CASSATION sur le pourvoi formé par :
- le procureur général près la cour d'appel de Paris,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de ladite Cour, en date du 20 avril 1988, qui, dans la procédure suivie contre Jérôme X... du chef de proxénétisme, a infirmé l'ordonnance du juge d'instruction rejetant la demande de mise en liberté présentée par le susnommé.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 145, alinéas 2 et 3, 593 du Code de procédure pénale,
Vu lesdits articles ensemble les articles 51, 80 et 145-1, alinéa 1er, du Code de procédure pénale ;
Attendu que le juge d'instruction est saisi des faits qui lui sont dénoncés par le réquisitoire introductif, indépendamment de la qualification qui leur est donnée ; que, s'il apparaît, en cours d'information, que ces faits doivent recevoir une qualification différente de celle qui a été retenue lors de l'interrogatoire de première comparution et qu'en raison de la peine alors encourue, la durée de la détention provisoire s'en trouve modifiée, le titre initial de détention demeure valable mais, à compter de la notification de la nouvelle inculpation, la détention se trouve soumise aux règles qui découlent de la nouvelle qualification ;
Attendu qu'il résulte des pièces de la procédure qu'à la suite d'une enquête de police ayant révélé, à l'encontre de Jérôme X..., des faits de proxénétisme accompagnés de menaces, une information a été ouverte le 3 octobre 1987 pour proxénétisme " simple ", délit prévu par l'article 334 du Code pénal et puni d'une peine de 3 années d'emprisonnement ; que, le même jour, X... a été placé en détention provisoire ; que, par ordonnance du 26 janvier 1988, la détention a été ensuite prolongée " pour une durée de 4 mois " à compter du 3 février 1988 à 0 heure ;
Attendu que, l'information ayant permis de confirmer l'existence des menaces qui auraient été exercées par l'inculpé, le juge d'instruction, sur réquisitions supplétives du ministère public, a, le 14 mars 1988, notifié à X... une inculpation de proxénétisme aggravé, délit prévu par l'article 334-1 du Code pénal et, comme tel, puni d'une peine d'emprisonnement de 10 années ; que, le lendemain, X... a présenté une demande de mise en liberté ;
Attendu que, pour infirmer l'ordonnance du juge d'instruction rejetant cette demande, la chambre d'accusation relève que l'inculpation " supplétive ", qui faisait apparaître un élément " n'existant pas de manière explicite au stade de l'enquête préliminaire ", n'avait pas encore été notifiée lors de la prolongation de la détention en sorte que, l'inculpation initiale n'entraînant qu'une peine d'emprisonnement inférieure à 5 ans, la détention ne pouvait être prolongée au-delà de 2 mois, délai qui était expiré au moment où elle statuait ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que la nouvelle inculpation concernait les faits initiaux et que sa notification, intervenue dans le délai prévu par l'article 145-1, alinéa 2, du Code de procédure pénale, avait eu pour effet de permettre la prolongation de détention ordonnée pour 4 mois, la chambre d'accusation a méconnu les principes ci-dessus rappelés ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris du 20 avril 1988, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris autrement composée.