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19/03/1990 | FRANCE | N°89-81140

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 mars 1990, 89-81140


CASSATION PARTIELLE par voie de retranchement sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X... Nadine,
- Y... Guy,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, chambre correctionnelle, en date du 19 janvier 1989, qui, pour tenue d'une maison de jeux de hasard et contraventions à la réglementation fiscale des cercles et maisons de jeux, les a condamnés chacun à une amende de 1 500 francs ainsi qu'à diverses sanctions fiscales et a ordonné la confiscation de l'objet et du produit saisis.
LA COUR,
Vu les mémoires produits tant en demande qu'en défense ;
Sur le premier m

oyen de cassation pris de la violation des articles R. 226-2 du Livre des p...

CASSATION PARTIELLE par voie de retranchement sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X... Nadine,
- Y... Guy,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, chambre correctionnelle, en date du 19 janvier 1989, qui, pour tenue d'une maison de jeux de hasard et contraventions à la réglementation fiscale des cercles et maisons de jeux, les a condamnés chacun à une amende de 1 500 francs ainsi qu'à diverses sanctions fiscales et a ordonné la confiscation de l'objet et du produit saisis.
LA COUR,
Vu les mémoires produits tant en demande qu'en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles R. 226-2 du Livre des procédures fiscales, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs :
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler le procès-verbal daté du 22 avril 1986 dressé par les agents de la Direction générale des Impôts, relatant les opérations effectuées depuis le 14 février 1986 et notamment la saisie de l'appareil de jeu et de la caisse ;
" aux motifs que ce document, rédigé le 22 avril 1986, relate en fait l'ensemble des opérations effectuées par les inspecteurs de la brigade de recherche depuis leur première visite des locaux le 14 février 1986 ; qu'il a été donné mainlevée des saisies de l'appareil de jeu et de la caisse ; qu'il en résulte que le Tribunal ne pouvait prononcer la nullité d'actes inexistants, compte tenu des mainlevées intervenues ; qu'au surplus, figurent sur ce procès-verbal les mentions relatives à l'information des contrevenants de leurs droits et la sommation à eux faite d'assister à la rédaction du procès-verbal, mentions au demeurant non prescrites à peine de nullité, de sorte qu'en droit les saisies initialement ordonnées étaient valides ;
" alors, d'une part, que Y... faisait valoir dans ses conclusions d'appel qu'il n'avait reçu aucune convocation pour assister à la rédaction du procès-verbal ; que, dès lors, la cour d'appel, pour refuser de prononcer la nullité de cet acte, ne pouvait se borner à constater qu'il mentionnait que Y... avait été convoqué, sans rechercher si cette convocation était établie par une quelconque pièce du dossier ;
" alors, d'autre part, que les mentions du procès-verbal litigieux ne précisent pas les conditions dans lesquelles la lettre de Mme X..., datée du 22 avril 1986, qui y est annexée, est parvenue aux agents du fisc ; que, dès lors, l'arrêt attaqué ne pouvait s'abstenir de répondre aux conclusions de Mme X... qui faisait valoir que s'étant présentée le 22 avril 1986 dans les locaux de l'Administration, elle avait attendu en vain d'être reçue ou entendue par les agents du fisc et, sur les conseils d'un employé, avait fini par partir en laissant ladite lettre ; qu'en effet, un tel moyen, qui était sérieux, était de nature à établir l'irrégularité des conditions de la rédaction du procès-verbal du 22 avril 1986 ;
" alors, enfin, que le procès-verbal, qui ne comportait ni la date de la saisie, ni la description des objets saisis, ni la mention de la présence de la personne en infraction, ni le nom des gardiens, était entaché de nullité, portant atteinte aux droits de la défense en viciant la procédure subséquente " ;
Attendu qu'il ne saurait être fait grief à la cour d'appel d'avoir refusé d'annuler le procès-verbal dressé par les agents de l'administration des Impôts le 22 avril 1986 et portant notamment saisie réelle d'un appareil de jeux et du contenu de la caisse dès lors que les prescriptions de l'article R. 226-2 du Livre des procédures fiscales, visé au moyen, ne sont pas sanctionnées par la nullité de l'acte ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation de l'article 410, alinéa 2, du Code pénal, 592, 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné Y... et Mme X... du chef de tenue d'une maison de jeu illicite ;
" aux motifs adoptés que l'infraction pénale définie à l'article 410, alinéa 2, ne nécessite pas que l'appareil ait été exploité, mais simplement détenu ; que cette infraction est constituée dans la mesure où Mme X... et Y... ont établi, dans les dépendances de leur café, un jeu de hasard en état de fonctionnement ;
" alors que le délit de l'article 410, alinéa 2, ne peut exister que pour les jeux de hasard dont l'enjeu est en argent ; que les prévenus contestaient que le jeu vidéo qui permettait d'obtenir des parties gratuites, eût un tel enjeu, et faisaient valoir qu'ils n'en avaient tiré aucun gain de jeu ; que ni le tribunal ni la cour d'appel n'ont constaté ni relevé que ce jeu aurait eu un enjeu en argent " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué et celles du jugement auquel il se réfère mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que les juges du fond, par des motifs exempts d'insuffisance, ont caractérisé en tous ses éléments constitutifs le délit prévu et réprimé par l'article 410, alinéa 2, du Code pénal retenu à la charge respective des demandeurs ;
Que, dès lors, le moyen qui se borne à remettre en question l'appréciation par les juges des faits et circonstances contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation de l'article 1791 du Code général des impôts :
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé la condamnation solidaire de Guy Y... et Nadine X... à payer à la Direction générale des Impôts la somme de 20 000 francs x 3, soit 60 000 francs, au titre de la confiscation des recettes ;
" alors, d'une part, que la sanction prononcée n'est pas prévue par la loi, l'article 1791 du Code général des impôts permettant seulement de prononcer la confiscation des recettes saisies (20 000 francs), et non de trois fois le montant de ces recettes ;
" et alors, d'autre part, que le fait que Y... et Mme X... aient été condamnés pour trois infractions distinctes, punies chacune de la confiscation des recettes, ne permettait pas de multiplier par trois le montant des recettes confisquées ; qu'en effet, la confiscation ne peut, par définition, porter que sur une seule fois le montant des recettes, sauf à constituer une amende déguisée et illicite puisque non prévue par la loi " ;
Et sur le moyen relevé d'office pris de la violation de l'article 1791 du Code général des impôts en ce que l'arrêt attaqué a prononcé la condamnation solidaire des prévenus au paiement au profit de la Direction générale des Impôts de la somme de 20 000 francs x 3, soit 60 000 francs au titre de la confiscation de l'appareil de jeux ;
Les moyens étant réunis ;
Vu l'article cité ;
Attendu qu'en matière de contributions indirectes, la confiscation ne peut être ordonnée que pour les objets, produits ou marchandises préalablement saisis ; qu'il s'ensuit que cette mesure ne peut être prononcée qu'une fois pour un même objet de fraude, même si plusieurs infractions ont été relevées et quelle que soit la modalité, réelle ou fictive, de la saisie opérée ;
Attendu qu'après avoir déclaré Nadine X... et Guy Y... respectivement coupables de trois infractions à la réglementation fiscale des cercles et maisons de jeux à la suite de la saisie dans leur débit de boissons d'un appareil de jeux automatique et des recettes s'y rapportant, la cour d'appel, faisant droit aux conclusions de l'administration des Impôts, a prononcé au profit de cette dernière, trois fois la confiscation des recettes évaluées à 20 000 francs et trois fois la confiscation de l'appareil de jeux dont la valeur a été estimée à 20 000 francs ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a méconnu le texte et principe susvisés ;
Que la cassation est, dès lors, encourue ;
Et attendu que cette Cour trouve dans les énonciations des juges du fond les éléments lui permettant d'appliquer la règle de droit appropriée et de statuer sur les confiscations encourues pour les infractions fiscales poursuivies ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Rennes, en date du 19 janvier 1989, par voie de retranchement et en ses seules dispositions portant condamnation au titre des confiscations de l'appareil de jeux et des recettes ;
Vu l'article L. 131-5 du Code de l'organisation judiciaire ;
FIXE la condamnation solidaire des prévenus au titre des confiscations encourues :
1° - à la somme de 20 000 francs au titre de la confiscation des recettes,
2° - à la somme de 20 000 francs au titre de la confiscation de l'appareil de jeux ;
Et attendu qu'il ne reste à juger ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.


Sens de l'arrêt : Cassation partielle par voie de retranchement sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Impôts indirects et droits d'enregistrement - Confiscation - Prononcé - Modalités

IMPOTS ET TAXES - Impôts indirects et droits d'enregistrement - Confiscation - Condition - Saisie préalable - Nécessité

CONFISCATION - Confiscation spéciale - Conditions - Impôts indirects - Prononcé - Modalités

En matière de contributions indirectes, la confiscation ne peut être ordonnée que pour les objets, produits ou marchandises préalablement saisis ; il s'ensuit que cette mesure ne peut être prononcée qu'une fois pour un même objet de fraude, même si plusieurs infractions ont été relevées et quelle que soit la modalité, réelle ou fictive, de la saisie opérée. Doit donc être censuré l'arrêt d'une cour d'appel qui, après avoir déclaré les prévenus coupables de trois infractions à la réglementation fiscale des cercles et maisons de jeux à la suite de la saisie dans leur débit de boissons d'un seul appareil de jeux automatique et des recettes s'y rapportant, a prononcé au profit de l'administration des Impôts trois fois la confiscation des recettes et trois fois la confiscation en valeur de l'appareil de jeux (1).


Références :

CGI 1791

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes (chambre correctionnelle), 19 janvier 1989

CONFER : (1°). (1) Cf. A rapprocher : Chambre criminelle, 1988-06-06 , Bulletin criminel 1988, n° 250, p. 664 (annulation sans renvoi) ;

Contra : Chambre criminelle, 1913-06-05 , Bulletin criminel 1913, n° 266, p. 525 (cassation partielle) ; Chambre criminelle, 1977-10-06 affaire X... (inédit) ; Chambre criminelle, 1977-11-21 , Bulletin criminel 1977, n° 358, p. 911 (sur le pourvoi de la Direction générale des Impôts : cassation)


Publications
Proposition de citation: Cass. Crim., 19 mar. 1990, pourvoi n°89-81140, Bull. crim. criminel 1990 N° 120 p. 309
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1990 N° 120 p. 309
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Composition du Tribunal
Président : Président :M. Tacchella, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général :M. Rabut
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Bayet
Avocat(s) : Avocats :la SCP Waquet, Farge et Hazan, M. Foussard

Origine de la décision
Formation : Chambre criminelle
Date de la décision : 19/03/1990
Date de l'import : 14/10/2011

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 89-81140
Numéro NOR : JURITEXT000007063641 ?
Numéro d'affaire : 89-81140
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;1990-03-19;89.81140 ?
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