CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Henri,
contre l'arrêt de la cour d'assises de l'Aveyron, en date du 5 octobre 1990, qui, pour viols aggravés, l'a condamné à 15 ans de réclusion criminelle.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation de l'article 6. 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
" en ce que la composition de la cour d'assises comprenait M. Gérard Z..., magistrat, qui avait déjà eu à connaître de ces mêmes faits dans le cadre de la procédure de divorce engagée par l'épouse de X... ;
" alors, d'une part, qu'il résulte de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que toute personne a droit à ce que sa défense soit entendue par un tribunal impartial ; que l'exigence d'impartialité doit s'apprécier objectivement ; qu'en l'espèce, M. Gérard Z..., assesseur, ayant déjà eu à connaître des faits reprochés à X... lors de l'instance en divorce des époux X..., la cour d'assises ne présentait pas les garanties objectives d'impartialité et d'indépendance requises par l'article 6 susvisé ;
" alors, d'autre part, en tout état de cause, que même si on admet qu'un juge civil, qui dans une autre instance a connu d'une affaire concernant l'accusé, peut être impartial, il en va différemment lorsque le même juge a pris parti dans les motifs de sa décision civile sur le fond du droit ; qu'il en est ainsi en l'espèce où M. Gérard Z..., en sa qualité de juge civil, a accueilli la demande en divorce de Mme X... en se fondant exclusivement sur les faits de viol par ascendant énoncés dans l'arrêt de la chambre d'accusation renvoyant X... devant la cour d'assises de l'Aveyron ; que, dès lors, en l'absence de procès équitable, la décision de condamnation devra être censurée " ;
Vu ledit article ;
Attendu que, selon ce texte, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant et impartial ; qu'il en résulte que ne peut siéger dans une cour d'assises un magistrat qui, en qualité de juge civil, a déjà porté une appréciation sur la culpabilité de l'accusé ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que la cour d'assises appelée à juger X... était composée, en qualité de président, de M. Moitié, conseiller à la cour d'appel de Montpellier, et en qualité d'assesseurs, de M. Bestagno, président du tribunal de grande instance de Rodez, et de M. Z..., juge audit Tribunal ;
Attendu qu'il résulte des pièces produites par le demandeur, qu'en cette dernière qualité, M. Z... a fait partie de la formation de jugement qui, le 22 mai 1990, a prononcé le divorce des époux X...-Y..., aux torts exclusifs du mari, en se fondant uniquement sur l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Montpellier alors définitif, renvoyant X... devant la cour d'assises du chef de viols aggravés, le jugement énonçant que " la preuve est ainsi rapportée de faits imputables au mari qui constituent une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage et rendent intolérable le maintien de la vie commune " ;
Mais attendu qu'ayant ainsi porté une appréciation sur la culpabilité de X..., du chef des viols aggravés qui lui étaient reprochés, M. Z... ne pouvait ensuite siéger en qualité d'assesseur de la cour d'assises qui devait juger l'accusé pour ces mêmes faits ;
Que, dès lors, la cour d'assises étant illégalement composée, sa décision encourt la cassation ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt précité de la cour d'assises de l'Aveyron, en date du 5 octobre 1990, qui a condamné Henri X... à 15 ans de réclusion criminelle, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'assises de l'Hérault.