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22/03/1990 | FRANCE | N°89-81443

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 mars 1990, 89-81443


CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- X... Christelle, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle, en date du 26 janvier 1989, qui a déclaré amnistiées les contraventions reprochées à Patrick Y... et l'a relaxé du chef de blessures involontaires et qui, après condamnation définitive de Francis Z... du chef du même délit, a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que Christelle X..., qui conduisait un cyclomoteur, a

été victime d'un accident de la circulation ; qu'en voulant éviter, dans un virag...

CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- X... Christelle, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle, en date du 26 janvier 1989, qui a déclaré amnistiées les contraventions reprochées à Patrick Y... et l'a relaxé du chef de blessures involontaires et qui, après condamnation définitive de Francis Z... du chef du même délit, a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que Christelle X..., qui conduisait un cyclomoteur, a été victime d'un accident de la circulation ; qu'en voulant éviter, dans un virage, la voiture de Francis Z..., qui se trouvait en stationnement irrégulier, elle a fait un large écart et est venue heurter, dans la partie gauche de la chaussée, le véhicule de Patrick Y... qui circulait en sens inverse ;
Attendu que, pour débouter la partie civile de ses demandes dirigées contre ces deux automobilistes, la cour d'appel indique que le fait que la cyclomotoriste ait disposé de 2,70 mètres pour passer entre les deux véhicules démontre que les deux contraventions au Code de la route reprochées aux conducteurs des véhicules automobiles n'ont pas été une cause génératrice de l'accident ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 1 et 4 de la loi du 5 juillet 1985, des articles 2 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Mlle X... entièrement responsable des conséquences dommageables de l'accident du 13 juillet 1986 et l'a en conséquence déboutée de son action civile dirigée contre MM. Z... et Y... ;
" aux motifs que le choc entre le cyclomoteur de Mlle X... et le véhicule de M. Y... a eu lieu dans le couloir de circulation de ce dernier ; que lorsqu'elle s'est déportée sur la gauche pour éviter le véhicule en stationnement de M. Z..., elle disposait d'une largeur de chaussée de 2,70 mètres pour passer entre les deux véhicules (arrêt attaqué p. 2, alinéas 8, 9, 10) ; que la voiture de M. Z... en stationnement était visible à la sortie du virage et que la présence de la moto roulant à côté d'elle paraît seule expliquer que la cyclomotoriste se soit déportée complétement à gauche pour doubler le véhicule en stationnement (arrêt attaqué p. 3 alinéas 1, 2, 3, 4) ; que même si M. Z... avait stationné irrégulièrement son véhicule et si M. Y... circulait près de la ligne médiane de la chaussée, le fait que Mlle X... disposait de 2,70 mètres pour passer, démontre que les deux contraventions au Code de la route reprochées aux automobilistes n'ont pas été une cause génératrice de l'accident ; que la cyclomotoriste a commis une faute en se déportant sur la partie gauche de la chaussée et a perdu le contrôle de son cyclomoteur en raison de la trop grande vitesse à laquelle elle est sortie du virage (arrêt attaqué p. 5, 6) ;
" alors que le stationnement irrégulier d'un véhicule interfère sur la circulation des autres véhicules ; que la cour d'appel qui a reconnu que M. Z... avait stationné irrégulièrement sa voiture et que l'accident s'était produit au moment où Mlle X... s'était déportée à gauche pour l'éviter, ne pouvait dès lors exclure tout lien de causalité entre la faute de M. Z... et l'accident, sans violer les textes visés au moyen ;
" alors qu'il résulte des propres termes de l'arrêt attaqué que M. Y... " circulait près de la ligne médiane de la chaussée " soit en contravention aux dispositions de l'article R. 4 du Code de la route et que l'accident s'est produit à cet endroit ; que cette faute était nécessairement en relation de causalité avec le dommage dès lors que l'accident ne se serait pas produit si M. Y... avait roulé à droite de son couloir de circulation ; qu'en énonçant néanmoins que la faute commise par Mlle X... était seule à l'origine de l'accident, la cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences qui en résultaient en violation des textes susvisés " ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 1 et 4 de la loi du 5 juillet 1985, des articles 2 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Mlle X... entièrement responsable des conséquences dommageables de l'accident du 13 juillet 1986 et l'a en conséquence déboutée de son action civile dirigée contre Z... et Y... ;
" aux motifs que le choc entre le cyclomoteur de Mlle X... et le véhicule de Y... a eu lieu dans le couloir de circulation de ce dernier ; que lorsqu'elle s'est déportée sur la gauche pour éviter le véhicule en stationnement de Z..., elle disposait d'une largeur de chaussée de 2,70 mètres pour passer entre les deux véhicules (arrêt attaqué p. 2, alinéas 8, 9, 10) ; que la voiture de Z... en stationnement était visible à la sortie du virage et que la présence de la moto roulant à côté d'elle paraît seule expliquer que la cyclomotoriste se soit déportée complètement à gauche pour doubler le véhicule en stationnement (arrêt attaqué p. 3, alinéas 1, 2, 3, 4) ; que même si Z... avait stationé irrégulièrement son véhicule et si Y... circulait près de la ligne médiane de la chaussée, le fait que Mlle X... disposait de 2,70 mètres pour passer, démontre que les deux contraventions au Code de la route reprochées aux automobilistes n'ont pas été une cause génératrice de l'accident ; que la cyclomotoriste a commis une faute en se déportant sur la partie gauche de la chaussée et a perdu le contrôle de son cyclomoteur en raison de la trop grande vitesse à laquelle elle est sortie du virage (arrêt attaqué p. 5, 6) ;
" alors que même en l'absence de faute du conducteur d'un véhicule impliqué dans une collision, la faute du conducteur victime n'a pour effet d'exclure l'indemnisation de son dommage que si l'autre conducteur a été dans l'impossibilité d'éviter la collision ; qu'en s'abstenant en l'espèce de rechercher si la faute de Mlle X... avait été telle que ni Y..., ni Z... n'avaient pu éviter l'accident, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision " ;
Les moyens étant réunis ;
I - Sur les moyens pris en leur critique de la décision relative à la responsabilité de Patrick Y... ;
Attendu que Patrick Y... a été cité directement par Christelle X... devant le tribunal correctionnel, pour blessures involontaires ; que cette juridiction l'ayant déclaré coupable, il a relevé appel de sa décision ; qu'appel a, en outre, été interjeté à son encontre par le ministère public ;
Attendu que les juges du second degré ayant prononcé la relaxe de Patrick Y... en l'absence de faute ayant une relation de causalité avec l'accident dont a été victime Christelle X..., celle-ci est irrecevable à les critiquer d'avoir, par une application erronée des règles de droit civil, rejeté sa demande de réparation du préjudice subi ;
Qu'en effet, selon l'article 470-1 du Code de procédure pénale en cas de relaxe du premier, la juridiction répressive n'est compétente pour accorder, en application des règles de droit civil, réparation de tous les dommages résultant des faits qui ont fondé la poursuite que lorsque le Tribunal a été saisi à l'initiative du ministère public ou sur renvoi d'une juridiction d'instruction de poursuites exercées pour homicide ou blessures involontaires ;
Que tel n'était pas le cas en l'espèce ; que les moyens, dès lors, doivent être écartés ;
II - Mais sur les mêmes moyens pris en leur critique de la décision relative à la responsabilité de Francis Z... ;
Et sur le moyen relevé d'office, pris de la méconnaissance de l'autorité de la chose jugée ;
Vu les articles cités, ensemble l'article 4 du Code de procédure pénale ;
Attendu que les juges ayant à statuer sur l'action civile ne peuvent méconnaître une condamnation définitivement prononcée par la juridiction pénale ;
Attendu que Francis Z... a été condamné, par le tribunal correctionnel, pour blessures involontaires sur la personne de Christelle X... ; qu'il a interjeté appel de cette décision, sur les intérêts civils seulement ; que la constatation de l'existence, à sa charge, d'une faute ayant concouru à la production du dommage causé à la partie civile s'imposait donc à la cour d'appel ; qu'en statuant comme elle l'a fait, cette juridiction a méconnu le principe sus-énoncé ;
Que la cassation est dès lors encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt rendu le 26 janvier 1989 par la cour d'appel d'Amiens, mais en ses seules dispositions relatives à l'action civile de Christelle X... dirigées contre Francis Z...,
Et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Rouen.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 89-81443
Date de la décision : 22/03/1990
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° CHOSE JUGEE - Autorité du pénal sur le civil - Appel du prévenu - Appel limité aux intérêts civils - Portée.

1° CHOSE JUGEE - Portée - Action publique - Appel du prévenu limité aux intérêts civils 1° APPEL CORRECTIONNEL OU DE POLICE - Appel du prévenu - Appel limité - Appel limité au intérêts civils - Portée - Autorité de la chose jugée au pénal sur le civil.

1° Les juges ayant à se prononcer sur l'action civile ne peuvent méconnaître une condamnation définitivement prononcée par la juridiction pénale (1).

2° ACTION CIVILE - Fondement - Infraction - Homicide ou blessures involontaires - Relaxe - Application des règles de droit civil - Conditions.

2° APPEL CORRECTIONNEL OU DE POLICE - Appel du ministère public - Prévenu cité directement par la partie civile devant le tribunal correctionnel - Effet - Relaxe par la cour d'appel - Application des règles de droit civil - Possibilité (non).

2° La juridiction répressive est compétente pour accorder, en application des règles de droit civil, réparation de tous les dommages résultant des faits qui ont fondé la poursuite que lorsque le Tribunal a été saisi à l'initiative du ministère public ou sur renvoi d'une juridiction d'instruction de poursuites exercées pour homicide ou blessures involontaires. Tel n'est pas le cas lorsque le prévenu a été cité directement devant le tribunal correctionnel, par la partie civile, quand bien même les juges du second degré auraient été saisis de l'appel du ministère public contre ce prévenu


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens (chambre correctionnelle), 26 janvier 1989

CONFER : (1°). (1) Cf. A rapprocher : Chambre criminelle, 1976-10-27 , Bulletin criminel , 1976, n° 302, p. 774 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1978-05-18 , Bulletin criminel , 1978, n° 152, p. 394 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 mar. 1990, pourvoi n°89-81443, Bull. crim. criminel 1990 N° 127 p. 336
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1990 N° 127 p. 336

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général :M. Rabut
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Maron
Avocat(s) : Avocats :la SCP Boré et Xavier, la SCP Célice et Blancpain, M. Odent

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1990:89.81443
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