REJET du pourvoi formé par :
- le procureur général près la cour d'appel de Nouméa,
contre l'arrêt de ladite Cour, chambre correctionnelle, du 22 août 1989, qui, dans les poursuites exercées contre X... du chef d'injures envers des fonctionnaires publics, a déclaré que l'action publique n'avait pas été régulièrement mise en mouvement et que la prescription était acquise.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 48, alinéa 3, de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
Attendu que, par exploit du 24 mai 1989, le procureur de la République a fait citer devant le tribunal correctionnel X..., directeur de la publication du journal Y..., sous la prévention d'injures publiques envers les fonctionnaires de l'Etat, collaborateurs du Haut-commissaire de la République, à raison de la publication dans le numéro 28 de cet hebdomadaire, daté du 4 au 10 mars 1989, d'un article intitulé " Les coups de sagaie de çadeouise... stranger in la Foa " et comportant les termes " Z... et sa bande de débiles profonds " ;
Que, par jugement du 30 juin 1989, le tribunal correctionnel, constatant qu'aucune plainte préalable aux poursuites, émanant soit des fonctionnaires concernés soit du ministre, ne figurait dans la procédure, en a déduit que l'action publique n'avait pas été mise en mouvement, que la poursuite était nulle et que la prescription était acquise ;
Que, sur l'appel interjeté par le procureur général, la cour d'appel observe que celui-ci a versé au dossier de la procédure une lettre, portant la mention " Confidentiel ", du délégué général du Gouvernement, Haut-commissaire de la République, datée du 29 mars 1989, adressée au procureur de la République et reçue par celui-ci le 6 avril 1989, lui signalant l'article de journal en cause, et lui demandant que les auteurs des écrits soient recherchés et, dans la mesure du possible, sanctionnés ;
Que les juges du second degré énoncent que ce document en raison de son caractère confidentiel n'a pas été annexé à l'enquête et n'a pas été produit devant le Tribunal ; qu'ils en déduisent qu'il ne présente pas le caractère d'une véritable plainte, au sens de l'article 48, alinéa 3, de la loi du 29 juillet 1881 et qu'en l'absence d'une telle plainte l'action publique n'a pas été régulièrement mise en mouvement ;
Attendu, en cet état, que si la mention " confidentiel " portée sur la lettre du 23 mars 1989 n'interdisait pas de la considérer comme une plainte elle aurait dû être soumise aux premiers juges qui, contrairement à ce qui est soutenu par le procureur général, ne pouvaient, sans excès de pouvoir, enjoindre au ministère public de la produire ;
Qu'en effet la mise en mouvement de l'action publique étant, selon l'article 48, alinéa 3, précité, subordonnée au dépôt d'une plainte régulière, il doit être justifié de celle-ci dès l'engagement des poursuites ;
Qu'au surplus la plainte émanant de la seule autorité locale ne saurait satisfaire aux dispositions de l'article 48, alinéa 3, de la loi sur la presse, auquel la loi du 9 novembre 1988 n'a apporté aucune dérogation, et qui exige qu'en la matière la plainte émane du ministre dont relèvent les fonctionnaires diffamés ou injuriés ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.