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19/02/1991 | FRANCE | N°89-14402

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 19 février 1991, 89-14402


Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 30 janvier 1989), que la société Technal, qui exploite un modèle de joint en caoutchouc dessiné par son bureau d'études, a, sur le fondement de la loi du 11 mars 1957 sur la propriété littéraire et artistique, exercé une action en contrefaçon contre la société Stocalu, laquelle met en vente des joints de forme identique ; que la société Stocalu ayant contesté que la société Technal fût titulaire du droit de propriété incorporelle qu'elle lui opposait, la cour d'appel a déc

laré irrecevable la demande de la société Technal, au motif qu'elle ne rappo...

Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 30 janvier 1989), que la société Technal, qui exploite un modèle de joint en caoutchouc dessiné par son bureau d'études, a, sur le fondement de la loi du 11 mars 1957 sur la propriété littéraire et artistique, exercé une action en contrefaçon contre la société Stocalu, laquelle met en vente des joints de forme identique ; que la société Stocalu ayant contesté que la société Technal fût titulaire du droit de propriété incorporelle qu'elle lui opposait, la cour d'appel a déclaré irrecevable la demande de la société Technal, au motif qu'elle ne rapportait pas la preuve, dont la charge lui incombait, soit du caractère collectif de l'oeuvre litigieuse, soit de la cession de droit qui lui aurait été consentie par le ou les auteurs ;

Attendu que la société Technal fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, en premier lieu, qu'en vertu de l'article 8 de la loi du 11 mars 1957, la qualité d'auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l'oeuvre est divulguée, de sorte que la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en imposant à la société Technal de démontrer qu'elle avait divulgué une oeuvre collective ; qu'en outre, pour se déterminer ainsi, la cour d'appel s'est fondée sur l'article 6 de la même loi, qui, relatif au droit moral de l'auteur, était sans application au litige ; et alors, en troisième lieu, que la cour d'appel ne pouvait, sans contradiction, exiger de la société Technal qu'elle rapportât la preuve d'une cession de droits " par le ou les auteurs de l'oeuvre collective ", les auteurs d'une telle oeuvre ne pouvant, par définition, être individualisés ; qu'enfin, la quatrième branche du moyen énonce que la cour d'appel " ne pouvait se contenter d'affirmer que la fusion des droits des auteurs ne serait pas établie, sans déterminer si l'un ou l'autre droit existait " ;

Mais attendu, d'abord, qu'une personne morale, qui ne peut avoir la qualité d'auteur, n'est pas fondée à invoquer l'article 8 de la loi du 11 mars 1957 ; qu'en conséquence, et abstraction faite du motif critiqué par la deuxième branche du moyen, l'arrêt retient exactement que, pour être déclarée investie des droits de l'auteur sur le modèle divulgué sous son nom, il incombait à la société Technal, en vertu de l'article 13 de la même loi, d'établir que ce modèle constituait une oeuvre collective ;

Attendu, ensuite, qu'en dépit d'une impropriété de termes, la cour d'appel a constaté de façon pertinente que la société Technal n'alléguait pas agir en qualité de cessionnaire des droits d'auteur dont elle se prévalait ;

Attendu, enfin, que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel a retenu que le dessinateur, créateur du modèle litigieux, était identifiable et que la société Technal ne justifiait pas d'une fusion de la participation de cet auteur dans un ensemble sur lequel il aurait été dès lors impossible de lui attribuer un droit indivis ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 89-14402
Date de la décision : 19/02/1991
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE - Qualité d'auteur - OEuvre non collective - Personne morale - Impossibilité - Effet.

1° Une personne morale, qui ne peut avoir la qualité d'auteur, n'est pas fondée à invoquer l'article 8 de la loi du 11 mars 1957 (arrêt n° 1).

2° PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE - OEuvre collective - Preuve - Charge - Droits d'auteur - Titulaire - Personne morale.

2° PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE - Droits d'auteur - Titulaire - Personne morale - Conditions - OEuvre collective 2° PREUVE (règles générales) - Charge - Applications diverses - Propriété littéraire et artistique - OEuvre collective - Droits d'auteur - Titulaire - Personne morale 2° PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE - OEuvre collective - Définition - Impossibilité pour chacun des créateurs de se prévaloir de droits indivis - Effet.

2° En vertu de l'article 13 de la loi du 11 mars 1957, il appartient à une personne morale qui se prétend investie des droits de l'auteur sur le modèle divulgué sous son nom, d'établir que ce modèle constituait une oeuvre collective. C'est donc d'une part dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, qu'une cour d'appel retient que le dessinateur, créateur du modèle litigieux, était identifiable et que la personne morale ne justifiait pas d'une fusion de la participation de cet auteur dans un ensemble sur lequel il aurait été dès lors impossible de lui attribuer un droit indivis (arrêt n° 1). D'autre part, en l'absence de toute revendication de la part des salariés de la société qui se prétend victime de la contrefaçon et de toute indication fournie par le contrefacteur quant à la possibilité d'attribuer à des tiers des droits d'auteur sur l'oeuvre crée à l'initiative de cette personne morale et exploitée sous sa direction et son nom, une cour d'appel a pu estimer que de l'ensemble de ces divers éléments découlaient des présomptions suffisantes pour lui permettre de retenir la qualification d'oeuvre collective (arrêt n° 2).


Références :

Loi 57-298 du 11 mars 1957 art. 13
Loi 57-298 du 11 mars 1957 art. 8

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 30 janvier 1989

A RAPPROCHER : (2°). Chambre commerciale, 1985-11-05 , Bulletin 1985, IV, n° 261, p. 219 (cassation partielle)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 19 fév. 1991, pourvoi n°89-14402, Bull. civ. 1991 I N° 67 p. 43
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1991 I N° 67 p. 43

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Massip, conseiller doyen faisant fonction
Avocat général : Avocat général :Mme Flipo
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Grégoire
Avocat(s) : Avocats :la SCP Riché, Blondel et Thomas-Raquin (arrêts n°s 1 et 2), MM. Vincent (arrêt n° 1), Choucroy (arrêt n° 2).

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:89.14402
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