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14/03/1991 | FRANCE | N°90-82090

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 14 mars 1991, 90-82090


REJET du pourvoi formé par :
- la compagnie d'assurances Groupe Drouot, partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, chambre correctionnelle, en date du 23 février 1990, qui, après condamnation de Marcel X... du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1382 du Code civil, 2, 3, 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce

que l'arrêt attaqué a estimé que Sophie Y..., réduite à l'état végétatif à la ...

REJET du pourvoi formé par :
- la compagnie d'assurances Groupe Drouot, partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, chambre correctionnelle, en date du 23 février 1990, qui, après condamnation de Marcel X... du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1382 du Code civil, 2, 3, 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a estimé que Sophie Y..., réduite à l'état végétatif à la suite de l'accident dont elle avait été victime le 2 octobre 1979, avait droit à une indemnité pour l'incapacité permanente partielle de 100 % dont elle restait atteinte, et ce, en sus de la prise en charge, par le tiers responsable, de l'intégralité des frais médicaux et d'hospitalisation et a ainsi condamné le Groupe Drouot à payer au père de la victime une somme de 2 millions de francs ;
" aux motifs que le juge doit réparer intégralement le préjudice résultant de l'infraction, même si le mode de réparation, en l'espèce indemnitaire, ne permet pas à la victime de faire disparaître le dommage créé par l'auteur de l'infraction ; qu'au cas d'espèce, limiter l'évaluation du dommage subi par Sophie Y... aux seules dépenses et frais médicaux nécessaires à sa subsistance et sa survie serait méconnaître la part de son préjudice résultant, du fait de son état végétatif, de la perte complète et définitive de sa santé ; que l'évaluation de l'indemnité à la somme de 2 millions de francs tient justement compte de la nécessité d'assurer à la victime une compensation dont le juge n'a pas à apprécier si Sophie Y... est ou non à même d'en tirer profit, ne pouvant préjuger de l'évolution de son état ; que le préjudice de Sophie Y... soumis au recours des organismes sociaux s'établit comme suit :
- frais médicaux et assimilés 2 895 966, 45 F.
- incapacité permanente partielle 100 % 2 000 000, 00 F.
- frais d'hospitalisation à vie durant, capitalisés 5 860 549, 50 F.
Total : 10 756 515, 95 F.
" qu'après déduction de la créance de l'organisme social il revient à M. Y..., ès qualités, une somme de 2 millions (2 000 000) de francs ;
" alors, d'une part, que si l'indemnisation d'une victime d'infraction doit être intégrale, il ne saurait en résulter pour celle-ci ni perte ni profit ; qu'en l'espèce en indemnisant le préjudice, soumis à recours, de Sophie Y..., réduite à l'état végétatif et dont elle constate qu'on ne peut préjuger de l'évolution de cet état, sous forme d'un capital représentatif des frais d'hospitalisation à vie durant et d'un capital de 2 millions de francs au titre de l'incapacité permanente partielle, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision, le mode d'indemnisation adopté ne permettant pas à la Cour de Cassation de vérifier, compte tenu de l'incertitude résultant de l'état de la victime, que les sommes allouées n'excèdent pas le préjudice ;
" alors, d'autre part, que la cour d'appel qui constate qu'on ne peut préjuger de l'évolution de l'état de la victime au moment où elle lui a octroyé une somme de 2 millions de francs au titre de l'incapacité permanente partielle n'a pas tiré les conséquences légales s'évinçant de ses propres constatations ; qu'en effet l'état végétatif de la victime ne permettant aucun calcul fondé sur une probabilité de vie, son indemnisation échappait par nature à tout système de capitalisation ; qu'ainsi, à supposer qu'une indemnité puisse être allouée pour l'incapacité permanente partielle elle ne pouvait être fixée sous forme d'un capital de 2 millions de francs ; qu'un tel mode d'indemnisation est d'autant moins justifié qu'en l'espèce la victime est décédée 10 ans après l'accident, ce qui limitait dans le temps son indemnisation qui, en réalité, a été fixée sans limitation de durée " ;
Attendu que, statuant sur l'indemnisation de Sophie Y..., réduite à l'état végétatif à la suite d'un accident dont Marcel X...avait été déclaré responsable, les juges tiennent compte, dans l'évaluation du dommage résultant de l'atteinte à l'intégrité physique, non seulement des frais d'hospitalisation passés et à venir, pris en charge par une caisse d'assurance maladie, mais encore de l'incapacité de travail de 100 % dont la victime est définitivement atteinte ; qu'à ce titre ils allouent à Yves Y..., en qualité de tuteur de sa fille, une indemnité en capital de 2 millions de francs ;
Attendu qu'en se prononçant ainsi la cour d'appel, qui était tenue de réparer dans son intégralité le préjudice de la victime-laquelle était encore en vie à la date où les juges ont statué-et qui a souverainement apprécié tant le montant du dommage que le mode d'indemnisation le plus adéquat, n'a nullement encouru les griefs allégués ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 90-82090
Date de la décision : 14/03/1991
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° ACTION CIVILE - Préjudice - Evaluation - Incapacité - Incapacité permanente totale - Préjudice distinct des frais d'hospitalisation.

1° La victime d'un accident, réduite à l'état végétatif, a droit à la réparation non seulement de ses frais de subsistance dans un hôpital ou à domicile, mais encore de l'incapacité de travail de 100 % dont elle est définitivement atteinte (1).

2° ACTION CIVILE - Préjudice - Réparation - Modalités - Rente ou capital - Appréciation souveraine.

2° Entre le versement d'une rente ou celui d'un capital, les juges du fond apprécient souverainement, s'agissant d'un accident de droit commun, le mode d'indemnisation le plus adéquat (2).


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes (chambre correctionnelle), 23 février 1990

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1988-10-11 , Bulletin criminel 1988, n° 338, p. 908 (cassation) ;

A rapprocher : Chambre civile 2, 1989-06-21 , Bulletin 1989, II, n° 133, p. 66 (cassation partielle). CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre civile 2, 1979-02-21 , Bulletin 1979, II, n° 55, p. 40 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 14 mar. 1991, pourvoi n°90-82090, Bull. crim. criminel 1991 N° 126 p. 319
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1991 N° 126 p. 319

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général :M. Galand
Rapporteur ?: Rapporteur :M. de Bouillane de Lacoste
Avocat(s) : Avocats :la SCP Rouvière, Lepître et Boutet, M. Odent

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:90.82090
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