REJET du pourvoi formé par :
- X... Richard,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, en date du 26 octobre 1989, qui, dans les poursuites suivies contre lui des chefs de fraude fiscale tant à titre personnel qu'en qualité de gérant de la SARL Pressings Saint-Louis et de tenue irrégulière de comptabilité, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, 30 000 francs d'amende, outre la publication et l'affichage, et a prononcé sur les demandes de l'Administration partie civile.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris dans ses première et deuxième branche de la violation des articles 1741 et 1743 du Code général des impôts, des articles L. 176, L. 181, L. 227 et L. 238 du Livre des procédures fiscales, 1315 du Code civil, 427 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré le prévenu coupable de dissimulation volontaire de sommes sujettes à l'impôt et d'omission de passation d'écritures ;
" aux motifs que sur les poursuites engagées contre le prévenu à titre personnel, ce dernier soutient avoir bénéficié de divers versements en provenance de sa famille, en vue de combler le déficit de sa société, mais qu'il n'a pu produire que des justifications très partielles des ressources par lui invoquées ; qu'il est manifeste que l'ensemble de ces ressources provenaient de son activité professionnelle et ont été sciemment dissimulées à l'Administration ; que sur les poursuites engagées contre le prévenu en sa qualité de gérant de la SARL Pressings Saint-Louis, ce dernier soutient que les calculs de l'Administration relatifs à l'activité de la société, basés sur la consommation en perchloréthylène, auraient été faussés par le mauvais état des machines, mais que la reconstitution de cette activité prend en compte non seulement la consommation de solvants mais encore le poids de linge traité et les carnets à souche saisis ; que le recoupement de l'ensemble de ces informations aboutit de façon concordante à la conclusion que le chiffre d'affaires a été sensiblement minoré ; que le prévenu croit pouvoir faire état de sa bonne foi, mais que l'examen de la comptabilité de la société révèle de nombreuses anomalies relatives tant au recensement imprécis des stocks qu'à la tenue du compte-caisse qui s'est avéré erronée ; que l'élément intentionnel résulte également de la constance et de l'importance des dissimulations ;
" alors, d'une part, que l'administration fiscale ayant la charge de la preuve de la culpabilité du prévenu qu'elle a attrait devant la juridiction répressive et ce dernier n'ayant pas à rapporter la preuve de son innocence, en déclarant le demandeur coupable de dissimulation de sommes sujettes à l'impôt sur le revenu parce qu'il n'avait pu produire que ces justifications très partielles pour les sommes ayant été portées au crédit de ses comptes, les juges du fond ont renversé la charge de la preuve ;
" alors, d'autre part, que le prévenu ayant, dans ses conclusions d'appel, fait valoir qu'il avait produit des actes de prêt et des attestations justifiant de la nature et de l'origine des sommes litigieuses, les juges du fond qui n'ont tenu aucun compte de ces offres de preuve auxquelles ils n'ont fait aucune allusion, ont ainsi laissé sans réponse un moyen péremptoire de défense du prévenu et privé leur décision de motifs " ;
Attendu que les juges du fond, pour retenir la culpabilité de X... du chef de fraude à l'impôt sur le revenu, relèvent que ce dernier avait disposé à titre personnel - ainsi que le laissait apparaître l'examen de ses comptes bancaires - de revenus, très supérieurs à ceux déclarés, qu'il avait sciemment dissimulés à l'Administration ; qu'ils ajoutent que l'intéressé avait allégué des prêts familiaux pour justifier ses crédits bancaires, sans toutefois être en mesure d'en rapporter la preuve ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'il appartient à celui qui soulève une exception d'en prouver le bien-fondé, les juges du fond ont, sans inverser la charge de la preuve, caractérisé dans tous ses éléments constitutifs le délit visé à la prévention ;
Sur le moyen pris en sa troisième branche de la violation des articles 1741 et 1743 du Code général des impôts, des articles L. 176, L. 181, L. 227 et L. 238 du Livre des procédures fiscales, 1315 du Code civil, 427 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré le prévenu coupable de dissimulation volontaire de sommes sujettes à l'impôt et d'omission de passation d'écritures ;
" alors en outre que le juge judiciaire ne pouvait pas, en l'absence de toute constatation puisée par lui dans les éléments de preuve soumis aux débats contradictoires, se fonder sur les seules évaluations que l'Administration a été amenée à faire selon des procédures propres pour établir des calculs d'assiette en vue de rehaussements d'office ; qu'en se bornant à faire état des évaluations de l'Administration relatives à l'activité de la société calculées par elle à partir de la consommation de solvants, du poids de linge traité et des carnets à souche saisis, pour déclarer le prévenu coupable du délit de dissimulation volontaire qui lui était reproché, les juges du fond ont privé leur décision de toute base légale ;
Attendu que les juges du fond relèvent, pour caractériser la dissimulation de partie des sommes sujettes à l'impôt dans le cadre de l'activité de la société, que le chiffre d'affaires avait fait l'objet d'une déclaration sur des bases relativement faibles ; que la reconstitution de l'activité de la SARL prenant en compte, en les recoupant, les données résultant de la consommation des produits de nettoyage, le poids des linges traités et les carnets de reçus remis aux clients, aboutissaient de manière concordante à mettre en évidence une minoration du chiffre d'affaires de l'ordre de 40 % ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, et dès lors qu'elle ne s'est pas bornée à rappeler les constatations faites par l'Administration selon les procédures et finalités propres à celle-ci, mais s'est au contraire attachée à en tirer les conséquences utiles pour les poursuites pénales et à en vérifier le bien fondé pour caractériser l'élément matériel de la fraude, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Sur le moyen de cassation pris en sa quatrième branche de la violation des articles 1741 et 1743 du Code général des impôts, des articles L. 176, L. 181, L. 227 et L. 238 du Livre des procédures fiscales, 1315 du Code civil, 427 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré le prévenu coupable de dissimulation volontaire de sommes sujettes à l'impôt et d'omission de passation d'écritures ;
" alors, enfin que le recensement imprécis des stocks dans la comptabilité de la société et l'existence d'erreurs minimum dans la tenue du compte-caisse n'impliquaient nullement l'intention coupable du prévenu ; qu'en invoquant ces éléments de fait ainsi que l'existence de dissimulations résultant des seules évaluations de l'administration fiscale pour en déduire la preuve de l'élément intentionnel des infractions reprochées au prévenu, les juges du fond ont violé l'article L. 227 du Livre des procédures fiscales " ;
Attendu que l'arrêt énonce d'une part, que les ressources personnelles provenant de l'activité professionnelle de X... ont été sciemment dissimulées à l'Administration, que d'autre part, en ce qui concerne les obligations fiscales de la société, les minorations constatées procédaient, compte tenu de leur constance et de leur importance, d'agissements intentionnels ; qu'il en était également ainsi de la tenue irrégulière de la comptabilité, en raison de la multiplicité et de la gravité des anomalies ou lacunes des comptes de stocks ou de caisse ;
Attendu qu'en prononçant ainsi la cour d'appel a, contrairement aux allégations du moyen, justifié sa décision ;
Que le moyen ne saurait dès lors être accueilli ;
Attendu que l'arrêt est par ailleurs régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.