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26/03/1990 | FRANCE | N°88-84584

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 26 mars 1990, 88-84584


CASSATION et RENVOI PARTIEL sur les pourvois formés par :
- X... Charles,
- Y... Jean-Louis,
contre l'arrêt de la chambre correctionnelle de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 18 décembre 1987 qui, dans la procédure suivie contre eux du chef de recel de vol aggravé, a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu la connexité, joignant les pourvois ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Mais sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 2, 3 et 591 d

u Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a condamné solid...

CASSATION et RENVOI PARTIEL sur les pourvois formés par :
- X... Charles,
- Y... Jean-Louis,
contre l'arrêt de la chambre correctionnelle de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 18 décembre 1987 qui, dans la procédure suivie contre eux du chef de recel de vol aggravé, a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu la connexité, joignant les pourvois ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Mais sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 2, 3 et 591 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a condamné solidairement les prévenus à payer au Groupe Drouot, assureur de la SARL Comptoir de diffusion de boissons, la somme de 113 822 francs ;
" alors que seuls peuvent exercer l'action civile devant la juridiction répressive ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l'infraction ; que la constitution de partie civile de l'assureur, en tant que subrogé à la victime d'un vol, est irrecevable et qu'il appartenait à la cour d'appel, même d'office, de constater cette irrecevabilité " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que selon les dispositions de l'article 2 du Code de procédure pénale, le droit d'exercer l'action civile devant les juridictions répressives n'appartient qu'à ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l'infraction ;
Attendu que statuant sur les intérêts civils dans la procédure suivie contre Jean-Louis Y... et Charles X... du chef de recel, la cour d'appel, faisant droit aux demandes présentées par la compagnie Groupe Drouot, assureur de la victime du vol, a condamné les prévenus à lui payer divers dommages-intérêts, en remboursement de l'indemnisation de l'assuré ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que la compagnie Groupe Drouot ne pouvait en l'espèce obtenir réparation du préjudice par elle allégué, lequel n'était que la conséquence du contrat d'assurance conclu avec la victime, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;
Que la cassation est dès lors encourue de ce chef, et ce, sans renvoi, en raison de l'irrecevabilité de l'action civile de la compagnie Groupe Drouot ;
Et sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 55 et 460 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a condamné solidairement les prévenus à payer la somme de 113 822 francs aux compagnies du Groupe Drouot et la somme de 12 161 francs à la SARL Comptoir de diffusion de boissons ;
" aux motifs qu'on se trouve en présence d'un cambriolage unique portant en particulier sur une importante quantité d'alcool et de spiritueux, dont une partie a été retrouvée dans les deux établissements, l'un géré par Y... et X..., et l'autre exploité par Z... ; qu'on ne saurait, dans ces conditions, opérer un cantonnement de la solidarité à partir des seules bouteilles retrouvées chez les receleurs connus ;
" alors que, lorsque l'auteur du vol, délit principal, est resté inconnu, le receleur ne peut être tenu que dans la limite des faits retenus à sa charge ; que, dès lors, la condamnation solidaire de Y... et X... à réparer la totalité du préjudice résultant d'un vol commis au préjudice de la SARL Comptoir de diffusion de boissons dont ils n'ont recelé qu'une partie seulement des boissons dérobées, n'est pas légale ;
" et alors que, en tout état de cause, la solidarité entre receleurs des produits provenant d'un même vol ne peut être prononcée qu'au cas de connexité entre les différents recels ; que l'arrêt attaqué n'établit nullement que les recels imputés à Y... et X... d'une part, et à M. Z... d'autre part, eussent été connexes ; que, dès lors, la condamnation solidaire prononcée entre eux n'a pas de base légale " ;
Vu lesdits articles, ensemble l'article 203 du Code de procédure pénale ;
Attendu que la solidarité édictée par l'article 55 du Code pénal qui s'impose au juge comme une conséquence légale de la condamnation qu'il prononce, ne saurait être étendue aux dommages-intérêts résultant de faits connexes pour lesquels aucune personne n'a été condamnée ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que Jean-Louis Y... et Charles X... ont été définitivement déclarés coupables d'avoir sciemment recelé partie des bouteilles d'alcool provenant d'un vol aggravé commis, par auteur non identifié, au préjudice de la SARL Comptoir de diffusion de boissons ;
Attendu que statuant sur la demande en réparation de ladite société, constituée partie civile, la cour d'appel, après avoir relevé que les faits se rapportent à un unique cambriolage portant sur une importante quantité d'alcools dont une partie a été retrouvée dans l'établissement des prévenus, retient qu'en raison de la connexité évidente en l'espèce, la solidarité est applicable en cas de recel partiel et que dans ces conditions, il ne saurait être envisagé d'opérer un cantonnement de cette solidarité à partir des seules bouteilles retrouvées chez les receleurs connus ; que les juges du second degré en concluent que les prévenus seront solidairement tenus de réparer la totalité du préjudice subi par la partie civile ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'en l'espèce, les condamnés ne pouvaient être tenus à réparation solidaire qu'entre eux, dans la limite des faits retenus à leur charge, la cour d'appel a méconnu les textes et le principe susvisés ;
Que la cassation est également encourue de ce chef ;
Et sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation des articles 55, alinéa 2, et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné solidairement Y..., X... et Z... aux dépens de l'appel, sans énoncer aucun motif justifiant cette solidarité ;
" alors que, aux termes de l'article 55 du Code pénal, le Tribunal qui prononce, contre un prévenu qui s'est entouré de coauteurs ou de complices insolvables, une condamnation solidaire à payer les amendes et les frais doit rendre une décision spéciale et motivée " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'aux termes de l'article 55, alinéa 2, du Code pénal, le Tribunal peut, par décision spéciale et motivée, ordonner que le prévenu qui s'est entouré de coauteurs ou de complices insolvables sera tenu solidairement des frais ;
Attendu que, par l'arrêt attaqué, la cour d'appel s'est bornée à condamner solidairement les prévenus Y..., X... et Z... aux dépens de l'appel sans énoncer aucun motif de nature à justifier cette solidarité ;
Que la cassation est derechef encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 18 décembre 1987 ;
Attendu qu'il ne reste rien à juger sur l'action de la compagnie Groupe Drouot ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi sur ce point ;
RENVOIE pour le surplus la cause et les parties devant la cour d'appel de Nîmes.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 88-84584
Date de la décision : 26/03/1990
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° ACTION CIVILE - Préjudice - Préjudice direct - Définition - Assureur - Remboursement de sommes dues en vertu du contrat d'assurance (non).

1° ACTION CIVILE - Recevabilité - Assureur - Remboursement de sommes dues en vertu du contrat d'assurance (non) 1° ASSURANCE - Contrat d'assurance - Assureur - Préjudice - Préjudice direct - Définition - Remboursement de sommes dues en vertu du contrat (non).

1° Le droit d'exercer l'action civile devant les juridictions répressives n'appartient qu'à ceux qui ont personnellement et directement souffert du dommage causé par l'infraction. Il s'ensuit qu'est irrecevable la constitution de partie civile de l'assureur de la victime d'un délit de vol en vue d'obtenir le remboursement des sommes versées par lui en vertu du contrat d'assurance, le préjudice invoqué n'étant que la conséquence du contrat conclu entre les parties

2° SOLIDARITE - Domaine d'application - Infractions connexes ou indivisibles - Connexité - Vol et recel - Receleur n'ayant reçu qu'une partie des objets volés - Conditions.

2° CONNEXITE - Effet - Solidarité - Vol et recel - Receleur n'ayant reçu qu'une partie des objets volés - Conditions.

2° La solidarité édictée par l'article 55 du Code pénal, qui s'impose au juge comme une conséquence légale de la condamnation qu'il prononce, ne saurait être étendue aux dommages-intérêts résultant de faits connexes pour lesquels aucune personne n'a été condamnée. Il s'ensuit que doit être censuré l'arrêt d'une cour d'appel qui, pour condamner solidairement des receleurs à réparer la totalité du préjudice subi par la victime d'un vol unique commis par auteur non identifié et dont partie des objets volés a été retrouvée chez les divers prévenus, retient qu'en raison de la connexité, évidente en l'espèce, la solidarité, applicable en cas de recel partiel, ne saurait être cantonnée à partir des seuls objets retrouvés chez les prévenus

3° FRAIS ET DEPENS - Solidarité - Prévenu s'étant entouré de coauteurs ou complices insolvables - Décision spéciale et motivée - Nécessité.

3° SOLIDARITE - Frais et dépens - Prononcé - Décision spéciale et motivée - Nécessité.

3° Ne répond pas aux prescriptions de l'article 55, alinéa 2, du Code pénal qui exige qu'il soit prononcé par une décision spéciale et motivée, l'arrêt d'une cour d'appel qui se borne à condamner solidairement des prévenus aux dépens, sans énoncer aucun motif de nature à justifier cette solidarité


Références :

Code pénal 55 al. 2

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18 décembre 1987


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 26 mar. 1990, pourvoi n°88-84584, Bull. crim. criminel 1990 N° 130 p. 348
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1990 N° 130 p. 348

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Tacchella, conseiller le plus ancien faisant fonction. -
Avocat général : Avocat général :M. Libouban
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Bayet
Avocat(s) : Avocats :la SCP Waquet, Farge et Hazan, la SCP Rouvière, Lepître et Boutet

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1990:88.84584
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