La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/10/1990 | FRANCE | N°90-80045

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 02 octobre 1990, 90-80045


REJET du pourvoi formé par :
- X... Jean,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, chambre correctionnelle, du 21 novembre 1989, qui, sur renvoi après cassation, l'a condamné à 5 000 francs d'amende, dont 4 000 francs avec sursis, ainsi qu'à des réparations civiles, pour provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminées.
LA COUR,
Vu l'arrêt de la Cour de Cassa

tion du 7 mars 1989 ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassa...

REJET du pourvoi formé par :
- X... Jean,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, chambre correctionnelle, du 21 novembre 1989, qui, sur renvoi après cassation, l'a condamné à 5 000 francs d'amende, dont 4 000 francs avec sursis, ainsi qu'à des réparations civiles, pour provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminées.
LA COUR,
Vu l'arrêt de la Cour de Cassation du 7 mars 1989 ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation de l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881, des articles 50 et 53 de ladite loi, et de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse à conclusions et manque de base légale :
" en ce que, par l'arrêt attaqué, la Cour a rejeté l'exception de prescription de l'action publique soulevée par le prévenu à l'encontre des poursuites dont il faisait l'objet pour provocation à la discrimination raciale par citation du 18 janvier 1985 et a condamné le prévenu à une peine d'amende et à dommages-intérêts au profit du MRAP, partie civile,
" 1° aux motifs, d'une part, que le point de départ de la prescription est fixé par la date de la publication, qu'en l'espèce la seule date mentionnée sur le tract incriminé est celle d'octobre 1984, que c'est donc le premier fait avéré de distribution qui, entre le 1er et le 30 octobre 1984, fixe le point de départ de la prescription, que le seul document produit aux débats et faisant état d'une date précise de distribution est la lettre adressée, le 26 octobre 1984, au procureur de la République de Marseille par M. Y... qui indique avoir reçu le tract dans la boîte aux lettres de son domicile " le 24 octobre 1984 ", que dans ces conditions le mandement de citation et la citation elle-même du 18 janvier 1985, acte interruptif de prescription, sont bien intervenus dans le délai de 3 mois prévu par l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 ;
" alors que, d'une part, lorsqu'un journal ou un écrit porte la date d'une semaine ou d'un mois, il doit être considéré comme daté du premier jour de la période qu'il convient de considérer et que le tract litigieux portant comme date " octobre 1984 ", il devait être considéré comme ayant été publié et distribué le 1er octobre 1984 sauf preuve contraire à la charge de l'accusation, en sorte que la citation du 18 janvier 1985 étant postérieure de plus de 3 mois à cette publication, l'action publique aurait dû être déclarée prescrite ;
" alors que, d'autre part, le prévenu avait " soutenu dans son mémoire d'appel sans être démenti qu'il résultait des déclarations de M. Y..., plaignant au journal Le Provençal du 2 novembre 1984 que le tract litigieux avait été diffusé " début du mois " d'octobre, c'est-à-dire à tout le moins dans la première quinzaine dudit mois, qu'il s'en déduisait que, la preuve se trouvant rapportée d'une diffusion plus de 3 mois avant la citation, l'action publique devait être déclarée prescrite ;
" alors qu'enfin la Cour ne pouvait s'abstenir de répondre aux moyens de défense soulevés par le prévenu, qui, se fondant sur les déclarations de M. Y... au journal Le Provençal, établissaient que la diffusion du tract avait eu lieu au plus tard à la fin de la première quinzaine d'octobre 1984, soit plus de 3 mois avant la citation du 18 janvier 1985,
" 2° aux motifs d'autre part que les actes cotés au dossier de la procédure sous les n° s D. 16 (instructions adressées par le procureur de la République au commissariat central de Marseille pour faire procéder à une enquête sur les faits dénoncés dans certaines lettres), D. 35 (instructions adressées le 10 décembre 1984 pour complément d'enquête), D. 34 (audition du prévenu le 4 décembre 1984), constituent des actes de poursuite et d'instruction qui ont régulièrement interrompu la prescription ;
" alors que ne sont pas interruptifs de prescription les procès-verbaux d'enquête officieux de la police destinés à recueillir de simples renseignements, qui n'ont pas le caractère d'actes de poursuite et qui ne font pas suite à une plainte régulière au regard des articles 50 et 53 de la loi du 29 juillet 1881 ou à des poursuites régulièrement initiées par le Parquet ; que ne pouvaient donc pas être considérés comme interruptifs de prescription les actes cotés au dossier de la procédure sous les n°s D. 16, D. 34, D. 35 et D. 36, en l'absence de toute plainte régulière au regard des articles 50 et 53 précités, ou de toute poursuite du Parquet, déposée ou mise en oeuvre entre le début d'octobre 1984 et la citation du 18 janvier 1985 qui soient susceptibles d'interrompre le cours de la prescription, en sorte qu'en l'état de cette situation, la Cour aurait dû constater que la prescription de l'action publique se trouvait acquise lors de la délivrance de la citation du 18 janvier 1985 " ;
Attendu que, pour écarter l'exception soulevée par le prévenu qui soutenait que le tract incriminé, daté d'octobre 1984, sans autre précision, avait été distribué au début du mois, en tout cas dans la première quinzaine de celui-ci et, qu'aucun acte interruptif de prescription valable n'étant intervenu entre le 1er octobre 1984 et le 18 janvier 1985, date du mandement de citation, la prescription était acquise à cette dernière date, la cour d'appel énonce que c'est le premier fait avéré de distribution entre le 1er et le 30 octobre 1984 qui fixe le point de départ de la prescription ; que les juges constatent que le seul document produit aux débats et faisant état d'une date précise de distribution est la lettre adressée le 26 octobre 1984 au procureur de la République indiquant que le plaignant avait reçu le tract le 24 octobre 1984 ; qu'ils en déduisent que le mandement de citation et la citation elle-même, en date du 18 janvier 1985, sont bien intervenus dans le délai de 3 mois prévu par l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Attendu qu'en cet état l'arrêt attaqué n'encourt pas les griefs du moyen ;
Qu'en effet, d'une part, les juges ont exposé, sans insuffisance, les raisons pour lesquelles la seule date de publication qu'ils pouvaient prendre en considération était celle du 24 octobre 1984 ; qu'ils n'avaient pas à s'expliquer davantage sur de prétendues déclarations rapportées dans un article de presse dont d'ailleurs aucun exemplaire n'était annexé aux conclusions qui leur étaient soumises ;
Que, d'autre part, en matière d'infraction à la loi sur la presse, il appartient aux juges du fait, pour fixer le point de départ de la prescription, de déterminer, d'après les circonstances de la cause, la date du premier acte de publication par lequel le délit a été commis ; que cette appréciation est souveraine lorsque, comme tel est le cas, elle est déduite de motifs relevant des faits susceptibles de l'étayer ;
Qu'enfin le motif critiqué par la deuxième branche du moyen est surabondant dès lors que l'acte introductif d'instance a été établi avant l'expiration du délai de prescription ; qu'il s'ensuit que sur ce point, le moyen est inopérant ;
Qu'ainsi celui-ci ne peut être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 90-80045
Date de la décision : 02/10/1990
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

PRESSE - Procédure - Action publique - Extinction - Prescription - Délai - Point de départ - Provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée - Date du premier acte de publication - Détermination

PRESCRIPTION - Action publique - Délai - Point de départ - Presse - Provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée - Date du premier acte de publication - Détermination

PRESSE - Procédure - Action publique - Extinction - Prescription - Délai - Point de départ - Provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée - Date du premier acte de publication - Tract - Distribution

En matière d'infraction à la loi sur la presse, il appartient aux juges du fond, pour fixer le point de départ de la prescription, de déterminer, d'après les circonstances de la cause, la date du premier acte de publication par lequel le délit a été commis ; cette appréciation est souveraine lorsqu'elle est déduite de motifs relevant des faits susceptibles de l'étayer (1).


Références :

Loi du 29 juillet 1881 art. 50, art. 53, art. 65

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon (chambre correctionnelle), 21 novembre 1989

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1974-01-05 , Bulletin criminel 1974, n° 4, p. 7 (cassation), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1981-12-01 , Bulletin criminel 1981, n° 320, p. 841 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 02 oct. 1990, pourvoi n°90-80045, Bull. crim. criminel 1990 N° 328 p. 830
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1990 N° 328 p. 830

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Berthiau, conseiller doyen faisant fonction
Avocat général : Avocat général :Mme Pradain
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Zambeaux
Avocat(s) : Avocat :M. Pradon

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1990:90.80045
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award