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30/01/1991 | FRANCE | N°89-18353

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 30 janvier 1991, 89-18353


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Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 19 mai 1989), que les époux A... sont propriétaires de parcelles agricoles données à ferme aux époux Z... ; qu'ils ont sollicité la résiliation du bail, aux motifs que, sans les en informer, les preneurs avaient mis les terres louées à la disposition d'une société civile d'exploitation ;

Attendu que les époux Z... font grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable l'intervention de M. Z... devant la cour d'appel, la liquidation des biens de M. Z..., en tant qu'entrepreneur de travaux agricoles,

ayant été prononcée, alors, selon le moyen, que, malgré son dessaisissement du che...

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Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 19 mai 1989), que les époux A... sont propriétaires de parcelles agricoles données à ferme aux époux Z... ; qu'ils ont sollicité la résiliation du bail, aux motifs que, sans les en informer, les preneurs avaient mis les terres louées à la disposition d'une société civile d'exploitation ;

Attendu que les époux Z... font grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable l'intervention de M. Z... devant la cour d'appel, la liquidation des biens de M. Z..., en tant qu'entrepreneur de travaux agricoles, ayant été prononcée, alors, selon le moyen, que, malgré son dessaisissement du chef d'une activité commerciale ayant donné lieu à un jugement de liquidation des biens, le débiteur est autorisé à se créer des ressources dans le cadre d'une activité personnelle non soumise à la procédure collective, et reste recevable à exercer une voie de recours contre une décision susceptible de fixer l'étendue de son dessaisissement ou à formuler une réclamation, lorsqu'elle ne concerne pas l'administration et la disposition de son patrimoine ; qu'en l'espèce, M. Z..., qui exerçait une activité agricole, non soumise à la procédure collective ayant donné lieu aux jugements de règlement judiciaire et de liquidation des biens, était recevable à intervenir dans la procédure en résiliation du bail rural dont il était copreneur, initiée contre son épouse, en vue de faire juger cette résiliation irrecevable et mal fondée ; que, dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles 15 de la loi du 13 juillet 1967, applicable en la cause, et 554 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel a exactement retenu que l'action en reconnaissance de la qualité de copreneur d'un bail rural, que M. Z... entendait exercer, ne visait pas un droit attaché à sa personne et que le dessaisissement, conséquence de la procédure de liquidation des biens, s'étendait à cette action ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que les époux Z... font grief à l'arrêt d'avoir prononcé la résiliation du bail, alors, selon le moyen, 1° qu'en exigeant de Mme Y... qu'elle établisse qu'elle avait continué à participer effectivement à l'exploitation, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, et ce faisant, violé, par fausse application, les articles 1315 du Code civil et L. 411-35 et L. 411-37 du Code rural ; 2° que la participation de l'un des copreneurs aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l'importance de l'exploitation, peut revêtir plusieurs formes ; qu'en retenant que Mme X... avait failli à ses obligations d'exploitante, tout en constatant que la superficie louée n'était que de 17 hectares, et que, par ailleurs, Mme X..., copreneuse, faisait les marchés, vendait les produits de l'exploitation, s'occupait du cheptel et était inscrite à la Mutualité sociale agricole (MSA), ce dont il résultait nécessairement qu'elle participait effectivement à la mise en valeur de

l'exploitation au sens des articles L. 411-27, L. 411-35 et L. 411-46 du Code rural, et n'avait pas cédé son bail, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision, au regard des textes susvisés ; 3° que la mise à disposition du bail par le preneur au profit d'une société civile d'exploitation agricole, au sens de l'article L. 411-37 du Code rural, ne constitue pas un transfert du droit au bail et exclut nécessairement la cession ; qu'au demeurant, le défaut d'information préalable du bailleur n'est pas sanctionné par la résiliation du bail ; que, dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a procédé d'une violation, par fausse application, de l'article L. 411-37 du Code rural ; 4° qu'en toute hypothèse, à supposer que le défaut d'information du bailleur, en cas d'adhésion du preneur à une société d'exploitation et de mise à disposition de son bail au profit de cette société, puisse être sanctionné, la sanction encourue ne peut être que l'inopposabilité de l'opération au bailleur, à l'exclusion de la résiliation du bail ; qu'en outre, la sanction n'est pas encourue si l'omission constatée n'a pas été de nature à induire le bailleur en erreur ; que, dès lors, en se déterminant comme elle l'a fait, sans même rechercher si l'absence d'information des époux A... sur l'opération de mise à disposition de leur bail réalisée par les époux Z... en 1980 au profit de la SCEF-Lhussier, avait été de nature à induire les bailleurs en erreur, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 411-37 du Code rural ; 5° que le fait pour certains associés d'une société civile d'exploitation d'exercer une activité principale non agricole n'est pas en lui-même de nature à interdire l'opération de mise à disposition par le preneur de son bail au profit de la société, dès lors que lesdits associés sont inscrits à la MSA et participent aux travaux de l'exploitation en adaptant cette participation à la superficie mise en valeur ; qu'en toute hypothèse, en cas d'infraction à cette condition de participation, la résiliation du bail ne peut être encourue qu'un an après une mise en demeure de régulariser la situation, notifiée par le bailleur au preneur ; que, dès lors, en se déterminant comme elle l'a fait, et en se bornant à retenir que les associés de la SCEF-Lhussier - à l'exception des preneurs - avaient une activité principale qui n'était pas agricole, et en l'absence de toute mise en demeure notifiée au preneur, la cour d'appel n'a pas, davantage, légalement justifié sa décision de ce nouveau chef au regard de l'article L. 411-37 du Code rural ;

Mais attendu qu'après avoir exactement retenu que, faute d'avoir préalablement informé les bailleurs de la mise des terres affermées à la disposition d'une société d'exploitation, les époux Z... ne pouvaient se prévaloir des dispositions de l'article L. 411-37 du Code rural, la cour d'appel, qui a constaté la confusion des exploitations des terres louées avec celles de la société et qui en a déduit, à bon droit, la réalisation d'une opération interdite par l'article L. 411-35 du Code rural, a, par ces seuls motifs, sans inverser la charge de la preuve, légalement justifié sa décision de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 89-18353
Date de la décision : 30/01/1991
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° REGLEMENT JUDICIAIRE - LIQUIDATION DES BIENS (loi du 13 juillet 1967) - Effets - Dessaisissement du débiteur - Bail rural - Bail à ferme - Action en reconnaissance de la qualité de copreneur.

1° Le dessaisissement, conséquence de la procédure de la liquidation des biens, s'étend à l'action en reconnaissance de la qualité de copreneur d'un bail rural.

2° BAIL RURAL - Bail à ferme - Mise à disposition - Société d'exploitation agricole - Information préalable du bailleur - Défaut - Effet.

2° BAIL RURAL - Bail à ferme - Résiliation - Causes - Cession - Mise à disposition d'une société d'exploitation agricole - Défaut d'information préalable du bailleur.

2° Faute pour les preneurs d'avoir informé préalablement le bailleur de la mise à la disposition d'une société d'exploitation des terres affermées, ceux-ci ne pouvaient se prévaloir de l'article L. 411-37 du Code rural et la cour d'appel qui a constaté la confusion des exploitations en a déduit exactement la réalisation d'une opération interdite par l'article L. 411-15 du Code rural.


Références :

Code rural L411-37, L411-35
Loi 67-563 du 13 juillet 1967

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 19 mai 1989


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 30 jan. 1991, pourvoi n°89-18353, Bull. civ. 1991 III N° 45 p. 26
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1991 III N° 45 p. 26

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Senselme
Avocat général : Avocat général :M. Mourier
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Garban
Avocat(s) : Avocats :la SCP Célice et Blancpain, M. Cossa.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:89.18353
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