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03/07/1991 | FRANCE | N°87-43405

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 juillet 1991, 87-43405


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Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 avril 1987) et les pièces de la procédure, que M. X..., agent de conduite à la SNCF, a été, le 22 octobre 1984, sanctionné pour avoir franchi un signal dans des conditions irrégulières ;

Sur le premier moyen, pris en ses diverses branches :

Attendu qu'il est reproché à l'arrêt infirmatif d'avoir débouté M. X... de sa demande d'annulation de la sanction de mise à pied de 2 jours et d'allocation de dommages-intérêts à titre de préjudice financier et à titre de préjudice moral, alors, selon le moyen, d'une part,

qu'une mise à pied de 2 jours infligés à un agent de conduite de la SNCF pour le seul f...

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Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 avril 1987) et les pièces de la procédure, que M. X..., agent de conduite à la SNCF, a été, le 22 octobre 1984, sanctionné pour avoir franchi un signal dans des conditions irrégulières ;

Sur le premier moyen, pris en ses diverses branches :

Attendu qu'il est reproché à l'arrêt infirmatif d'avoir débouté M. X... de sa demande d'annulation de la sanction de mise à pied de 2 jours et d'allocation de dommages-intérêts à titre de préjudice financier et à titre de préjudice moral, alors, selon le moyen, d'une part, qu'une mise à pied de 2 jours infligés à un agent de conduite de la SNCF pour le seul fait d'avoir manqué de vigilance au regard d'un panneau imposant le ralentissement du convoi, alors que le panneau suivant permettait la marche normale de celui-ci, constitue une sanction disproportionnée avec les faits retenus ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé par fausse qualification les dispositions de l'article L. 122-43 du Code du travail ; alors, en toute hypothèse, qu'en ne recherchant pas pour apprécier la proportionnalité des faits et de la sanction si les manoeuvres de freinage d'urgence que M. X... a soutenu avoir effectuées, selon les constatations de l'arrêt, pour arrêter le convoi ne constituaient par une circonstance atténuante révélant le caractère involontaire du défaut de ralentissement reproché, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 122-43 du Code du travail ; et alors surtout, que M. X... avait soutenu dans ses conclusions qu'en l'espèce la cour d'appel ne pouvait apprécier la proportionnalité de la sanction qui lui avait été infligée sans examiner au préalable le guide de la SNCF pour l'appréciation des infractions aux règles de sécurité (agent de conduite) qui distingue le défaut de vigilance isolé du franchissement du signal fermé et impose la prise en compte du contexte ; qu'en l'espèce, il n'avait jamais commis aucune infraction aux règles de vigilance, d'autre part qu'il était préoccupé par une enquête relative à un grave accident de travail qui lui avait été confiée le matin même, et enfin que par précaution il avait immédiatement arrêté le convoi dès qu'il s'était rendu compte de cette inattention momentanée qui a eu pour seule conséquence un retard de cinq minutes à la gare d'arrivée ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions dont il résultait qu'un simple défaut de vigilance ne pouvait être sanctionné de la même façon que le franchissement d'un signal fermé, et que la sanction de mise à pied n'était pas non plus proportionnée compte tenu des circonstances, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, encore, que tout manquement aux règles de vigilance en matière de sécurité peut avoir des conséquences graves ; que le degré de gravité de ce manquement et la sévérité de la sanction ne peuvent donc s'apprécier au regard de l'existence du seul risque d'accident ; qu'en considérant qu'une mise à pied n'était pas disproportionnée à un manquement aux seules règles de vigilance au motif que celui-ci aurait pu entraîner des conséquences graves, la cour d'appel s'est prononcée sur le degré de gravité de la faute par un motif abstrait équivalant à un défaut de motifs, en méconnaissance de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, au

surplus, que la cour d'appel qui a considéré que la sanction litigieuse n'était pas hors de proportion " compte tenu de l'échelle des sanctions (.. ) définie à l'article 3 du chapitre IX du statut des relations collectives entre la SNCF et son personnel ", alors que celui-ci, contrairement au " guide pour l'appréciation des règles de sécurité " ignoré par la cour d'appel, contient seulement un barème de sanction à l'exclusion de toute corrélation faute-sanction, s'est prononcée par un motif inopérant équivalant à un défaut de motifs, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, en tout état de cause, qu'en énonçant, d'une part, que M. X... ne contestait pas que, le panneau C 316 présentant un feu rouge signifiant l'obligation d'arrêt, il n'a pu, du fait de l'absence de ralentissement en temps utile, immobiliser son convoi que soixante mètres plus loin, et, d'autre part, que peu importait que le signal C 316 permette la marche normale du convoi, ce dont il se déduisait implicitement mais nécessairement que la cour d'appel avait relevé la réalité de l'autorisation de marche normale, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, équivalant à un défaut de motifs, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation a relevé qu'il était établi que le conducteur du convoi, au passage devant le panneau d'avertissement d'un prochain signal, s'était borné à actionner le dispositif de vigilance et à le réarmer sans ralentir, alors qu'il en avait l'obligation, de sorte qu'il avait dépassé le signal sans savoir s'il était ouvert ou fermé et qu'il ne s'était arrêté que soixante mètres plus loin ; qu'ayant ainsi caractérisé un comportement fautif du salarié au moment du passage devant le panneau d'avertissement indépendamment du point de savoir si au moment de son franchissement le panneau d'arrêt présentait à nouveau un signal permettant la marche normale, elle a pu décider que ce comportement justifiait une sanction disciplinaire et c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain qu'elle a décidé qu'il n'y avait pas lieu d'annuler cette sanction ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le second moyen :

Attendu qu'il est encore fait grief à la décision d'avoir débouté M. X... de sa demande tendant à obtenir l'annulation d'une sanction de 2 jours de mise à pied et d'un mois d'interdiction de conduite et la condamnation de la SNCF à lui verser à ce titre des dommages-intérêts en réparation du préjudice financier et du préjudice moral alors, selon le pourvoi, que l'article 3.1 du chapitre IX du statut prévoit qu'en ce qui concerne le personnel de conduite, le retrait du service de conduite constitue une sanction qui peut être prononcée par le chef d'établissement à titre temporaire à la suite d'un agissement fautif de l'agent et qui peut s'ajouter à une autre sanction ; que par ailleurs l'affectation provisoire à d'autres fonctions avec vérification des aptitudes de l'interessé peut aussi ne pas constituer une sanction ; que la cour d'appel ne pouvait s'abstenir de rechercher si, en l'espèce, le retrait du service de conduite n'avait pas été prononcé à la suite des agissements reprochés à M. X... et relevés par l'arrêt et si de

ce fait il ne constituait pas en réalité une sanction supplémentaire s'ajoutant à la mise à pied de 2 jours, peu important par ailleurs qu'elle n'ait pas été régulièrement notifiée et que des vérifications d'aptitude aient effectivement eu lieu ou non ; qu'en omettant de procéder à une telle recherche, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134 du Code civil et L. 122-40 du Code du travail ;

Mais attendu qu'il résulte des dispositions de l'article 1, paragraphe 4, alinéa 4, du chapitre IX du statut des agents de la SNCF, que ne constitue pas une sanction l'affectation provisoire à d'autres fonctions, décidée par le chef d'établissement, en vue de vérifier si l'agent possède toujours bien les aptitudes nécessaires à la tenue de son poste, notamment lorsqu'il s'agit de fonctions touchant à la sécurité ; que l'arrêt relève que l'affectation temporaire de M. X... à un emploi de bureau avait été décidée par la SNCF afin de permettre pendant sa durée de vérifier si cet agent possédait toujours les aptitudes nécessaires à la tenue de son poste et que M. X... ne contestait pas avoir, pendant cette période, été effectivement astreint à ces vérifications médicales et techniques ;

Qu'ainsi, n'ayant retenu aucun détournement de pouvoir à la charge de l'employeur, la cour d'appel a pu décider que le retrait du service de conduite pendant la durée limitée de ce contrôle ne constituait pas une sanction disciplinaire ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 87-43405
Date de la décision : 03/07/1991
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Pouvoir disciplinaire - Mise à pied - Faute du salarié.

1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Pouvoir disciplinaire - Sanction - Conditions - Faute du salarié - Agent de conduite à la SNCF ne ralentissant pas alors qu'il en avait l'obligation 1° CHEMIN DE FER - SNCF - Personnel - Statut - Sanction disciplinaire - Condition.

1° Un agent de conduite à la SNCF, conducteur de convoi, qui, au passage devant le panneau d'avertissement d'un prochain signal, se borne à actionner le dispositif de vigilance et à le réarmer sans ralentir alors qu'il en avait l'obligation, de sorte qu'il a dépassé le signal sans savoir s'il était ouvert ou fermé et ne s'est arrêté que 60 mètres plus loin commet une faute, indépendamment du point de savoir si, au moment de son franchissement, le panneau d'arrêt présentait à nouveau un signal permettant la marche normale. Les juges du fond ont pu décider que ce comportement fautif justifiait une sanction et c'est dans l'exercice de leur pouvoir souverain d'appréciation qu'ils décident qu'il n'y a pas lieu d'annuler la sanction de mise à pied de 2 jours infligée au salarié.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Pouvoir disciplinaire - Abus - Attitude fautive du salarié.

2° CHEMIN DE FER - SNCF - Personnel - Statut - Application 2° CHEMIN DE FER - SNCF - Personnel - Statut - Sanction disciplinaire - Définition 2° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Pouvoir disciplinaire - Mesure disciplinaire - Définition - Affectation provisoire d'un salarié à d'autres fonctions en vue de vérifier son aptitude.

2° Il résulte des dispositions de l'article 1, paragraphe 4 du chapitre IX du statut des agents de la SNCF que l'affectation provisoire à d'autres fonctions décidée par le chef d'établissement en vue de vérifier si l'agent possède toujours les aptitudes nécessaires à la tenue de son poste notamment lorsqu'il s'agit de fonctions tenant à la sécurité ne constitue pas une sanction disciplinaire. Dès lors, une cour d'appel qui ne retient aucun détournement de pouvoir à la charge de l'employeur, peut décider que le retrait d'un agent du service de conduite pendant la durée limitée du contrôle ne constitue pas une sanction.


Références :

Statut des agents de la SNCF art. 1, par. 4, chapitre IX

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 avril 1987


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 jui. 1991, pourvoi n°87-43405, Bull. civ. 1991 V N° 339 p. 209
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1991 V N° 339 p. 209

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Cochard
Avocat général : Avocat général :M. Chauvy
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Zakine
Avocat(s) : Avocats :la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, M. Odent.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:87.43405
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