conflits du travail ou à l'occasion d'activités syndicales et revendicatives de salariés ; que ces dispositions correspondent à celles de l'article 2.2° de la loi d'amnistie du 4 août 1981 si ce n'est la précision que les activités syndicales et revendicatives visées sont celles de salariés ;
" que dans l'interprétation de l'article 2.2° de la loi du 4 août 1981 la jurisprudence est constante pour estimer que ce texte ne pouvait s'appliquer qu'aux salariés, les termes activités syndicales et revendicatives ne pouvant être exercées par un employeur ;
" que pour écarter cette jurisprudence, la défense se réfère aux débats parlementaires ayant précédé l'adoption de la loi du 20 juillet 1988 au cours desquels il a été déclaré que l'amnistie de plein droit peut évidemment bénéficier à l'employeur comme au salarié, mais que ces déclarations ne sont pas en contradiction avec la jurisprudence précitée mais la complètent puisqu'elles doivent s'entendre sous réserve que le salarié ou l'employeur aient commis un délit dans les conditions prévues par le texte, que dans ces conditions les poursuites engagées contre les prévenus ne concernant pas un délit commis à l'occasion d'activités syndicales ; celles-ci ne pouvant être exercées par un employeur, le moyen d'irrecevabilité sera rejeté ;
" alors que comme le prévenu le soutenait dans ses conclusions d'appel, il résulte des travaux préparatoires au vote de la loi d'amnistie du 20 juillet 1988 que le législateur a entendu abroger la discrimination opérée arbitrairement par la jurisprudence entre les infractions commises par les salariés et les employeurs à l'occasion d'activités syndicales et revendicatives en faisant bénéficier indistinctement ces deux catégories de personne de l'amnistie, qu'en prétendant contre toute évidence que ces travaux préparatoires n'étaient pas en contradiction avec la jurisprudence qui s'était instaurée en application de la précédente loi d'amnistie du 4 août 1981, les juges du fond ont dénaturé le sens clair et précis des travaux préparatoires du vote de la loi du 20 juillet 1988 et ont violé ce texte en refusant de faire bénéficier les demandeurs de dispositions de son article 2.2° sous prétexte que celles-ci ne pouvaient jouer au profit des employeurs en ce qu'elles déclarent que les infractions commises à l'occasion d'activités syndicales et revendicatives des salariés sont amnistiées " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que, selon l'article 2.2° de la loi du 20 juillet 1988, sont amnistiés, lorsqu'ils sont antérieurs au 22 mai 1988, les délits commis à l'occasion de conflits du travail ou à l'occasion d'activités syndicales et revendicatives de salariés et d'agents publics, y compris au cours de manifestations sur la voie publique ou dans des lieux publics ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que X..., président du conseil d'administration de la société anonyme des galeries Z..., et Y..., directeur du personnel et des relations humaines de cette société ont été poursuivis du chef d'entraves à l'exercice du droit syndical, par citation directe délivrée le 17 octobre 1988 à la requête du syndicat CGT des employés, ouvriers et démonstrateurs des galeries Z... qu'il leur était reproché d'avoir indûment sanctionné des salariés ayant participé en 1987 et 1988 à des distributions régulières de tracts syndicaux ;
Attendu que devant les juges du fond, les prévenus ont soutenu que les faits leur étant reprochés étaient amnistiés, par application de l'article 2.2° de la loi du 20 juillet 1988, dès lors que les sanctions en cause, prises à raison d'agissements intervenus antérieurement au 22 mai 1988 et s'inscrivant dans le contexte d'une action syndicale et revendicative, étaient elles-mêmes amnistiées, ainsi que le prévoyaient les articles 14 et 15 de ladite loi ;
Attendu que pour écarter cette argumentation, la cour d'appel, après avoir déclaré licites les distributions de tracts effectuées par des salariés les 10, 13 et 20 mai 1988, a estimé que les délits poursuivis étaient pour partie établis à la charge des prévenus, et que ceux-ci ne pouvaient bénéficier de la loi d'amnistie, les activités syndicales et revendicatives visées par la loi du 20 juillet 1988 ne pouvant s'entendre de celles qu'exerce un employeur dans ses rapports avec ses propres salariés ;
Mais attendu que les dispositions de l'article 2. 2° de la loi du 20 juillet 1988 s'appliquent, sans aucune distinction, à tous les auteurs des délits commis antérieurement au 22 mai 1988, à l'occasion d'activités syndicales et revendicatives de salariés, et que tel étant le cas en l'espèce, les infractions poursuivies étaient amnistiées de plein droit ; qu'en décidant comme elle l'a fait, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé ;
Qu'il s'ensuit que la cassation est encourue de ce chef ;
Et attendu que la juridiction de jugement a été saisie après la publication de la loi d'amnistie, et qu'il n' y a donc pas matière à prononcer sur les intérêts civils, ainsi que le prévoit l'article 24 de ladite loi ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen proposé :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 13 février 1990,
DECLARE l'action publique éteinte par l'effet de l'amnistie, et, attendu qu'il ne reste rien à juger ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 90-83338
Date de la décision : 22/10/1991
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi et action publique éteinte
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

AMNISTIE - Textes spéciaux - Loi du 20 juillet 1988 - Amnistie de droit - Amnistie à raison de l'infraction - Délits commis à l'occasion d'activités syndicales et revendicatives - Domaine d'application

TRAVAIL - Droit syndical dans l'entreprise - Délit commis à l'occasion d'activités syndicales et revendicatives de salariés - Amnistie - Textes spéciaux - Loi du 20 juillet 1988 - Domaine d'application

Les dispositions de l'article 2.2° de la loi n° 88-828 du 20 juillet 1988 portant amnistie s'appliquent sans aucune distinction à tous les auteurs de délits commis antérieurement au 22 mai 1988, à l'occasion d'activités syndicales et revendicatives de salariés. Par suite, ne justifie pas sa décision la cour d'appel qui, pour dire non amnistié le délit d'entrave à l'exercice du droit syndical imputé à un employeur auquel il était reproché d'avoir indûment sanctionné des salariés ayant, antérieurement au 22 mai 1988, procédé à des distributions régulières de tracts syndicaux, retient que le prévenu ne peut bénéficier des dispositions de l'article 2.2° de la loi précitée, les activités syndicales et revendicatives visées par ce texte ne pouvant s'entendre de celles qu'exerce un employeur dans ses rapports avec ses propres salariés (1).


Références :

Loi 88-828 du 20 juillet 1988 art. 2

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 13 février 1990

CONFER : (1°). (1) Cf. A comparer : Chambre criminelle, 1981-10-13 , Bulletin criminel 1981, n° 270, p. 405 (rejet et action publique éteinte) ;

Chambre criminelle, 1986-02-04 , Bulletin criminel 1986, n° 46, p. 107 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1988-11-29 , Bulletin criminel 1988, n° 404, p. 1069 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 oct. 1991, pourvoi n°90-83338, Bull. crim. criminel 1991 N° 364 p. 905
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1991 N° 364 p. 905

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Zambeaux, conseiller le plus ancien faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Robert
Rapporteur ?: Rapporteur :Mme Guirimand
Avocat(s) : Avocat :M. Choucroy

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:90.83338
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