Attendu qu'il résulte des énonciations des juges du second degré que la République du Guatemala a assigné la Société internationale de négoce du café et du cacao (SINCAFC) devant le tribunal de commerce de Paris dans le ressort duquel celle-ci a son siège, ainsi que la Société arabe de torréfaction (SATC), M. X..., dirigeant de cette dernière, la société Cotterelle, transitaire, la société de droit hondurien Beneficio Merendon et M. Y..., 1°/ en annulation pour cause illicite ou en inopposabilité sur le fondement de l'article 1167 du Code civil de la vente, à Paris, le 17 juin 1986, d'un lot de café en provenance du Honduras, par SATC à SINCAFC, 2°/ en paiement de droits de douane et 3°/ en restitution de la marchandise ou de la valeur ou encore les mêmes sommes à titre de dommages-intérêts ; qu'à l'appui de ses demandes, la République du Guatemala prétend que SINCAFC a, en réalité, avec la complicité de M. Y..., exportateur local et de SATC, acquéreur fictif, et en utilisant de faux documents d'origine, fait sortir du Guatemala une qualité de café dont l'exportation est interdite par la réglementation de ce pays, sans acquitter les droits de douane, impôts et redevances dus et en payant le prix en violation de la législation guatémaltèque sur les changes ; que l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 20 janvier 1988), rendu sur contredit, a accueilli l'exception d'incompétence soulevée par SINCAFC aux motifs qu'à défaut de convention internationale définissant une coopération réciproque ou un objectif de solidarité évident, les juridictions françaises ne sont pas compétentes pour appliquer les règles de droit public fiscal, douanier ou économique d'un Etat étranger ;.
Sur le moyen unique, pris en ses quatre premières branches :
Attendu que la République du Guatemala reproche à la cour d'appel d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d'une part, qu'en déduisant son incompétence de la seule nature des règles de droit éventuellement applicables au fond du litige, la cour d'appel a méconnu l'article 42 du nouveau Code de procédure civile et les articles 4 et 15 du Code civil ; alors, d'autre part, que celle-ci a également violé les accords internationaux du café auxquels sont parties la France et le Guatemala et qui définissent une politique de coopération réciproque ; alors, de troisième part, que l'interdiction d'exporter la qualité déterminée de café ne constitue pas une règle de droit public que les tribunaux français seraient incompétents pour appliquer mais une loi régissant les rapports juridiques entre personnes privées, si bien qu'en se déclarant incompétents, les juges du second degré ont encore violé les articles 4 et 15 du Code civil et les principes de la compétence internationale des juridictions françaises ; alors, de quatrième part, qu'en se déclarant aussi incompétente pour statuer sur la demande en tant qu'elle était fondée sur la loi française, au motif que l'application de cette loi nécessitait la prise en considération de lois de police étrangères, la cour d'appel a violé les textes et principes susmentionnés ;
Mais attendu qu'il résulte des principes de droit international régissant les relations entre Etats que, dans la mesure où du point de vue de la loi du for, leur objet est lié à l'exercice de la puissance publique, les demandes d'un Etat étranger fondées sur des dispositions de droit public ne peuvent être portées devant les juridictions françaises ; que, toutefois, le principe peut être écarté, notamment, si, du point de vue du for, les exigences de la solidarité internationale ou la convergence des intérêts en cause le justifient ;
Attendu, en premier lieu, qu'il ne peut être ainsi reproché à l'arrêt attaqué d'avoir, préalablement à tout rattachement de compétence internationale tiré de la nationalité ou de la localisation des défendeurs, déduit de l'objet même des demandes de la République du Guatemala le défaut de pouvoir de juridiction ; qu'en deuxième lieu, il ressort des écritures du demandeur, tant devant les premiers juges que devant la cour d'appel, que l'illicéité de l'exportation était fondée seulement au regard de la réglementation guatémaltèque du commerce extérieur et non sur la violation d'accords internationaux exprimant une exigence de solidarité entre la France et le Guatemala et alors, au surplus, que le moyen ne critique pas la constatation de l'arrêt attaqué selon laquelle " les accords relatifs aux quotas ont été dénoncés avant les faits survenus en juin 1986 " ; qu'ensuite, la revendication d'une marchandise exportée illicitement, fondée sur un droit de suite invoqué par l'Etat étranger, suffit à traduire l'exercice d'une prérogative de puissance publique indépendamment du fait que la règle de droit public en cause s'incorpore à la loi du contrat ou que sa violation s'exprime par une qualification tirée de la loi française ;
Attendu, ainsi, que la cour d'appel, qui, statuant sur contredit, n'avait pas à apprécier des questions de fond dont ne dépendaient pas le pouvoir de juger et la compétence, n'a violé aucune des règles françaises sur la compétence judiciaire internationale ;
Sur les cinquième et sixième branches du moyen : (sans intérêt) ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi